Protection de l'enfance - Informations préoccupantes : des pratiques variables selon les départements
L'Observatoire national de l'enfance en danger (Oned) publie les résultats d'une "Enquête nationale sur les informations préoccupantes", une notion essentielle introduite par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, mais dont la définition donne encore lieu à discussion (voir nos articles ci-contre). Réalisée par entretiens téléphoniques sur la base d'une cinquantaine de questions, l'enquête couvre la totalité des départements.
Ses résultats montrent que l'ensemble des conseils généraux ont mis en place un dispositif centralisé de recueil, d'évaluation et de traitement des informations préoccupantes (IP), conformément à la loi de 2007 qui fait du président du conseil général le chef de file de la protection de l'enfance. Leurs dénominations sont toutefois très diverses (cellule, mais aussi pôle, antenne, observatoire, bureau...), de même que leurs moyens. L'enquête recense 39 cellules de recueil des informations préoccupantes (Crip) exclusivement composées de personnels administratifs et 62 Crip "mixtes", comprenant des travailleurs sociaux. Deux logiciels (Perceval et Iodas) se partagent 70% de l'équipement informatique spécialisé des Crip.
Autre enseignement : la mise en place des protocoles avec les partenaires s'est accélérée à partir de 2009, mais leur périmètre est assez variable. Aujourd'hui, 24 départements ont signé un protocole avec les trois partenaires principaux (Education nationale, hôpitaux, secteur associatif), 33 ont signé avec deux d'entre eux, 32 avec un seul et 11 n'ont pas de protocole avec ces partenaires. En termes de transmission des IP, 71% des responsables de Crip estiment recevoir de façon systématique les copies des signalements directs en provenance de l'Education nationale. Mais ils ne sont que 32% à dire la même chose pour les signalements des hôpitaux et 23% pour ceux des associations. De même, 40% des Crip disent recevoir des demandes d'évaluation de la part du parquet, ce qui crée parfois des tensions car ces demandes engendrent une charge de travail supplémentaire et placent le département dans la situation d'un service d'évaluation du parquet, puisque celui-ci ne se dessaisit pas de l'affaire.
Sur la question délicate de la qualification des informations entrantes comme informations préoccupantes, la situation est également très variable. Pour les 80 départements qui ont choisi de procéder à une qualification formalisée des informations entrantes, ce "fléchage" se fait au niveau de la Crip dans 32 départements, tandis que 25 autres procèdent conjointement au niveau de la Crip et des unités territoriales concernées, 13 uniquement au niveau des territoires et 10 selon d'autres procédures. Les pratiques diffèrent aussi sur la définition même de l'IP : 68% des départements se basent essentiellement sur les textes de référence, 29% ont élargi ou réduit la définition "officielle" et 3% ont une réflexion en cours sur la définition de l'IP. L'enquête passe également en revue les pratiques des départements en matière d'enregistrement des IP, qui diffèrent selon la source (signalements directs, demande des familles, accueils d'urgence, "soit-transmis" du parquet...). Enfin, l'Oned pointe certains biais dans la comptabilisation des IP, notamment dans le cas des informations concernant des fratries. Ces difficultés de définition, de périmètre et de comptabilisation rendent incertaines les comparaisons entre départements, même si l'étude de l'Oned propose une cartographie sur la question.