Logement - L'Anah a rempli ses objectifs 2015
3,5 millions de personnes ont parfois froid dans leur logement pour des raisons liés à la précarité énergétique, c'est-à-dire pour cause de logement mal isolé, de logement mal chauffé ou de privations financières, selon l'édition 2016 de l'état du mal-logement en France présenté le 28 juillet par la fondation Abbé-Pierre. Elle mentionne également les 2 millions de personnes qui vivent encore dans un logement "sans confort", c'est à dire sans eau courante, ou sans douche, ou sans WC intérieur, ou sans coin cuisine, ou sans chauffage, ou dont la façade est très dégradée. En revanche, le nombre de personnes vivant dans des logements privés d'eau courante, de douche et de WC intérieurs a baissé de 41% en 7 ans ; ces logements hors normes ne concernent plus désormais que 0,7% du parc total (205.000 logements).
Cette année encore, la fondation Abbé-Pierre demande aux pouvoirs publics de "consacrer des moyens financiers et humains supplémentaires" à l'Anah. Ce n'est pas, pour l'heure, à l'ordre du jour.
Lors de ses vœux à la presse, le 26 janvier, Nathalie Appéré, présidente de l'Anah, a déjà exprimé sa satisfaction de bénéficier d'un budget 2016 "maintenu" par rapport à l'année précédente. Et ce n'est pas rien, dans un "contexte de raréfaction des ressources publiques". Selon elle, il faut aussi se faire à l'idée que "toutes les réponses ne viendront pas de l'argent public", même s'il peut y contribuer fortement via le fameux "effet levier".
L'agence est au rendez-vous des objectifs de son COP
Quant à l'activité 2015 de l'agence, "les résultats obtenus, tout au long de cette année, ont été remarquables", estime la présidente. "Avec plus de 77.000 logements rénovés pour un budget d'intervention de 675,5 millions d'euros, l'agence est au rendez-vous des objectifs de son contrat d'objectifs et de performance", ajoute-t-elle en référence au COP 2015-2017 signé en juillet dernier avec l'Etat (voir notre article ci-contre du 3 juillet 2015). A noter que sur les 675,5 millions d'aides accordées par l'Anah en 2015, 140,2 millions d'euros viennent du fonds d'aide à la rénovation thermique (Fart) créé par l'Etat qui en a confié la gestion à l'Anah. "Cette capacité d'intervention pour l'amélioration du parc privé de logements a permis d'engager un volume de travaux de 1,350 milliard d'euros, soit l'équivalent de 27.000 emplois créés ou préservés", aime rappeler Nathalie Appéré.
Conformément à la vocation de l'agence, la majeure partie des logements rénovés l'ont été dans le cadre d'aides directes aux propriétaires (63.037 logements). Par ailleurs, 14.444 logements ont été rénovés au travers de 380 syndicats de copropriétaires et seulement 140 logements dans le cadre d'aides dédiées aux communes (travaux d'office).
En toute logique, la majeure partie des aides (609 millions d'euros) sont allées aux propriétaires, 47,5 millions d'euros à l'ingénierie (études, suivi-animation), 11,2 millions d'euros à des opérations de résorption de l'habitat insalubre (RHI, contre 5 millions d'euros en 2014) et 7,7 millions d'euros à "l'humanisation" de 16 centres accueillant des personnes sans abri.
Concernant la répartition territoriale des aides, 30.850 logements rénovés l'ont été en territoire "essentiellement rural" (pour un montant d'aides de 205.9 millions d'euros), 29.598 en territoire "essentiellement urbain" (159,2 millions d'euros), et 17.173 en territoire "intermédiaire" (119,5 millions d'euros). L'Ile-de-France est la première région aidée (74,15 millions d'euros d'aides, 15.078 logements rénovés), suivie de Rhône-Alpes (56,18 millions d'euros, 5.955 logements), Nord-Pas-de-Calais (43 millions d'euros, 3.547 logements), Midi-Pyrénées (42,75 millions d'euros, 4.475 logements), Pays-de—la-Loire (42,57 millions d'euros, 5.378 logements), Bretagne (41,01 millions d'euros, 5.296 logements)...
