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Catastrophes - Le "plan communal de sauvegarde" encore en réanimation

Prévu par la loi dès 2004, le plan communal de sauvegarde est encore rarement mis en oeuvre par les municipalités. Seules 3.000 communes en sont aujourd'hui dotées, alors qu'il est obligatoire dans nombre d'entre elles. Les dernières catastrophes naturelles pourraient pourtant motiver les maires à engager cette planification. De fait, son coût n'est pas rédhibitoire...

Le pronostic vital ne semble plus vraiment engagé pour le "plan communal de sauvegarde" (PCS)… Conçu pour mieux protéger les populations face aux catastrophes éventuelles, ce document avait été prévu en 2004, par la loi de Modernisation de la sécurité civile. Certes, sept ans après, le dispositif paraît encore livide. Sur les 36.682 communes françaises, 3.000 à peine en sont dotées aujourd’hui. "Et je n’en ai pas vu trois qui fonctionnaient réellement", a pu souligner le chargé de mission Benoît Hannart, mardi 25 janvier à l’université Paul-Valéry de Montpellier, lors de la rencontre Géorisque. Ce colloque, organisé par des étudiants de master 2 et par le laboratoire de recherche Gred (1), l’a pourtant rappelé : le PCS est obligatoire dans de nombreuses collectivités.

Plus de 7.000 communes contraintes

La loi l’impose en effet aux mairies concernées par un plan particulier d’intervention (PPI) - pour faire face aux risques d’une centrale nucléaire, ou d’un site industriel, par exemple -, ainsi qu’aux communes dotées d’un plan de prévention des risques naturels (PPRN) déjà approuvé. Rien qu’à ce titre, "7.000 communes ont aujourd’hui un PPRN validé, rapporte Johnny Douvinet, maître de conférences à l’Université d’Avignon, et parmi elles, 2.000 à peine disposent d’un PCS approuvé..."
Quelque 1.000 autres PCS ont pu être réalisés dans des communes qui n’y étaient pourtant pas contraintes. En effet, "la logique des préfectures est actuellement d’étendre les PCS aux communes qui n’y sont pas soumises", observe Emma Haziza, directrice de l’agence Mayane environnement. Tant mieux, estime-t-elle : "De nombreuses communes ne sont pas considérées comme à risques, alors qu’elles ont pris plusieurs arrêtés de catastrophe naturelle - parfois dix en vingt ans !" L’année 2010 aura aussi pu terrifier bien des édiles, entre la tempête Xynthia, en février, et les inondations dans le Var, en juin. Certes, le PCS ne porte guère sur l’organisation des secours, mais il permet déjà de prévoir comment informer et alerter les populations ou les mettre à l’abri…

Bouche-à-bouche

Tout espoir n’est donc pas perdu pour le PCS ! La rencontre Géorisque a d’ailleurs permis de trouver quelques pistes de bouche-à-bouche pour ce dispositif… Première leçon, son coût n’est guère insurmontable, même pour les petites communes. Dans l’Aude, ravagée par les inondations en 1999, aucun PCS n’avait encore été réalisé en 2006. Sous l’impulsion du Syndicat mixte des milieux aquatiques et des rivières (Smmar), un pilotage départemental a d’abord été mis en place ; des financements ont été recherchés. Compte tenu de leurs moyens, les communes ont été invitées à faire appel à des prestataires extérieurs, en se regroupant par bassin versant, plutôt que d’agir isolément. Jacques Chabaud, du Smmar, estime à près de 30% l’économie d’échelle ainsi réalisée. Résultat ? Aujourd’hui 180 PCS sont en cours, ou ont été réalisés ; 25 autres sont programmés pour 2011…
"L’absence de moyens financiers ou le faible nombre d’habitants ne freinent pas forcément la mise en place de ces documents", conclut Johnny Douvinet. "On retrouve un plus fort pourcentage de PCS dans des communes moyennes, de 10.000 à 50.000 habitants", acquiesce Mathilde Gralepois, maître de conférences à l’université de Tours. D’après elle, le coût moyen d’un PCS varie entre 8.000 et 15.000 euros, selon la taille de la commune.
Au fond, "tout dépend d’abord de la motivation des élus, ainsi que de la préfecture et des services de protection civile, qui peuvent relayer efficacement les instructions de l’Etat", reprend Johnny Douvinet. Encore que, ces derniers temps, "les services de sécurité civile en préfecture voient leurs moyens diminuer, du fait de la révision générale des politiques publiques (RGPP)".

"Inondés"

Mais bien des écueils demeurent pour une mise en oeuvre des PCS en France. François Giannoccaro, directeur de l’Institut des risques majeurs (IRMa), repère notamment une "faible culture globale du risque", une "incompréhension des objectifs de la démarche" par les maires, un manque de chefs de projet dans les petites communes, une trop grande rareté des exercices de simulation, ou encore l’absence de retours d’expériences. Le chargé de mission Benoît Hannart évoque, enfin, un handicap général : "Le plan est souvent assimilé à une contrainte supplémentaire pour les maires, alors qu’en France, nous sommes inondés de normes !" Pas étonnant que le PCS ait ainsi pris l’eau.

(1) Laboratoire "Gouvernance, risque, environnement, développement". Le master 2 de l’université de Montpellier III est consacré à la "gestion des catastrophes et des risques naturels".
 

 

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