Transports - Le Sénat a adopté le projet de loi sur la continuité du service public de transport
Le Sénat a adopté le 19 juillet le projet de loi controversé sur "le dialogue social et la continuité du service public de transport". En se gardant d'employer directement le terme de service minimum, le texte défendu par le ministre du Travail, Xavier Bertrand, laisse aux collectivités concernées la responsabilité de définir les "dessertes à assurer en priorité en cas de perturbation prévisible du trafic", pour cause de grève, d'incident technique ou d'aléa climatique.
Deux mesures qui constituent aux yeux des syndicats une "atteinte au droit de grève" ont été particulièrement combattues par l'opposition : l'obligation pour un salarié de se déclarer gréviste 48 heures à l'avance, et l'instauration d'un vote à bulletins secrets pour décider de la poursuite ou de l'arrêt du mouvement au-delà de huit jours de grève. La consultation des salariés n'est toutefois pas une obligation mais est laissée à l'appréciation de l'employeur. Purement indicative du climat social dans l'entreprise, elle n'a aucun effet automatique sur la poursuite ou non du mouvement.
Les sénateurs en ont d'ailleurs atténué la portée en prévoyant qu'un médiateur puisse intervenir dès le début de la grève. "Choisi d'un commun accord" par les parties il devra "favoriser le règlement amiable de leurs différends".
Un amendement défendu par Catherine Procaccia (UMP), rapporteur de la commission spéciale du Sénat, a précisé les conditions de remboursement des usagers en cas de défaut d'exécution dans la mise en oeuvre du plan de transport adapté ou du plan d'information prévu lors des perturbations. Ainsi, le texte prévoit que l'autorité organisatrice impose à l'entreprise de transport, quand celle-ci est directement responsable du défaut d'exécution, un remboursement total des titres de transport en fonction de la durée de non-exécution de ces plans. L'autorité organisatrice détermine par convention avec l'entreprise les modalités pratiques de ce remboursement selon les catégories d'usagers. Le remboursement peut être effectué par l'autorité ou l'entreprise. Lorsque des pénalités pour non-réalisation du plan de transport adapté sont prévues, l'autorité organisatrice peut décider de les affecter au financement du remboursement des usagers.
Des critères de qualité de services sociaux et environnementaux
Un amendement défendu par Michel Bouillout (PCF), au titre du règlement européen "Obligation de service public", a par ailleurs été adopté. Il oblige les autorités organisatrices à incorporer dans les contrats qu'elles passent avec les opérateurs des critères de "qualité de services (sociaux et environnementaux) afin d'élever la fiabilité et la prévisibilité des services et par conséquent permettre une meilleure continuité du service public".
Le texte a en outre été musclé sur deux dispositions : il renforce le principe du non-paiement des heures de grève, en précisant que toute disposition contractuelle contraire est "réputée sans cause", et envisage une extension du service minimum "aux autres modes de transport public de voyageurs", au terme d'un bilan de sa mise en oeuvre avant le 1er octobre 2008. Le Sénat a toutefois renoncé à la rédaction initiale de cet amendement de Catherine Procaccia qui visait l'extension du dispositif "à d'autres services publics".
Deux jours après les déclarations du Premier ministre, François Fillon, cet amendement n'en a pas moins suscité une levée de boucliers de la part de l'opposition. "Cette loi, c'est le début d'une loi de restriction du droit de grève qui va s'étendre à tous les secteurs publics", a protesté Jean Desessard (Verts). Dans le même esprit, Annie David (PCF) a défendu sans succès un amendement proposant de changer l'intitulé du projet de loi en "projet de loi relatif à l'instauration d'un service minimum dans les transports publics et portant atteinte au droit de grève". "Le dialogue social n'est pour vous qu'une formule creuse", s'est exclamé de son côté Jean-Pierre Godefroy (PS), affirmant qu'avec ce texte "tous les obstacles sont judicieusement posés pour que le dialogue n'aboutisse pas".
Anne Lenormand avec AFP