Prévention de la délinquance - La commission des lois du Sénat approuve le projet de loi Sarkozy
Ce sera l'un des derniers grands projets gouvernementaux avant l'élection présidentielle. "Outil électoral" pour les uns, "texte sans tabou" pour les autres, le projet de loi de la prévention de la délinquance est l'objet de toutes les attentions depuis de nombreuses semaines. Annoncé depuis quatre ans, maintes fois repoussé puis relancé après les émeutes de novembre 2005, il arrive enfin en première séance publique, le 13 septembre au Sénat. Après avoir reçu les ministres de l'Intérieur, de la Justice, de la Santé, des Collectivités locales et de la Famille, le 5 septembre, la commission des lois du Sénat l'a approuvé en y apportant quelques modifications.
Jean-René Lecerf, le rapporteur du projet, juge "logique de donner au maire, au plus près des réalités du terrain, un rôle essentiel pour animer et coordonner la politique de prévention de la délinquance". A ce titre, il propose d'introduire plus de souplesse dans le fonctionnement des contrats locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD). Il note que "ces structures sont tributaires de la bonne volonté de leurs membres" et que "leur dynamisme est extrêmement inégal". Il a fait inscrire un amendement autorisant le maire, coordonateur des CLSPD, à se faire remplacer par un représentant.
Vers "une réforme" d'ampleur sur l'hospitalisation sous contrainte
Selon Jean-René Lecerf, alors que 874 CLSPD existent à ce jour, la disposition du projet prévoyant de les rendre obligatoires à toutes les villes de plus de 10.000 habitants ne devrait concerner que 350 communes. "Seuls les CLSPD dotés d'une formation restreinte, de groupes de travail ou d'une cellule de veille ont une réelle efficacité opérationnelle, soit environ un tiers de ces conseils", constate-t-il.
Le sénateur propose également un amendement visant à mieux coordonner le travail du maire de Paris avec celui du préfet de police pour l'animation du CLSPD de la capitale. "Du fait des spécificités de la répartition des pouvoirs de police entre le préfet de police et le maire de Paris, ces deux autorités animeraient et coordonneraient conjointement la politique de prévention de la délinquance, de la même façon qu'ils coprésideraient le CLSPD."
S'agissant de la possibilité pour le maire de pouvoir décider d'une hospitalisation d'office, la commission, après un "large échange de vues", a considéré que cette disposition se justifiait par des "considérations d'ordre public" et par le fait qu'elle ne porte "que sur des aspects de procédure". Lors de son audition du 5 septembre, le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, se serait engagé à entreprendre "une réforme d'ampleur" sur les autres volets de l'hospitalisation sous contrainte.
Des risques de confusion avec les départements
Le rapport s'intéresse au partage des rôles entre les villes et les départements. Le maire est amené à présider un "conseil des droits et de devoirs des familles". A ce titre, il pourra effectuer des rappels à l'ordre et demander la suspension des allocations familiales. Or, dans le même temps, les compétences du département en matière de prévention ont été renforcées par des lois récentes comme celle sur l'égalité des chances du 31 mars 2006 instituant le contrat de responsabilité parentale. Par ailleurs, le projet de loi sur la protection de l'enfance, en cours de navette entre le Sénat et l'Assemblée, réaménage l'ensemble des mesures de mise sous tutelle des prestations familiales et confirme la compétence du conseil général dans ce domaine. L'Assemblée des départements de France (ADF) a récemment dénoncé un risque de confusion entre les deux textes et demandé au gouvernement de "clarifier rapidement sa position". La commission abonde dans ce sens en exigeant le "renforcement de la cohérence du texte en prévoyant de coordonner le projet de loi avec celui réformant la protection de l'enfance". Il est à noter que la détection des enfants "prédisposés" a disparu de la dernière mouture, elle figure désormais dans le projet sur la protection de l'enfance.
Concernant le secret partagé, la commission des lois propose de donner la possibilité au maire de transmettre au président du conseil général les informations qui lui sont transmises.
La commission propose par ailleurs la création d'un "fonds interministériel pour la prévention de la délinquance" destiné à regrouper les financements adaptés.
Michel Tendil