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Plan de relance - La Cour des comptes juge sévèrement les mesures de soutien à l'investissement public local

Le remboursement anticipé au titre du Fonds de compensation de la TVA (FCTVA), décidé en décembre 2008 dans le cadre du plan de relance, a finalement constitué un "avantage de trésorerie" sans véritable effet sur l’investissement des collectivités, conclut la Cour des comptes dans un rapport sur le plan de relance remis le 14 septembre, à la commission des finances de l’Assemblée nationale.
D’un coût de 3,85 milliards d’euros pour le budget de l’Etat (contre 2,5 milliards initialement prévus), la mesure a permis aux collectivités de "moins recourir à l’emprunt", mais sans stimuler leurs investissements, qui "ont stagné" en 2009 par rapport à 2008. En échange du versement de deux années de FCTVA (2007 et 2008), les collectivités devaient s’engager par convention à investir davantage qu’elles ne l’avaient fait sur la période allant de 2004 à 2007. "De nombreux organismes se sont contentés de respecter cet objectif conventionnel a minima, tout en diminuant leurs dépenses par rapport à 2008 et même en révisant à la baisse leur propre programme prévisionnel d’investissement", observe la Cour. Aucune des préfectures qu’elle a interrogées "n’a pu citer d’exemples significatifs" d’organismes qui "auraient modifié leur programme d’investissements au regard de ce qu’ils avaient envisagé". Sans un aménagement législatif intervenu en loi de finances pour 2010, de nombreuses collectivités auraient même échoué à remplir leur objectif en matière d’investissement.

 

19 540 conventions signées

"Le remboursement anticipé de FCTVA pouvait surtout conduire à la seule accélération de projets en cours, nécessitant un besoin de trésorerie complémentaire limité", soulignent les juges de la rue Cambon, qui notent qu’aucune étude d’impact n’a été réalisée avant l’annonce du dispositif. Si, finalement, de nouveaux projets n’ont pas été engagés, c’est notamment, expliquent-ils, parce que les incertitudes sur les finances locales, accrues par l’annonce de la réforme de la taxe professionnelle, ont pesé. La Cour décèle aussi une certaine "contradiction" entre la décision d’appeler les collectivités à investir davantage, tout en plaçant le FCTVA (hormis le remboursement anticipé) dans l’enveloppe normée des dotations soumises à la règle d’évolution en fonction de l’inflation.
Sur le plan strictement numérique, la mesure est tout de même "un grand succès", avec 19.540 conventions signées - notamment par 23 régions, 90 départements et 17.183 communes. Ce succès pose néanmoins à l’évidence un problème. Une très grande majorité de ces collectivités bénéficiera de manière pérenne du versement de FCTVA avec une seule année d’écart par rapport à l’année où les investissements ont été engagés. Or, d’autres continueront à percevoir leur versement avec deux années d’écart, tandis que certaines intercommunalités l’obtiennent sans délai. Pour la Cour, la coexistence de ces divers régimes de FCTVA pourrait engendrer un coût administratif non-négligeable. Elle préconise, par conséquent, la généralisation "à terme" du versement du FCTVA à toutes les collectivités avec un an de décalage seulement.
Globalement, la Cour estime dans le rapport que le plan de relance a coûté bien plus aux finances publiques qu'il n'a rapporté en termes de croissance. Le 17 septembre à Matignon, le Premier ministre a répondu à ces critiques devant des chefs d’entreprise, notamment en estimant "dommage" que l’effet du plan de relance sur 2010 n’ait pas été pris en compte.

Thomas Beurey / Projets publics

 

Bilan très mitigé pour les aides à l'emploi, des retards pour le logement

La Cour des comptes estime que le plan de relance a permis de créer entre 18.000 et 72.000 emplois, quand le gouvernement tablait sur 100.000 emplois créés en 2009. Elle impute ces résultats à un démarrage très lent des mesures d'aide à l'emploi. A commencer par l'aide à l'embauche dans les TPE (le "zéro charge") : fin décembre 2009, à peine 54% des crédits du plan avaient été consommés dans ce domaine. Destinée à bénéficier à 3 millions d'employeurs, seulement 670.000 en ont fait la demande en 2009. Toutefois, la mesure est montée progressivement en charge : un million de demandes ont été enregistrées au printemps 2010. L'accélération observée dès la fin de l'année 2009 avait conduit le gouvernement à décider de proroger le dispositif de six mois, jusqu'au 30 juin 2010.
S'agissant des mesures gérées par Pôle emploi, là encore, le démarrage a été plutôt lent. Des lenteurs qui s'expliquent par la nature même des dispositifs. Ainsi, ceux qui nécessitaient la signature d'un contrat de travail "n'ont connu qu'un très faible succès". C'est le cas pour l'embauche d'un apprenti ou les contrats de professionnalisation. A l'inverse, ceux qui reposaient sur une logique de "guichet ouvert" et une aide directe aux salariés (prime exceptionnelle, allocation équivalent retraite, convention de reclassement personnalisé 'CRP') ont bien fonctionné, estime la Cour.
Enfin, sur le front du logement, le plan de relance devait permettre de soutenir la construction de logements sociaux et l'accession sociale (PTZ), d'accélérer la rénovation urbaine (Anru), de lutter contre l'habitat indigne (Anah), et d'augmenter les crédits disponibles pour les structures d'hébergement. Sur tous ces terrains d'intervention, la Cour constate des retards par rapport au rythme prévu initialement de consommation des crédits. Ainsi, pour le logement social, et alors que les fonds ont été flêchés sur des opérations anciennes en raison des délais de montage de ce type de programme, seuls 25% des crédits ont été consommés en 2009. L'essentiel des enveloppes devrait donc être consommé en 2010 (rapport, p.9-10). Cependant, en dépit de ces retards de consommation, la Cour attend un effet important de ces enveloppes (rapport, p.51). Saluant la "contribution majeure" de la Caisse des Dépôts sur ce volet notamment, la Cour estime que les 100.000 logements locatifs (sociaux ou intermédiaires) supplémentaires programmés sur 2009-2010 devraient "prolonger la croissance constatée depuis 2006 avec le plan de cohésion sociale et le Programme national de renouvellement urbain".