Habitat - La Cour des comptes dénonce le manque de lisibilité des aides fiscales au logement
En refusant de certifier les comptes 2011 de la Caisse nationale d'allocations familiales et de la branche famille, la Cour des comptes avait déjà pointé un contrôle insuffisant sur les aides personnelles au logement, prestations qui génèrent le plus grand nombre d'indus après le revenu de solidarité activité (voir notre article ci-contre du 28 juin 2012). Dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques en 2012, présenté le 2 juillet dernier, elle se montre critique sur un autre volet de la politique en faveur du logement. La Cour illustre en effet la nécessité de renforcer sensiblement l'évaluation des politiques publiques par un exemple : celui des dépenses fiscales en faveur du logement.
Plus du double des crédits budgétaires
Le rapport relève ainsi que ces dépenses ont augmenté de 49% entre 2007 et 2011 et "représentent désormais, avec 13 milliards d'euros, plus du double des crédits budgétaires". Il estime également que la croissance du nombre de dispositifs - au nombre de 49 en 2011 - "a accentué les imperfections du système", malgré quelques corrections récentes. Dans le même temps, les dépenses budgétaires n'ont pas diminué (+8% entre 2007 et 2011 à périmètre constant), même si elles affichent une "forte baisse apparente" de 43%, résultant pour partie du transfert sur le 1% logement du financement de la rénovation de l'habitat privé ancien. De ce fait, les aides budgétaires se sont fortement concentrées sur le logement social.
La Cour pointe notamment deux imperfections majeures du dispositif : le manque de transparence de ces aides fiscales et les incertitudes sur leur impact effectif sur l'offre de logement. A propos de la plus coûteuse de ces dépenses fiscales - la TVA à taux réduit en faveur les travaux effectués sur des logements de plus de deux ans (5,2 milliards d'euros en 2011) - le rapport constate que "son coût reste incertain et [que le dispositif] n'a pas fait l'objet d'une réelle évaluation depuis 2002".
Aucune information sur l'impact réel du Scellier
Il en est de même pour le soutien à l'investissement locatif privé "progressivement appelé à disparaître" (dispositif Scellier, qui a coûté 1,1 milliard d'euros en 2011). Dans son rapport public annuel 2012 (voir notre article ci-contre du 8 février 2012), la Cour constatait en effet qu'il n'existe "aucune information, au plan national, sur le volume et la localisation des réalisations correspondant à des investissements locatifs privés financés grâce à des dépenses fiscales, ni a fortiori sur leur occupation et les loyers pratiqués". Ceci est d'autant plus dommageable que les aides à l'investissement "renforcent la tension sur le foncier".
Le troisième exemple est déjà bien connu, puisqu'il concerne les plans et comptes d'épargne logement. Ceux-ci représentent en effet une dépense budgétaire de 1,1 milliard d'euros et une dépense fiscale de 500 millions, "alors que le taux de transformation des dépôts en prêts est inférieur à 5%". Dans ces conditions, la Cour estime que "l'incitation fiscale ne peut guère être justifiée par l'objectif initial d'aide à l'accession à la propriété".
Le rapport pointe enfin un autre cas de cumul d'aide budgétaire et d'aide fiscale. Il s'agit en l'occurrence de la combinaison entre l'allocation logement pour les étudiants et la demi-part de quotient familial complémentaire pour les parents. La Cour rappelle ainsi qu'environ 700.000 étudiants bénéficient d'aides au logement, pour un coût budgétaire de 1,2 milliard d'euros. Mais, dans le même temps, le rattachement de 80% d'entre eux au foyer fiscal de leurs parents entraîne un coût fiscal de 1,1 milliard.