Culture - Langues régionales : aux collectivités de jouer
A l'occasion de la séance de questions orales du 25 février 2010, Robert Lecou, député de l'Hérault, a interrogé le ministre de la Culture et de la Communication sur le statut juridique des langues régionales. L'article 75-1 de la Constitution - introduit lors de la réforme constitutionnelle de juillet 2008 (voir notre article ci-contre du 22 juillet 2008) - mentionne en effet que "les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France". Mais le député de l'Hérault considère que cette affirmation ne constitue pas à proprement parler un cadre juridique. Le gouvernement avait en effet envisagé, au début de l'année 2008, de déposer un projet de loi relatif aux langues régionales, finalement écarté à l'issue de diverses péripéties (voir nos articles ci-contre).
Dans sa réponse - lue en son absence par Fadela Amara, la secrétaire d'Etat chargée de la politique de la ville -, le ministre de la Culture laisse clairement entendre que l'inscription dans la Constitution vaut pour solde de tout compte. Le gouvernement a certes bien eu, en 2008, l'intention de déposer un projet de loi afin "d'une part, de donner une forme institutionnelle au patrimoine linguistique de la nation et, d'autre part, de rassembler dans un même texte des dispositions législatives et réglementaires existantes, mais que leur dispersion rendait difficilement accessibles à nos concitoyens". Mais l'article 75-1 est venu répondre au premier de ces objectifs. Pour le ministre de la Culture, il est désormais "possible de permettre aux langues régionales de progresser dans notre pays, sans avoir nécessairement à légiférer". Rappelant que, dans sa décision de 1999 censurant la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, le Conseil constitutionnel avait considéré que la plupart des engagements envisagés figuraient déjà dans la Constitution et dans le cadre législatif, le ministre de la Culture juge que "des marges de manoeuvre existent, à périmètre législatif constant". Mais il rappelle aussi que l'article 75-1 figure dans le titre XII de la Constitution, consacré aux collectivités territoriales. Aussi estime-t-il que ces marges de manoeuvre législatives "seront exploitées [...] si les collectivités locales, aux côtés de l'Etat, assument pleinement leur responsabilité en la matière". Les langues régionales sont en effet, "par définition, un domaine de responsabilité partagée dans lequel l'Etat consent déjà un effort important, notamment en termes financiers". Traduction : sachant "qu'en dernière instance la vitalité d'une langue dépend de la volonté des citoyens d'en faire usage et d'en assurer la transmission", il appartient aux collectivités, et tout particulièrement aux régions, de prendre le relais de l'Etat pour promouvoir l'apprentissage et l'utilisation des langues régionales, "dans un esprit de dialogue entre les différents acteurs".
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : Assemblée nationale, séance de questions orales sans débat du 25 février 2009, question de Robert Lecou, député de l'Hérault, et réponse du ministre de la Culture et de la communication.