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Décentralisation - Le Sénat rêve d'être le chef d'orchestre du dialogue entre l'Etat et les collectivités

Après avoir torpillé le Haut Conseil des territoires, le Sénat veut une relance du dialogue entre l'Etat et les collectivités territoriales, mais cette fois sous son égide. Un rapport de la délégation aux collectivités fait des propositions allant dans ce sens.

De par son statut de représentant constitutionnel des collectivités territoriales, le Sénat a toute légitimité pour favoriser le dialogue entre l'Etat et les élus locaux, à l'heure où ce dernier est plus que jamais nécessaire, estime un rapport de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation.
Ce rapport élaboré sous la responsabilité de François Grosdidier (LR) et Nelly Tocqueville (PS) propose concrètement de relancer la conférence des collectivités territoriales que le Sénat a réunie le 9 décembre 2014, en partenariat avec l'Association des maires de France, l'Assemblée des départements de France et l'Association des régions de France (voir notre article du 10 décembre 2014). Placée sous l'égide du président du Sénat, la conférence se réunirait régulièrement sur des thèmes d'actualité communs à l'Etat et aux élus locaux. Quant à son secrétariat, il serait assuré par la délégation sénatoriale aux collectivités. "Les conclusions adoptées ou les points de consensus constatés" permettraient la rédaction de propositions de loi ou de résolution.

400 instances locales de concertation

On se souvient que la création fin 2014 de la conférence des collectivités territoriales est intervenue avec, en toile de fond, la discussion au Parlement de la réforme territoriale. Et qu'au cours de ce débat a surgi la proposition de création d'un Haut Conseil des territoires, organisme ayant vocation à organiser le dialogue entre l'Etat et les collectivités. Or, considérant que ce dernier concurrencerait directement la Haute Assemblée, les sénateurs avaient obtenu, en décembre 2013, que leurs collègues du palais Bourbon renoncent à sa création. Mais, quelques mois plus tard, ils avaient dû monter de nouveau au créneau. En étant couronnés de succès puisqu'à l'été 2015, les députés ont fait une croix sur la création du Haut Conseil, mais non sans monnayer ce geste.
Tout en étant hostiles au Haut Conseil, les sénateurs reconnaissent que le dialogue entre l'Etat et les élus locaux est indispensable et doit progresser. Pour faire vivre ce dialogue, des instances de concertation existent aujourd'hui. Elles sont même très nombreuses : les rapporteurs en recensent pas moins de 400 à l'échelon national et quelque 70 dans chaque département. Mais, problème, ce "foisonnement" des lieux de concertation "n'est pas un gage de qualité du dialogue". François Grosdidier et Nelly Tocqueville dénoncent ainsi un dialogue qui est parfois de pure forme. Les conseils départementaux de l'éducation nationale l'illustrent bien, selon eux. Même si tous les acteurs locaux se prononçaient contre la carte scolaire, elle serait en effet tout de même adoptée, avancent-ils.

"Coproduire les politiques publiques"

Logiquement, les rapporteurs appellent à une réduction du nombre des enceintes de concertation et, en parallèle, à un renforcement de leurs moyens. Surtout, ils recommandent de donner aux élus locaux la possibilité d'"infléchir les décisions" de l'Etat. Un vœu pieux ? Certaines initiatives de dialogue mises en place vont déjà dans ce sens-là, assurent-ils. Les sénateurs citent la plateforme commune Etat-région cosignée le 30 mars dernier (lire notre article du 1er avril 2016: Etat et régions renforcent leur partenariat sur l'emploi, la formation et l'économie) et la contribution du Conseil national d'évaluation des normes à la simplification de la production réglementaire.
Mais le chemin sera encore long pour parvenir à la "coproduction des politiques publiques" entre l'Etat et les collectivités territoriales que les rapporteurs appellent de leurs voeux. Dans un pays qui demeure marqué par son histoire jacobine, il faudrait une révolution des mentalités. En particulier, les dirigeants de l'Etat devraient cesser de considérer qu'ils sont "les seuls détenteurs de l'intérêt général". Car, regrettent les sénateurs, cette position les amène à traiter encore trop souvent les élus locaux avec "un certain mépris".

 

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