50.000 logements rénovés via "Habiter mieux" en 2015, idem en 2016
La lutte contre la précarité énergétique a représenté près de 85 % des aides aux travaux accordés par l'Anah en 2015. Le programme "Habiter mieux" a ainsi distribué 392,4 millions d'euros d'aides de l'Anah auxquelles se sont ajoutés 124,5 millions d'euros de primes Fart, soit un total de près de 517 millions d'euros.
Pour la deuxième année consécutive, près de 50.000 logements – 49.706 exactement - ont été rénovés dans le cadre de ce programme, dont 43.710 étaient des logements occupés par leur propriétaire (les aides aux propriétaires bailleurs ont concernés 3.791 logements et ceux aux syndicats de copropriétaires 2.205 logements). L'aide moyenne accordée à un logement est plus élevée quand il s'agit d'un propriétaire bailleur (17.824 euros), que d'un syndicat de copropriétaires (10.692 euros) ou d'un propriétaire occupant (9.742 euros). "90% des aides à la rénovation énergétique ont été attribuées aux ménages très modestes", insiste par ailleurs l'Anah. Selon Blanche Guillemot, directrice générale de l'Anah, les travaux réalisés sont de plus en plus "ambitieux et complexes". Ils permettent en moyenne des gains énergétiques de 40%, là où l'exigence minimale du programme est de 25%.
A noter que 43% des 9.573 logements aidés au titre de la lutte contre l'habitat indigne et très dégradé ont bénéficié de la prime "Habiter mieux". Elle a également bénéficié à 8% des 15.753 logements rénovés en vue de les adapter à la perte d'autonomie de leurs occupants âgés et/ou handicapés (soit 1.298 logements).
Depuis le début du programme, déployé à partir de l'année 2011, plus de 150.000 ménages ont ainsi bénéficié de ces aides à la rénovation. Le mouvement devrait se poursuivre dans la "constance" avec l'ambition d'en rénover encore 50.000 en 2016.
Au cours de cette année, l'Anah engagera également un travail prospectif pour proposer l'extension du programme "Habiter mieux" à l'habitat collectif, dans le cadre de sa mission de prévention dans les copropriétés fragiles.
Copropriétés en difficulté : "Nous nous apprêtons à renforcer encore nos interventions"
Le nombre de logements aidés dans le cadre du redressement de copropriétés en difficulté a augmenté de 28 % entre 2014 (13.258 logements) et 2015 (17.027 logements). Les aides accordées en 2015 se sont élevées à 58,1 millions d'euros, dont 46,44 millions d'euros pour les syndicats de copropriétaires (qui ont concerné 14.444 logements) et 11,7 millions d'euros d'aides individuelles (2.583 logements). "Nous nous apprêtons à renforcer encore nos interventions par la mise en œuvre du plan triennal de mobilisation pour les copropriétés fragiles et en difficulté", a indiqué Nathalie Appéré, rappelant que, en novembre dernier, son conseil d'administration avait adopté la généralisation du dispositif de veille et d'observation des copropriétés (VOC) et du programme opérationnel de prévention et d'accompagnement en copropriété (Popac). "Nous avons été convaincus par les résultats très positifs obtenus par les collectivités qui ont expérimenté ces dispositifs", a insisté la présidente de l'Anah.
Elle a également rappelé l'implication de l'Agence dans la création d'opérations d'intérêt national de requalification de copropriétés dégradées (Orcod).
Concernant les collaborations de l'Anah avec les élus locaux, sa présidente, également maire de Rennes, les envisagent dans un "esprit d'écoute, d'expertise, d'innovation, d'anticipation".
Elle a ainsi évoqué le programme de revitalisation des centres-bourgs, rappelant que l'Anah accompagne, aux côtés du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), 54 projets retenus lors de l'appel à projet de novembre 2014 (voir notre article ci-contre du 26 novembre 2014). "Après une première phase de financement et d'ingénierie, à l'aide du fonds national d'aménagement et de développement du territoire, nous passerons, en 2016, à la contractualisation", a-t-elle annoncé.
Elle a également fait référence à la convention signée avec l'Anru en mai dernier (voir notre article ci-contre du 5 mai 2015) dans le cadre du nouveau programme de renouvellement urbain.
80 quartiers nécessiteront une action conjointe des deux agences, principalement pour traiter des copropriétés en difficulté situées dans des grands ensembles, et endiguer des problématiques d'habitat indigne et dégradé dans des quartiers anciens, notamment grâce aux opérations de RHI.
Valérie Liquet