Le Conseil d'Etat annule la décision de Manuel Valls de restreindre l'encadrement des loyers à Paris et Lille
Le pouvoir réglementaire ne peut pas "procéder à une mise en oeuvre de la loi à titre expérimental lorsque la loi ne l'a pas elle-même prévu", rappelle le Conseil d'Etat. La loi en question, c'est la loi Alur du 24 mars 2014. Et la mise en œuvre, c'est celle du dispositif d'encadrement des loyers prévu par son article 16. Par une décision du 15 mars 2017, le Conseil d’Etat annule la décision de Manuel Valls de restreindre l’application de l’encadrement des loyers à la ville de Paris. "La décision du Premier ministre révélée par ses déclarations des 29 et 31 août 2014 est annulée", mentionne l'article 1 de sa décision N°391654.
Les déclarations du 29 août 2014 font références au discours du Premier ministre lors de la présentation de son "plan de relance du logement" (voir notre article du 28 août 2014). Il avait alors dit, à propos du dispositif d'encadrement des loyers: "Nous avons désormais assez de recul pour juger des difficultés de sa mise en oeuvre. Tous les acteurs le disent : les conditions techniques ne sont pas réunies, et ne le seront pas avant des mois, voire des années. C'est notamment le cas pour la collecte des données des loyers. Cette situation complexe génère trop d'incertitude pour les investisseurs. Le dispositif sera donc appliqué à titre expérimental à Paris. Il ne sera pas étendu aux autres agglomérations concernées tant qu'un bilan sur sa mise en oeuvre n'aura pas été réalisé." Deux jours plus tard, le 31 août 2014, le Premier ministre avait précisé que le dispositif pourrait également être expérimenté à Lille (voir notre article du 1er septembre 2014)
Le Conseil d'Etat constate que "la décision du Premier ministre de ne mettre en oeuvre ces dispositions législatives que dans les agglomérations de Paris et Lille et de subordonner à la réalisation d'un bilan de cette mise en oeuvre expérimentale l'application de ces mêmes dispositions dans les autres agglomérations concernées (Ndrl : les 28 agglomérations définies par décret)" a "le caractère d'un acte faisant grief".
"C’est une énorme victoire du droit et de la lutte contre le mal-logement. Victoire du droit car cette décision confirme que le Premier ministre ne peut faire obstacle à l’application de la loi pour satisfaire tel ou tel lobby ou son intérêt politique”, s'est réjoui Julien Bayou, président de l'association "Bail à part - Tremplin pour le logement" qui avait déposé le recours, également porte-parole d'EELV (Europe Ecologie Les Verts) et candidat aux élections législatives dans deux arrondissements parisiens.