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Habitat - La TVA à 5,5%, c'est aussi pour le logement

La Commission européenne a présenté, le 7 juillet, une proposition de modification de la directive 2006/112/CE (couramment appelée la sixième directive). L'objectif de cette révision est de donner aux Etats membres la possibilité d'appliquer de façon permanente à certains services des taux réduits de TVA. L'attention s'est bien sûr focalisée sur la restauration, pour laquelle la France réclame depuis plusieurs années une TVA à 5,5%. Mais d'autres secteurs sont également concernés, à commencer par le logement. Il est déjà possible d'appliquer une TVA réduite dans ce secteur, mais elle est limitée à certaines opérations ou secteurs bien délimités, comme le logement social. Si la proposition de la Commission est retenue, cette possibilité pourrait non seulement déborder le seul champ du logement social, mais s'étendre aussi à des activités comme les services de rénovation, d'entretien ou de nettoyage. Sans se prononcer encore à ce stade, la Commission étudie par ailleurs - conformément à la demande formulée par le Conseil européen de mars 2008 - la possibilité d'appliquer aussi des taux réduits aux matériaux permettant d'économiser l'énergie ou aux biens et services à haut rendement énergétique. Une telle extension concernerait au premier chef le domaine du logement.
Pour déterminer les secteurs éligibles, la Commission propose de retenir le double critère de la "forte intensité de main-d'oeuvre" et du "risque négligeable de perturbation du marché intérieur". Outre la restauration et le logement, la proposition de la Commission vise notamment les petites réparations de biens meubles corporels, le nettoyage et l'entretien de ces biens, les services de soins à domicile, tous les soins personnels (y compris la coiffure et les soins esthétiques), le jardinage, la rénovation et l'entretien des lieux de culte, du patrimoine culturel et des monuments historiques. En même temps que ces extensions, la Commission préconise de prolonger jusqu'à la fin de 2010 la plupart des dérogations actuelles qui arrivent bientôt à expiration.
Cette proposition marque une nette évolution dans la position de la Commission, même si celle-ci prend bien soin de la minimiser en évoquant dans son communiqué la "portée limitée" des mesures envisagées. La Commission rappelle notamment qu'"en l'absence d'une position claire du Conseil sur la communication présentée par la Commission en juillet dernier en ce qui concerne la révision intégrale du système de taux réduits, la proposition actuelle vise uniquement à régler des questions nécessitant une action immédiate, tout en donnant les mêmes possibilités à l'ensemble des Etats membres".
Par ailleurs, il ne s'agit que d'une proposition, qui pourrait bien se heurter à un double obstacle. Le premier réside dans la réticence de certains Etats, dont l'Allemagne et le Danemark, face à cette politique d'extension des taux réduits. Le second tient, dans l'hypothèse d'une adoption de la directive, à la capacité des Etats à se passer des recettes fiscales correspondantes, en contrepartie d'effets sur l'emploi qui restent largement à démontrer. Dans le cas de la France, régulièrement rappelée à l'ordre par Bruxelles sur la nécessité d'un retour aux critères de Maastricht, les marges de manoeuvre risquent d'être très limitées et imposeront à coup sûr des choix drastiques. Dans la course aux taux réduits de TVA, il devrait donc y avoir beaucoup plus d'appelés que d'élus.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence: Commission des communautés européennes, proposition de directive modifiant la directive 2006/1112/CE en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée.