Insertion - L'articulation entre le RSTA et la prime pour l'emploi fait polémique
L'article 11 du projet de loi de finances pour 2010, en cours d'examen à l'Assemblée nationale, prévoit d'exonérer le revenu supplémentaire temporaire d'activité (RSTA) d'impôt sur le revenu mais, en revanche, de l'imputer sur le montant total de la prime pour l'emploi (PPE). Selon le député Jérôme Cahuzac (PS), rapporteur spécial de la commission des finances pour l'outre-mer, cette mesure engendrerait une économie de 130 millions d'euros. Lors d'un débat au Sénat, le 21 octobre, sur la situation dans les DOM, Marie-Luce Penchard, la secrétaire d'Etat chargée de l'outre-mer, avait été plus prudente en indiquant qu'"il est très difficile, compte tenu du taux d'imposition en outre-mer (où il y a un abattement de 30% ou 40% sur l'impôt sur le revenu selon les DOM), de connaître aujourd'hui l'impact de la PPE sur le RSTA".
La mesure prévue par l'article 11 a en tout cas déclenché une vive polémique entre le député et président du conseil régional de Guadeloupe, Victorin Lurel, et le ministre du Budget. Le premier a en effet déposé plusieurs amendements visant à supprimer l'imputation du RSTA sur le montant de la PPE. L'Assemblée les ayant écartés sur la recommandation du gouvernement - après plusieurs rappels au règlement -, le député de la Guadeloupe a publié un communiqué indiquant qu'"en faisant du RSTA une simple déclinaison ultramarine du RSA, le gouvernement - aveuglé par sa volonté d'économiser 300 millions d'euros [sur trois ans, NDLR] - prend le risque de revenir sur l'esprit des accords signés le 4 mars [2009, après le conflit social dans les DOM, NDLR], en oubliant que ce RSTA est une conquête du mouvement social".
Toute la polémique vient de la nature du RSTA. Pour le gouvernement, ce dernier a été conçu comme "une anticipation du RSA", qui devrait être mis en place outre-mer au plus tard le 1er janvier 2011. Dans ces conditions, Marie-Luce Penchard et Eric Woerth estiment qu'il convient de se référer au droit commun social et fiscal appliqué au RSA en métropole et qui prévoit bien une imputation de ce dernier sur le montant de la PPE. Au contraire, Victorin Lurel et les élus d'opposition en outre-mer s'appuient sur les accords Binot du 4 mars 2009, qui ont mis fin au conflit social dans les DOM. A cette occasion, le RSTA - mis en place en urgence pour répondre à la crise - avait été présenté comme un supplément de salaire et ne devrait donc pas s'imputer sur la PPE.
Si le gouvernement a maintenu la disposition, il n'a cependant pas fermé complètement la porte. Eric Woerth a évoqué un possible réexamen de la question et Marie-Luce Penchard a proposé "de faire un bilan de la situation et de rendre compte à la représentation parlementaire dans six mois". La réponse sur la nature du RSTA pourrait toutefois être apportée de façon plus prématurée par le Conseil constitutionnel, que l'opposition envisage de saisir.
Jean-Noël Escudié / PCA