Île-de-France Mobilités boucle un accord de financement "pérenne" avec l'État pour la période 2024-2031

L'État et Île-de-France Mobilités (IDFM) ont signé ce 26 septembre un protocole pour financer les transports en commun franciliens jusqu'en 2031. Cet accord, fondé sur "un effort proportionné et juste des financeurs du système des transports publics franciliens", doit garantir une stabilité des moyens sur la période.

Clément Beaune, ministre délégué aux Transports, et Valérie Pécresse, présidente d'Île-de-France Mobilités (IDFM), ont signé ce 26 septembre un protocole de financement pour la période 2024-2031. Avec cet accord qui doit garantir "la stabilité et la sérénité du financement" d'IDFM sur la période 2024-2031, "nous sortons de la logique annuelle du yoyo budgétaire", s'est félicité Clément Beaune lors d'une conférence de presse à l'occasion de la signature du protocole. La présidente d'IDFM a vanté "des bases extrêmement solides" pour cet accord destiné à poursuivre l'exploitation du réseau existant et un important programme d'investissement pour les dix prochaines années.

Le protocole entend ainsi répondre aux craintes exprimées par une mission d'inspections en juin dernier qui avait jugé que la soutenabilité à long terme de la trajectoire financière de l'autorité organisatrice risquait d'être mise à mal sous l'effet de plusieurs facteurs – mise en service de nombreux prolongements de lignes et du Grand Paris Express (GPE), qui va engendrer d'importants coûts d'exploitation et de maintenance (360 km de nouvelles lignes de transports lourds et 139 nouvelles gares seront ouvertes d'ici 2031), coûts d'investissement importants pour l'achat de leur matériel roulant, sans oublier l'évolution du contexte économique depuis la crise sanitaire. Selon Valérie Pécresse, IDFM aura besoin de 800 millions d'euros "l'an prochain en plus" pour exploiter le réseau existant et poursuivre ses investissements.

"Clés de financement" actuelles à stabiliser 

Mettant à contribution usagers, touristes, entreprises et collectivités locales d'Île-de-France, le protocole prévoit de "stabiliser en moyenne" sur la période les clés de financement actuelles, soit 52,5% de recettes fiscales (versement mobilité et TICPE) et d'aide directe et indirecte de l'État (subvention, dotation et, à l'avenir, redevance facturée par la Société du Grand Paris) et 47,5% de recettes dont IDFM a la maîtrise (tarifs et contributions des collectivités franciliennes).
Le protocole de financement est fondé sur le scénario central de la mission d'inspections, notamment sur la trajectoire de dépenses anticipées pour IDFM et sur les hypothèses d’augmentation en volume du versement mobilités et des recettes tarifaires. Le gouvernement s’engage à soutenir dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances pour 2024 et à conserver dans les versions successives du texte des amendements prévoyant l’augmentation à partir du 1er janvier prochain des taux plafonds du versement mobilité, dont sont redevables les entreprises de plus de 11 salariés, de 0,25 point en zone centrale (à Paris et dans les départements des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne) ainsi que la création, au 1er janvier 2024 également, d’une taxe additionnelle à la taxe de séjour ou à la taxe de séjour forfaitaire perçue dans la région Île-de-France et affectée à IDFM, avec un taux plafond de 200%. "Comme le prévoit la loi, la fixation du niveau de ces taxes et leur relèvement éventuel restera de l’entière compétence d’Île-de-France Mobilités", précise l'accord.
Le gouvernement s’engage également à fixer la rémunération annuelle qu’IDFM devra verser à la Société du Grand Paris pour l’usage des infrastructures du GPE à 0,4% du coût de celui-ci. Pour cela, un décret en Conseil d’État sera pris avant la mise en service de la première ligne du GPE. De son côté, IDFM doit financer, sur la période 2024-2031, l’exploitation du réseau historique et des nouvelles lignes qui seront mises en service ainsi que les coûts de fonctionnement supplémentaires liées aux Jeux olympiques et paralympiques 2024. "Pour ce faire, Île-de-France Mobilités procédera chaque année aux ajustements nécessaires des contributions des collectivités locales et des recettes tarifaires, en préservant les intérêts des usagers et les équilibres financiers" décrits précédemment, indique le protocole.

Hausse de 2,6% du passe Navigo en 2024

D'ores et déjà, l'an prochain, une hausse de 2,6% du prix du passe Navigo est prévue, soit pour "les usagers une contribution à hauteur de l'inflation", a affirmé Valérie Pécresse. Le passe mensuel toutes zones devrait ainsi coûter 86,30 euros, soit 2,20 euros de plus qu'actuellement. Les tarifs pour l'année prochaine seront définitivement fixés en décembre, lors du vote du budget 2024 d'IDFM. Outre cet effort demandé aux usagers, la contribution au budget d'IDFM versée par les collectivités locales franciliennes - la région Île-de-France, les départements, la Ville de Paris - devrait augmenter. "Je compte sur les départements, sur la ville de Paris. La région fera cet effort", a affirmé Valérie Pécresse, également présidente du conseil régional d'Île-de-France qui contribue à hauteur de 51% de la part du budget IDFM assurée par les collectivités.

Critiques des collectivités

Le protocole présenté est néanmoins critiqué par l'opposition de gauche à la région et des collectivités, tant pour la méthode que pour le fond. "C'est un accord sur le dos des usagers et des collectivités", a dénoncé auprès de l'AFP le premier adjoint à la mairie de Paris Emmanuel Grégoire (PS) qui déplore que les collectivités territoriales n'aient "pas du tout été associées". La ville devra, si le protocole est voté, augmenter chaque année sa contribution de 20 à 30 millions d'euros. "Nous demandons le réengagement de discussions sur la base d'un gel de la participation des usagers", a poursuivi l'élu, "pas du tout d'accord avec la hausse du passe Navigo compte tenu de la qualité du service et de la baisse du pouvoir d'achat". Selon l'adjoint écologiste aux Transports de la mairie de Paris, David Belliard, il s'agit d'"un accord entre deux droites, celle de Valérie Pécresse et de la majorité présidentielle où l'écologie à la française (vantée par le président de la République dimanche) se traduit par une augmentation du prix des transports".
L'an dernier, un bras de fer avait opposé le gouvernement et IDFM, dont le budget de fonctionnement était grevé par l'inflation et la flambée des prix de l'énergie. En décembre, le gouvernement lui avait accordé une "aide exceptionnelle" de 200 millions d'euros, permettant de limiter à 12% la hausse du passe Navigo en 2023, évitant d'atteindre les 90 euros mensuels.
Avec le protocole, "l'objectif est qu'il y ait un effort juste et partagé entre tous", a résumé Valérie Pécresse. Ces mesures valent pour 2024 : "À partir de l'année suivante (...) la hausse se fera davantage sentir sur la billetterie" des usagers, met en garde l'élu écologiste à la région, présent au conseil d'IDFM, Jean-Baptiste Piegeon. Soit "l'horizon d'un passe Navigo à 100 euros", résume-t-il. Le surcoût lié aux Jeux olympiques et paralympiques, évalué à 200 millions d'euros, devra lui être en partie financé par "un forfait JO" pour les touristes, a assuré la présidente d'IDFM.