Municipales - La sécurité n'est plus un thème central pour les candidats
La sécurité serait-elle passée de mode ? Alors qu'en 2001, elle constituait une question centrale des élections municipales, elle semble cette année nettement plus en retrait. Un sondage CSA de novembre 2007 montre d'ailleurs qu'elle a été reléguée au neuvième rang des préoccupations des Français, loin derrière le pouvoir d'achat (48%), la santé (39%), la retraite (37%) ou encore l'emploi (32%). Ce silence apparent des candidats est d'autant plus surprenant que la loi de prévention de la délinquance du 5 mars 2007, en confiant au maire un rôle "pivot" en matière de prévention de la délinquance, avait suscité tant de remous l'an dernier. En inaugurant le 11 février un commissariat à Argenteuil (lieu symbolique où Nicolas Sarkozy s'en était pris à la "racaille" en octobre 2005), le Premier ministre, François Fillon, a pourtant tenté de relancer ce thème porteur pour l'électorat de la majorité. "Le problème de l'insécurité n'a pas disparu. Mais à l'évidence le temps n'est plus au laxisme ni à l'impunité et les Français l'ont senti", a-t-il déclaré à cette occasion. De fait, la délinquance a baissé depuis 2002. Lors de la présentation de son bilan 2007, la ministre de l'Intérieur, Michèle Alliot-Marie, a annoncé une baisse de 13,5% entre 2002 et 2007 et une baisse de 33,7% pour la délinquance de voie publique pour la même période. Dire pour autant que les problèmes ont disparu serait aller un peu vite en besogne et oublier les émeutes de novembre 2005 ou celles de Villiers-le-Bel de novembre dernier.
Propositions plus raisonnées
Mais la sécurité est de moins en moins l'objet d'un affrontement idéologique gauche-droite. "Si ce n'est plus un enjeu électoraliste, on notera qu'elle figure néanmoins dans de nombreux programmes de campagne aussi bien à droite qu'à gauche", constate la FA-FTP (Fédération autonome de la fonction publique territoriale) dans une note sur "la place de la sécurité dans les programmes des candidats". "Cette attente des Français est abordée avec beaucoup plus de recul et les propositions semblent plus raisonnées et en adéquation avec les problématiques de terrain", estime Jean-Michel Weiss, secrétaire national de la FA-FPT chargé de la police municipale.
Le syndicat relève ainsi que de nombreux candidats, toutes tendances confondues, proposent dans leur projet la création de services de police municipale. C'est par exemple le cas au Mans, à Nanterre, Orly, Saint-Nazaire ou Lens. A Paris, l'idée vient de la candidate UMP qui souhaite une police "non armée", ce qui impliquerait de changer les compétences du maire qui ne détient pas de pouvoirs de police, selon Jean-Michel Weiss. Ailleurs, on souhaite un renforcement en moyens et en effectifs, comme à Nice, Clermont-Ferrand, Toulouse, Rennes, Marseille, Lille ou Lyon.
600 réseaux de vidéosurveillance
Même constat sur la vidéosurveillance. Autrefois objet de vives critiques d'associations de défense des libertés individuelles, agitant le spectre de "Big Brother", l'idée s'impose peu à peu, même si les spécialistes s'accordent pour dire qu'il n'existe aucune étude sérieuse en France sur son efficacité réelle. Aujourd'hui, on lui préfère d'ailleurs le terme de "vidéoprotection", sans doute plus rassurant. On compte déjà environ 600 réseaux municipaux en France et l'engouement des élus ne faiblit pas. Ainsi, le maire sortant de Gonesse (divers gauche) souhaite "moderniser la vidéosurveillance et la télésurveillance et renforcer avec les bailleurs la sécurisation des halls d'immeuble". A Aubervilliers, la candidate UMP propose de généraliser l'installation de la "vidéo-tranquillité". Preuve que les barrières idéologiques sont tombées : des candidats communistes, comme le maire sortant d'Echirolles (Isère), s'y sont ralliés. C'est plutôt sur la question du financement que tournent les débats. A ce titre, la loi de prévention de la délinquance du 5 mars 2007 a créé de nouvelles possibilités de financement avec l'instauration d'un fonds interministériel de prévention de la délinquance et la possibilité de mutualiser les coûts par l'intercommunalité. Curieusement, l'un des arguments des détracteurs de cette loi, l'an dernier, était de dire qu'elle risquait de donner lieu à une surenchère sur la sécurité au moment des élections.
Michel Tendil