Social - La fin de l'abondance pour la CNSA
Le conseil d'administration de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), qui se réunit ce 31 mars, devrait marquer un tournant dans l'histoire de cette institution. Pour la première fois, la CNSA devrait en effet enregistrer un recul de ses recettes, du moins par rapport aux prévisions.
Le 14 octobre dernier, le conseil d'administration de la CNSA avait en effet adopté un budget prévisionnel pour 2009 en progression de 7,56%, à 18,33 milliards d'euros (voir notre article ci-contre du 15 octobre 2008). Mais - crise oblige - les recettes 2009 ne seront pas à la hauteur de ces prévisions. C'est le cas en particulier des recettes propres de la Caisse, qui devraient être inférieures au montant inscrit au budget initial d'environ 5%. Il devrait notamment manquer 150 millions d'euros, correspondant à un moindre rendement de la contribution de solidarité pour l'autonomie (instituée après la canicule de 2003) et de la contribution sociale généralisée (dont une partie est affectée à la CNSA). Si l'on y ajoute des revenus de placements laminées par la crise financière, environ 180 millions d'euros devraient ainsi manquer à l'appel. Au final, le déficit prévisionnel recalculé de la CNSA devrait s'élever à 823 millions d'euros - en hausse de 285 millions d'euros - obligeant la Caisse à puiser dans des réserves certes conséquentes (environ un milliard d'euros) mais qui vont s'amoindrir rapidement.
Cette fin de l'abondance ne concerne évidemment pas la seule CNSA. Elle aura en effet une conséquence immédiate et très concrète pour les départements. La plus douloureuse concerne le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). La contribution de la Caisse au financement de cette prestation versée par les départements devrait atteindre cette année 1,56 milliard d'euros, soit près de 70 millions d'euros de moins que le montant prévu. La part à la charge des départements représenterait ainsi 69,5% de la dépense totale, au lieu de 68% en 2008. Pour mémoire, la part des départements dans le financement était de 57% en 2002, année de mise en place de l'APA. La situation est identique pour la prestation de compensation du handicap (PCH), pour laquelle il devrait manquer à la CNSA 47 millions d'euros par rapport à la dotation inscrite dans le budget prévisionnel. Le contexte est toutefois différent, dans la mesure où - depuis la mise en place de la PCH en 2006 - les départements ont largement tiré profit des excédents de versement de la CNSA, dus à une montée en charge de la prestation beaucoup plus lente qu'envisagée initialement.
Conséquence de cette situation : le climat devient beaucoup plus tendu autour de la table du conseil d'administration. Bernard Cazeaux, représentant de l'ADF et président du conseil général de la Dordogne, demande que la CNSA fasse appel à d'autres fonds pour compenser la moins-value de recettes. A l'extérieur de la Caisse, Marie-Françoise Perol-Dumont, députée et présidente du conseil général de la Haute-Vienne, estime que "cette défaillance aura des conséquences importantes sur le financement de l'APA" et qu'"il devient indispensable de repenser un système qui a atteint ses limites". Ces difficultés financières devraient également relancer les remous qui - dans un contexte pourtant plus favorable - avaient entouré l'adoption du budget prévisionnel en octobre dernier. Plusieurs membres du conseil d'administration - dont l'un des deux représentants de l'ADF - avaient alors refusé de prendre part au vote sur la section relative au financement des établissements ou services sociaux et médico-sociaux et sur celle relative aux autres dépenses en faveur des personnes en perte d'autonomie (à ne pas confondre avec le financement de l'APA et de la PCH). Ils entendaient alors protester contre l'utilisation par l'Etat d'une partie des réserves de la CNSA, afin de financer l'investissement des établissements sociaux et médico-sociaux. Ces remous devraient d'autant plus resurgir que le conseil d'administration du 31 mars doit se prononcer sur un prélèvement identique de 70 millions d'euros au titre du plan de relance dans le secteur médico-social.
Jean-Noël Escudié / PCA