Handicap et dépendance - La CNSA entend construire "un nouveau champ" de la protection sociale
La Cour des comptes l'avait déjà assuré juillet dernier : il n'y a pas d'effet vignette autour des crédits de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Autrement dit, ces ressources ont toutes été affectées aux actions en faveur des personnes âgées ou handicapées et ont bien permis une hausse de l'effort financier global destiné à ces publics. C'est cette fois au tour des représentants de la CNSA eux-mêmes, qui présentaient ce 14 novembre leur premier rapport annuel, de le faire valoir. Ce rapport souligne de même que la CNSA "intervient financièrement en plus de et non pas à la place de" et son directeur, Denis Piveteau, parle d'une "totale transparence sur les fonds employés".
Ces fonds, d'un total de presque 14 milliards d'euros pour 2006, ont pour origine non seulement la contribution solidarité pour l'autonomie (environ 2 milliards d'euros) mais aussi une part de CSG (1,3 milliard) et les 11 milliards de l'Ondam médico-social (Assurance maladie). Quant aux principaux postes de dépenses, ils se sont cette année principalement répartis entre, d'une part, les établissements et services médico-sociaux (12,8 milliards) et, d'autre part, les crédits distribués aux départements pour l'allocation personnalisée d'autonomie (1,45 milliard), la prestation de compensation du handicap et le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (570 millions). A cela s'ajoutent 1 million d'euros de crédits d'intervention (formations, études, soutien aux actions innovantes...) et 14 millions de frais de fonctionnements, pour un effectif de 80 personnes.
Une "agence" pour accompagner la réforme
Ce premier rapport annuel, qui a été approuvé à l'unanimité des 48 membres du conseil de la CNSA (représentants des associations, des organisations syndicales, des conseils généraux, du Parlement et de l'Etat), sera remis au Parlement et au gouvernement.
Au-delà de la fonction même de "caisse", Denis Piveteau a insisté mardi sur le rôle d'"agence" de la CNSA, que ce soit sur le front de la compensation individuelle ou sur celui des établissements et services. La CNSA est bien là pour "accompagner la réforme de la compensation individuelle des situations de handicap et de perte d'autonomie" et "garantir l'égalité de traitement" des personnes concernées. D'où, entre autres, d'importantes actions menées en 2006 en termes d'appui techniques aux équipes locales, de "mise en commun des pratiques" et de comparaison des résultats obtenus sur les différents territoires. Ainsi par exemple, une centaine de journées d'échanges, réunions ou groupes de travail ont été animés par les équipes de la CNSA, souvent en région, notamment dans le cadre de la mise en place des MDPH. On sait aussi que les conseils généraux vont bientôt signer avec la CNSA des conventions relatives à la qualité des MDPH et que la CNSA travaille actuellement avec les associations à l'élaboration de questionnaires de satisfaction des usagers.
Mieux impliquer les départements dans les Priac
S'agissant des établissements, le premier enjeu pour la CNSA est de "mettre en place une politique ambitieuse de création de places", a rappelé Denis Piveteau en notant qu'à la mi-février, 11 milliards d'euros avaient été répartis à ce titre sur la base des besoins recensés et des projets d'établissements identifiés par les préfets. Dans ce cadre, le directeur de la CNSA s'est fait l'éloge des fameux Priac, les programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la dépendance, sur lesquels la Caisse peut désormais s'appuyer.
Les membres du conseil de la CNSA - le rapport s'en fait l'écho - souhaitent toutefois que le mode d'élaboration des Priac soit quelque peu infléchi pour permettre aux conseils généraux d'y participer plus activement. Il est ainsi jugé nécessaire que les présidents de conseils généraux soient obligatoirement consultés "avant toute modification substantielle du Priac et notamment avant chacune de ses mises à jour annuelles".
Le rapport entend par ailleurs jouer une dimension prospective et de réflexion. Ou comment "ouvrir des voies nouvelles", selon les termes d'Alain Cordier, président du conseil, parlant de la CNSA comme d'un "laboratoire". Si le conseil ne va pas jusqu'à s'exprimer sur la question de la création d'un cinquième risque de sécurité sociale, il entend bien "réussir la convergence" entre le champ des personnes âgées et celui des personnes handicapés, en rapprochant les objectifs des lois de 2004 et de 2005. Il compte aussi veiller de près à la "cohérence" des réponses entre la sphère de l'aide à domicile et celle des établissements. La CNSA s'interroge ainsi sur la nécessité de "dessiner un nouveau champ de notre protection sociale", affirme lui aussi Denis Piveteau, en insistant notamment sur la question du "reste à charge" et du "reste à vivre".
Claire Mallet