Identité des territoires - Immatriculation des véhicules : les départements sauvent leur (petite) tête
Le combat peut sembler quelque peu décalé en pleine crise financière et économique mondiale, mais il revêt néanmoins une valeur symbolique : après avoir été reçue, le 28 octobre, par Michèle Alliot-Marie, une délégation du collectif d'élus "Jamais sans mon département" a annoncé avoir finalement obtenu gain de cause sur le nouveau système d'immatriculation des véhicules (SIV). Dans un communiqué diffusé au sortir de la réunion, la ministre de l'Intérieur, de l'Outre-Mer et des Collectivités territoriales a confirmé qu'"afin de prendre en compte l'attachement exprimé en faveur du département, [elle] a accepté de rendre obligatoire la présence sur la plaque d'immatriculation d'un identifiant territorial, composé d'un numéro de département et du logo de la région correspondante". Jusqu'à présent, l'apposition du numéro du département sur le côté droit de l'immatriculation "officielle" (le côté gauche étant occupé par le sigle européen et par la lettre "F") devait être purement facultative et laissée à l'initiative du propriétaire du véhicule.
Richard Mallié, député des Bouches-du-Rhône (UMP), et Alain Vidalies, député des Landes (PS) - co-présidents du collectif -, se sont aussitôt félicités d'avoir été entendus par le gouvernement. Il est vrai que la nouvelle tombe plutôt bien, alors que l'Association des départements de France (ADF) tient son 78e congrès à Orléans, du 28 au 30 octobre (et que Michèle Alliot-Marie doit y intervenir le 29). Dans la mesure où le numéro est un élément fort de l'identité des départements depuis 1950, ces derniers devraient apprécier le geste, au moment où la commission Balladur sur l'organisation territoriale se prépare à entamer ses travaux et où ressurgit la rumeur d'une éventuelle suppression de l'échelon départemental.
Cette victoire du collectif, qui revendique 221 parlementaires adhérents, souffre toutefois quelques bémols. Tout d'abord, le numéro du département et le logo de la région seront assez peu visibles compte tenu de leur petite taille. Le sticker touristique traditionnel, apprécié de certains automobilistes, est sans nul doute plus visible. Ensuite, la ministre de l'Intérieur a bien précisé que "le propriétaire du véhicule pourra faire figurer l'indicatif du département avec lequel il ressent les attaches les plus fortes". Contrairement au cas du logo des régions, il ne s'agira donc pas nécessairement du département de résidence, même si Richard Mallié estime que "90% des Français feront le choix de leur lieu de résidence. Ils sont majoritairement attachés à leur département, à leur territoire, à leur identité". Enfin et surtout, rien n'obligera l'acheteur d'un véhicule d'occasion ou le propriétaire d'origine qui change de département à modifier sa plaque pour y faire figurer un nouveau numéro de département. Dans quelques années, on devrait donc aboutir à des situations un peu difficiles à décrypter : par exemple, un habitant du Gers roulant dans une voiture d'occasion achetée à un Lillois, qui avait choisi de faire figurer sur la plaque le numéro des Côtes-d'Armor en souvenir de ses racines bretonnes... La voiture d'un habitant du Gers avec le logo du Nord-Pas-de-Calais et le numéro des Côtes-d'Armor : où est le lien avec le territoire ?
Jean-Noël Escudié / PCA