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Action sociale - La Cour des comptes sévère sur l'action sociale de la branche Famille en faveur de la jeunesse

La Cour des comptes a rendu public, le 6 juin, un référé sur l'action sociale de la branche Famille à destination de la jeunesse. Cet intitulé englobe des dépenses très diverses, comme les actions en faveur du temps libre (accueil de loisirs, vacances, projets adolescents), les actions d'animation sociale (centres sociaux, foyers de jeunes travailleurs, animation sociale), le soutien à la parentalité... Le référé a en réalité été adressé aux ministres concernés en mars 2013, alors que l'Etat et la Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) négociaient la nouvelle convention d'objectifs et de gestion (COG) 2013-2016, qui devrait - enfin - être prochainement signée.

Une politique "peu lisible et peu redistributive"

Le jugement est sévère, même si le côté très cursif de l'exercice du référé (six pages en l'occurrence) ne se prête guère à la nuance. Pour la Cour des comptes en effet, la politique d'action sociale de la branche Famille en faveur de la jeunesse, "pourtant dotée de moyens financiers significatifs et en forte augmentation, est peu lisible et peu redistributive".
Ces dépenses ont atteint 1,4 milliard d'euros en 2011, sur un total de 4,5 milliards de dépenses d'action sociale de la branche Famille. Même si leur part est restée, depuis 2001, à peu près stable au sein des dépenses d'action sociale de la branche (environ 30%), elles ont fortement progressé sur la période (+71% en euros constants). En comparaison, la dépense pour la Paje (prestation d'accueil du jeune enfant) a augmenté de 45,3% sur la même période. Mais le référé conteste surtout la redistributivité insuffisante de ces aides. La Cour estime, par exemple, que les analyses des actions d'accueil-loisirs entre 2006 et 2011 (près de 80% du total de l'enveloppe) "mettent en lumière des dépenses moyennes par jeune très variables selon les départements et peu corrélées avec la pauvreté de cette classe d'âge". La dépense par jeune va ainsi de 79 euros en Lozère à 496 euros en Haute-Garonne (pour une dépense médiane de 201 euros). Même si une approche par décile aurait sans doute été plus pertinente, il n'en reste pas moins que les écarts sont conséquents.

Une politique à repenser

En outre, ces écarts se sont accrus depuis 2006. Les tableaux publiés dans le référé montrent toutefois qu'ils ne semblent pas obéir à une logique sociodémographique très évidente : les dix départements les mieux dotés comptent ainsi la Haute-Garonne et le Haut-Rhin, mais aussi l'Ariège, la Nièvre ou le Gers ; à l'inverse, les dix départements les moins dotés comptent certes la Lozère et la Corrèze, mais aussi les Hauts-de-Seine, l'Essonne ou la Haute-Savoie. La Cour relève d'ailleurs une absence de corrélation entre le volume des aides et le niveau de pauvreté du département bénéficiaire. Ceci tient notamment au manque de sélectivité des aides. Selon le référé, sur les 108.000 aides aux vacances accordées en 2011 (relevant de cinq dispositifs différents), seules 3.900 aides aux vacances sociales ont visé expressément les populations les plus fragiles. En outre, l'enquête "aides aux vacances familiales" de la Cnaf montre qu'une forte majorité de familles disposant de faibles revenus n'utilise pas ce dispositif.
La Cour des comptes estime donc que les objectifs fixés dans la précédente COG en matière d'actions dédiées à la jeunesse n'ont pas été atteints, même si "faute de priorités claires assorties d'indicateurs de résultats, le dispositif se révèle difficilement évaluable". Pour expliquer ce résultat, le référé pointe notamment la logique de reconduction ou de guichet, le manque d'indicateurs (en particularité en termes de rattrapage des inégalités territoriales et de prise en compte des situations de pauvreté), mais aussi la focalisation des tutelles sur le seul suivi financier global de la dépense d'action sociale. La Cour demande donc de repenser le pilotage de cette politique, de fixer des priorités précises et des objectifs moins nombreux, mais concentrés sur les territoires les plus défavorisés et les populations les plus fragiles. "A défaut d'une telle refondation, la question ne manquerait pas de se poser, à terme rapproché, du retrait de la branche Famille du financement même de ce type d'actions." Les ministres concernés et la Cnaf ont maintenant deux mois pour faire connaître les suites données à ce référé.  

 

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