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Entreprises - L'avenir des 121 "grappes d'entreprises" en pointillé

Lancées en 2009, les 121 "grappes d'entreprises" représentent un dispositif pertinent qui répond aux attentes des membres et qui contribue à consolider ou faire émerger des filières, d'après un bilan récemment publié. Mais alors que les soutiens de l'Etat arrivent à leur terme, elles sont menacées de disparition. A moins que les collectivités ne prennent le relai, comme en Midi-Pyrénées.

Les "grappes d'entreprises", lancées en 2009 par Michel Mercier, alors ministre de l'Espace rural et de l'Aménagement du territoire, restent un dispositif pertinent, d'après un bilan réalisé par les cabinets Erdyn et Technopolis. Les deux cabinets avaient été mandatés sur le sujet en décembre 2013 par la Datar, fondue depuis dans le Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET).
Sur les 126 grappes reconnues par l'Etat, à travers deux appels à projets en 2010 et 2011, 121 sont toujours actives. Destinés à structurer des écosystèmes économiques localement et à apporter des services concrets aux entreprises, ces réseaux répondent bien aux attentes des PME et des TPE, leurs principaux membres. Autre atout du dispositif : sa complémentarité. Il se positionne en effet sur des secteurs de basse technologie (industries alimentaires, fabrication de boissons, de textiles, industrie de l'habillement…) et moyenne-basse technologie (fabrication de produits en caoutchouc et en plastique, métallurgie, construction navale…) sur lesquels se retrouvent une bonne partie des PME et TPE "qui peuvent être plus ou moins laissées de côté par des politiques telles que celle de soutien aux pôles de compétitivité ou de développement économique et de l'innovation", détaille l'audit.
Au total, 50% des grappes se positionnent sur des secteurs d'activités de basse technologie et 29,5% de moyenne-basse technologie. Le dispositif a également permis de favoriser les coopérations et les mutualisations de moyens principalement autour d'actions collectives.
Le dispositif des grappes s'articule bien avec les pôles de compétitivité, un des objectifs de l'appel à projets, avec un développement rapide des relations entre les grappes et les pôles. "La politique des grappes a trouvé une complémentarité avec celle des pôles de compétitivité en termes de profil d'entreprises, de positionnement sur des secteurs peu ou non couverts par les pôles, etc.", indique l'audit. Les grappes sont même parfois venues se substituer à l'absence de pôles de compétitivité, en Outre-mer notamment, hormis à La Réunion, en Guadeloupe et en Guyane, où il existe des pôles.

Les grappes reproduisent le schéma territorial des inégalités

Les collaborations avec les autres clusters sont variables. Elles sont élevées avec les clusters régionaux et les grappes d'une même région mais quasiment inexistantes avec les pôles d'excellence rurale (PER) et les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE). Par ailleurs, l'évaluation indique que les grappes d'entreprises contribuent à consolider et/ou à faire émerger des filières à travers des dynamiques collaboratives interentreprises réelles et la diffusion d'innovations technologiques et non technologiques.
En revanche, les grappes n'ont pas contribué à résorber les inégalités territoriales, au contraire. Leur localisation reproduit globalement la carte des disparités régionales, sauf en Outre-mer. Elles sont ainsi concentrées dans l'ouest de la métropole avec un prolongement par la Loire vers le bassin parisien jusqu'au nord, sur le littoral méditerranéen (particulièrement le sud-est) et le nord de la vallée du Rhône. La diagonale qui part des Ardennes vers le Massif central est peu fournie en grappes, de même que les territoires de faible densité. "Pour autant, les grappes sont des outils de développement économique", insiste l'évaluation : environ 70% des membres sont à moins d'une heure du siège de la grappe d'entreprises, 87,6% des grappes ont leur cellule d'animation localisée sur un grand pôle ou sa couronne. Et "la répartition géographique des membres des grappes par secteur sur le territoire est comparable à ce que l'on peut retrouver sur l'ensemble du tissu économique français", précisent les deux cabinets.

Une situation financière fragile

Malgré ces bons résultats, la pérennité du dispositif n'est en rien acquise. Les grappes d'entreprises restent globalement fragiles du point de vue financier. Les financements apportés par le CGET sont conséquents. 24 millions d'euros ont été mobilisés pour les deux vagues d'appels à projets, complétés par des soutiens de la Caisse des Dépôts et d'Oséo (fondue dans bpifrance) et d'autres ministères. Mais ces fonds ne sont attribués aux grappes que pour trois ans et nombre d'entre elles ont du mal à réussir la transition de leur modèle économique vers plus de financements privés. "Si seulement cinq grappes ont aujourd'hui disparu, la situation de plusieurs autres est préoccupante sur le plan budgétaire", signale le document, qui indique que sur ces cinq, quatre sont issues du premier appel à projets et ont subi la fin du financement de la Datar en décembre 2013.
Pour l'année 2014, les grappes en activité anticipent des baisses de ressources : une baisse de 22,7% de leurs ressources publiques et une chute de 10,6% de leurs ressources privées (cotisations et prestations). Et les soutiens proposés, à travers des mises à disposition de locaux de personnels par les agences régionales et les chambres de commerce et d'industrie notamment, ne permettront pas d'atténuer les effets de ces baisses de budget. Mais les collectivités pourraient prendre le relais, lorsque les grappes s'inscrivent dans leurs stratégies, expliquent les deux cabinets. Exemple en Midi-Pyrénées : la grappe du secteur des technologies de l'information et de la communication (TIC) correspond à un axe de la stratégie régionale d'innovation (SRI) repris dans la stratégie de spécialisation intelligente (SE). Elle représente donc un enjeu important pour la région et pour l'agglomération de Toulouse. Les deux collectivités pourraient augmenter leur soutien pour compenser l'arrêt des financements du CGET. Autres possibilités pour éviter leur disparition : une intégration dans un pôle de compétitivité proche du point de vue sectoriel et géographique ou un accompagnement par les réseaux consulaires.
Les deux cabinets proposent d'élargir la gouvernance nationale de la politique des grappes aux organismes consulaires et aux collectivités, en particulier les régions.

 

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