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Projet de loi Santé - Installation des médecins : la commission sénatoriale aménagement du territoire vote un dispositif coercitif

Après avoir été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale en avril (voir notre article ci-contre du 15 avril 2015), le projet de loi relatif à la santé arrive devant le Sénat. Avant la commission des affaires sociales, qui doit examiner l'ensemble du texte, deux commissions se sont saisies de certaines dispositions. La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable s'est ainsi saisie de 17 articles sur les 209 de ce texte fleuve, qui compte pas moins de 236 pages...

Un "conventionnement sélectif" dans les zones bien dotées

Sur ces 17 articles, la commission - qui "soutient la plupart des avancées du projet de loi" - n'a voté que trois amendements, un nombre volontairement réduit mais "dont la portée symbolique est forte", puisque, selon son rapporteur, il s'agit de véritables "marqueurs identitaires" de la commission. Outre un amendement supprimant purement et simplement les cabines UV - dont on peine à saisir le rapport avec l'aménagement du territoire ou le développement durable -, la commission a adopté un amendement de son président - Hervé Maurey, sénateur (UDI-UC) de l'Eure - qui intéresse très directement les collectivités.
Cet amendement reprend en effet les conclusions du rapport d'information du Sénat de février 2013, intitulé "Déserts médicaux : agir vraiment" et dont le rapporteur n'était autre qu'Hervé Maurey (voir notre article ci-contre du 8 février 2013). L'amendement, adopté à l'unanimité par la commission et qui a occupé la quasi-totalité de la discussion, propose donc la mise en place d'un dispositif de conventionnement sélectif pour les médecins, sur le modèle de celui existant notamment pour les infirmiers. Pour mémoire, un autre rapport d'information du Sénat de 2007 proposait déjà la même mesure (voir notre article ci-contre du 11 octobre 2007).

Des attaques virulentes contre les médecins

La discussion au sein de la commission s'est transformée en attaques virulentes contre les médecins et le "lobby médical". Pour justifier la mise en place d'un dispositif coercitif, les intervenants ont notamment invoqué l'Atlas démographique publié chaque année par le conseil de l'Ordre (voir notre article ci-contre du 22 juin 2015). Une invocation qui oublie au passage que le principal problème est la fuite devant l'exercice libéral (seuls 15% des médecins choisissent l'exercice libéral pur au sortir de leurs études), qui pourrait bien s'aggraver si les candidats médecins tombent sous le coup d'une affectation imposée au bout d'une dizaine d'années d'études...
Pour figurer dans le texte qui sera examiné en séance publique, cet amendement doit encore être repris par la commission des affaires sociales. Mais Hervé Maurey a déjà prévenu : si ce n'est pas le cas, il représentera cet amendement en séance publique - en principe en septembre - et il espère qu'un consensus se dégagera "afin que le Sénat, représentant des territoires, apporte une réponse forte aux trois millions de Français qui vivent encore dans des déserts médicaux".
En cas d'adoption, il est probable que le gouvernement tentera de revenir sur cette disposition à l'Assemblée, Marisol Touraine ayant réitéré à plusieurs reprises son choix en faveur de mesures incitatives (voir notre article ci-contre du 18 juin 2013).
A noter : la commission des lois s'est également saisie de treize articles du projet de loi et a adopté plusieurs amendements visant à apporter des "garanties complémentaires" sur les dispositions relatives aux actions de groupe, au don d'organes, à l'hospitalisation psychiatrique et à l'ouverture de l'accès aux données de santé.

Jean-Noël Escudié / PCA

Références : projet de loi relatif à la santé (adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 14 avril 2015, examiné par la commission des lois et par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat le 15 juillet 2015).

 

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