Urbanisme commercial - Le CNCC veut faire amender la réforme de l'urbanisme commercial
Le jeudi 24 mars 2011 fut une journée particulièrement chargée pour les adhérents du Conseil national des centres commerciaux (CNCC), avec assemblée générale le matin et, l'après-midi, présentation d'un tout nouvel observatoire des sites commerciaux. L'occasion de dresser un panorama complet des 719 centres commerciaux, accueillant plus de 32.000 points de vente, que compte la France. Et de rappeler, en préambule, que le secteur a plutôt bien résisté en 2010, dans un contexte encore marqué par la crise mondiale. Ainsi la fréquentation des centres commerciaux n'a baissé que de 1,3% en 2010, après une chute de 3,7% en 2009. Selon le CNCC, elle devrait dès 2011 s'inscrire à nouveau en hausse. Quant au chiffre d'affaires, il a progressé de 0,7% en 2010, pour l'ensemble des centres commerciaux, après une baisse de 2,7% en 2009. Dans le détail, ce sont les centres commerciaux intercommunaux qui se montrent les plus performants, avec une progression de leur chiffre d'affaires atteignant 1,4% en 2010. Ils sont suivis par les centres commerciaux régionaux (+0,6%), tandis que les centres de coeur de ville historique restent en retrait (-0,1% en 2010). "Avec une fréquentation en stabilisation, le centre commercial apparaît comme un lieu repensé au fil des rénovations et des extensions ; compte-tenu des enjeux environnementaux et sociétaux issus du développement durable, les nouveaux sites commerciaux sont désormais perçus comme des lieux de vie, respectueux socialement et écologiquement, permettant une pérennité de ce modèle économique", a analysé Sébastien Allo, responsable des études marketing chez Hammerson, lors de la conférence.
Typologie
Pas question de crier "reprise" pour autant, encore moins face à la concurrence intense du commerce en ligne, dont le chiffre d'affaires a augmenté de 26% en 2010, selon la Fevad (Fédération de l'e-commerce et de la vente à distance). Aussi le CNCC a rappelé que les projets immobiliers des opérateurs et des enseignes visaient, pour la plupart, des extensions, des rénovations et des mises en conformité avec les nouvelles normes environnementales, dans des zones déjà bien achalandées, plutôt que des créations pures.
Une prudence d'autant plus opportune dans un environnement règlementaire en voie de durcissement. La proposition de loi, déposée le 3 mai 2010 par les députés UMP Michel Piron et Patrick Ollier (aujourd'hui ministre chargé des relations avec le parlement), prévoit en effet de soumettre l'urbanisme commercial aux règles de droit commun. En renforçant considérablement les moyens de contrôle des collectivités territoriales : elles devront penser les zones et centres commerciaux dans le cadre d'un document d'aménagement commercial (DAC), intégré dans leur schéma de cohérence territoriale (Scot) ou, à défaut, dans un plan local d'urbanisme (PLU), respectant toutes les contraintes et objectifs d'aménagement durable du territoire : revitalisation des centres-ville, préservation des commerces de détail, limitation des déplacements individuels, protection des espaces agricoles...
Déjà votée à l'Assemblée nationale, en première lecture, le 15 juin 2010, la proposition sera soumise à l'approbation du Sénat à partir du mercredi 30 mars. En présentant son observatoire, le CNCC a rappelé à ses adhérents combien il suivait de près les évolutions de ce texte, auquel il est favorable sur le fond. Mais qu'il souhaite amender sur plusieurs points : afin de mieux associer les professionnels du commerce lors de l'élaboration des DAC, et de limiter la possibilité pour les élus locaux d'intervenir sur le contenu, la typologie des magasins et centres commerciaux. La proposition de loi instaure en effet une typologie en quatre secteurs d'activité : commerce alimentaire, équipement de la personne, équipement de la maison et culture et loisirs", explique le CNCC. "Cette typologie sera extrêmement préjudiciable pour l'ensemble des commerces, avec notamment le risque d'interdire toute évolution ou adaptation des commerces aux besoins des consommateurs et de certains commerçants qui verront disparaître la valeur de leur pas de porte", prévoit-il.
Rendre les recours contentieux plus contraignants
"Il convient de préciser que ces différentes actions de lobbying menées par la délégation générale du CNCC auprès des pouvoirs publics se sont accompagnées d’un contact régulier avec les membres des cabinets des ministres compétents", a par ailleurs rappelé le CNCC à l'adresse de ses adhérents.
Parallèlement, l'organisme mène auprès des parlementaires et du gouvernement une action intense, en vue d'éradiquer ce qu'il considère comme un fléau : la multiplication des recours contentieux contre les projets de centres commerciaux, engagés par des associations, des particuliers, mais aussi par des enseignes concurrentes. A Meaux, par exemple, le projet dit des Saisons de Meaux, un ensemble de 65.000 mètres carrés et de 90 boutiques autour d'Auchan, qui devait ouvrir en octobre 2012, est contesté en justice par Leclerc, évincé de l'appel d'offres. Au nom d'une atteinte aux commerces des centres-ville et à l'intégrité des terres agricoles. Le recours devrait retarder la construction de six à huit mois. Pour éviter ce genre de désagrément, le CNCC propose aux parlementaires des propositions de loi "clés en main", visant à rendre beaucoup plus contraignants les recours contentieux contre les projets d'envergure, et à accélérer la procédure judiciaire.
Les professionnels semblent apprécier cette défense de leurs intérêts. Du moins le nombre d'entreprises adhérentes a progressé de 58% en cinq ans, pour atteindre aujourd'hui 347 membres. De quoi poser le CNCC comme un interlocuteur incontournable des futurs débats législatifs sur l'urbanisme commercial.
Paul Arguin
Urbanisme commercial : le gouvernement en désaccord sur deux points
Le gouvernement est en "désaccord" avec deux points de la proposition de loi relative à l'urbanisme commercial qui sera examinée par le Sénat à partir de mercredi, a indiqué mardi à l'AFP le secrétaire d'Etat au Logement Benoist Apparu.
Le gouvernement est certes "favorable au principe même de cette proposition de loi et à ce qui la sous-tend, à savoir sortir la question des implantations de commerces du droit commercial", pour l'inscrire dans le droit de l'urbanisme, a-t-il souligné. Mais "on a effectivement avec les sénateurs deux points de désaccord", a-t-il ajouté.
En décembre, les sénateurs ont notamment adopté un amendement du rapporteur Dominique Braye "qui permet de définir des règles de localisation préférentielle des implantations commerciales en tenant compte de leur secteur d'activité". "On y est défavorable parce qu'on considère que ça fige les situations commerciales, et qu'un document d'urbanisme n'est pas là pour dire quel type de commerce peut s'ouvrir ou pas", a indiqué M. Apparu.
De même, le texte prévoit la création à titre transitoire de commissions régionales d'aménagement commercial, qui remplaceraient les actuelles commissions départementales et nationales d'aménagement commercial (CDAC et CNAC), issues de la Loi de modernisation de l'économie (LME) de 2008.
"Pour des questions de simplicité, on se dit qu'on ne va pas inventer un nouveau régime pour une période transitoire. Restons sur le régime LME le temps que le nouveau régime s'applique", a ajouté M. Apparu.
AFP