Culture - L'arrêt du centre Pompidou mobile, la fin d'une époque ?
Deux ans après son lancement (voir notre article ci-contre du 24 mai 2011), le centre Pompidou mobile annonce que l'aventure s'arrêtera après son passage à Aubagne, du 29 juin au 29 septembre. Avec l'exposition en cours au Havre (qui s'achève le 22 mai) et les précédentes à Chaumont, Cambrai, Boulogne-sur-Mer et Libourne, le centre Pompidou mobile aura ainsi visité six villes moyennes. L'étape nantaise se trouve donc de fait annulée.
Un financement insuffisant
Avec ses trois modules sous tentes de 200 m2, installés sur un terrain d'environ 1.000 m2, le centre Pompidou mobile présentait une quinzaine de chefs-d'œuvre de l'art moderne et contemporain, issus des collections du musée. Alain Seban, son président, n'a pas caché, dans une déclaration à l'AFP, les raisons de la fin de cette démarche : "Nous arrêtons l'expérience dans la mesure où la situation économique ne nous permet plus d'assurer le financement de l'itinérance du centre Pompidou." Il s'est fait plus précis en indiquant que "les mécènes qui avaient uni leurs efforts pour financer cette itinérance ne sont plus en mesure de continuer. Par ailleurs, nous ne bénéficions plus de l'aide initiale de 1,5 million d'euros dégagée par le ministère de la Culture pour permettre le lancement du projet".
Si la moindre participation des mécènes peut sembler surprenante au regard de la santé des entreprises concernées - Groupe Galeries Lafayette, GDF Suez, Fondation Total... -, les difficultés budgétaires du ministère ne sont pas un secret. En septembre dernier, Alain Seban avait déjà laissé entendre qu'il devrait peut-être "sacrifier des expositions" en 2013. Le président du centre Pompidou n'a pas évoqué les collectivités hôtes, qui financent environ le tiers de l'opération, plus des frais annexes (aménagement du terrain, énergie, sécurité externe...). Mais ce coût ne semble pas avoir dissuadé les candidatures.
Mobilité versus annexes
Au-delà du contexte budgétaire, l'arrêt du centre Pompidou mobile pose aussi la question de la nature de l'opération. Celle-ci a certes ouvert la fréquentation des musées à un nouveau public : 18% des visiteurs n'étaient encore jamais allés dans un musée, alors que cette proportion n'est que de 2% parmi les visiteurs de Beaubourg. Même si son président estime que "cela a été un très grand succès", la fréquentation - 200.000 visiteurs sur cinq sites et près de deux ans (avec des interruptions entre les expositions) - apparaît toutefois relativement modeste. Du moins au regard d'une autre forme de décentralisation culturelle : celle des "annexes" des grands musées parisiens.
Le centre a d'ailleurs été le premier à en bénéficier avec le succès foudroyant de Pompidou-Metz, suivi de celui, plus récent, du Louvre-Lens (voir nos articles ci-contre), sans oublier la probable réussite du MuCEM. Il est vrai toutefois que les budgets - conséquents -, les contenus et la zone de chalandise - à dimension internationale - de ces "annexes" n'ont pas grand chose à voir avec les 2,5 millions d'euros du budget annuel du centre Pompidou mobile. D'autres "annexes" - comme Versailles-Arras ou l'IMA-Tourcoing - connaissent cependant des débuts nettement plus modestes (voir nos articles ci-contre). A l'inverse, d'autres projections de grands musées - comme les Ateliers nomades du Quai Branly, actuellement à Cergy-Pontoise jusqu'au 2 juin - semblent avoir trouvé leur rythme, même si elles ne sont pas à l'abri des contraintes budgétaires. Seule certitude : avec la crise économique et les restrictions budgétaires, c'est tout le modèle de l'économie des musées qui va devoir se réinventer.