Logement social - Ile-de-France : "Cela fait plus quarante ans que l'on n'avait pas autant construit"
Le "choc de l'offre" attendu par le gouvernement en matière de logement serait-il en train de se profiler ? C'est, en tout cas, la question qui peut se poser au vu des chiffres annoncés en ouverture de la réunion plénière du comité régional de l'habitat et de l'hébergement (CRHH), qui s'est tenue le 6 novembre. Co-présidée par Michel Cadot, préfet de la région Ile-de-France et préfet de Paris, et par Geoffroy Didier, vice-président du conseil régional, cette réunion s'est ouverte en effet par une présentation des chiffres de la construction dans la région, de loin la plus touchée par le manque de logements et qui affiche également les prix et les loyers moyens les plus élevés.
+26% pour les mises en chantier, +17% pour les autorisations
Face aux 80.600 logements mis en chantier au cours des douze derniers mois et au 100.200 autorisés, Michel Cadot a expliqué que "les chiffres du logement en Ile-de-France sont bons et encourageants. L'évolution est positive depuis 5 ans, cela fait plus de 40 ans que l'on n'avait pas autant construit et ces records sont possibles grâce à la mobilisation de tous les acteurs du secteur". Sur douze mois - et même si la région partait d'assez bas en termes de volumes - la hausse est en effet spectaculaire : +23% pour les mises en chantier et +16,8% pour les autorisations (permis de construire). Dans un contexte pourtant porteur de redressement généralisé de la production de logements, les chiffres de l'Ile-de-France sont même nettement supérieurs à la moyenne nationale sur les douze derniers mois, soit +17,6% pour les mises en chantier et +12,1% pour les autorisations.
La métropole du Grand Paris concentre 54% des mises en chantier et 51% des autorisations
Ce dynamisme tient, pour une bonne part, à la forte croissance des chiffres de la grande couronne où, à l'exception notable de l'Essonne (+4,1%), la progression du nombre de logements autorisés va de +24,1% dans les Yvelines à +35,2% en Seine-et-Marne. Les autres départements d'Ile-de-France connaissent en revanche une augmentation plus mesurée, inférieure à la moyenne régionale.
La situation est un peu différente pour les mises en chantier : les plus fortes progressions sur douze mois concernent l'Ouest et du Nord de la région : autour de +30% dans les Yvelines et la Seine-Saint-Denis, et près de +45% dans les Hauts-de-Seine et le Val-d'Oise. Paris enregistre en revanche une baisse de 8% des mises en chantier.
Le dernier enseignement porte sur un projet phare de l'Ile-de-France : avec 51.500 logements autorisés (+13,2%) et 43.800 logements commencés (+24%), la métropole du Grand Paris concentre 51% des autorisations régionales accordées au cours des douze derniers mois et 54% des mises en chantier.
420.000 logements à construire sur six ans
Au-delà de la présentation de ces chiffres, le CRHH du 6 novembre a vu également l'adoption du volet 2 du schéma régional de l'habitat et de l'hébergement (SRHH), après celle des volets 1 et 3. Ce volet fixe notamment les objectifs sur la période 2018-2023 et définit les moyens pour les atteindre. Le schéma régional prévoit ainsi un plan de construction de 420.000 logements sur six ans, soit une moyenne de 70.000 logements par an, légèrement inférieure à celle des mises en chantier des douze derniers mois. Déclinés à l'échelle du territoire (EPCI et métropole du Grand Paris) pour l'année 2018, les objectifs du schéma seront ajustés par le CRHH à l'issue de la première année de mise en œuvre.
Deux communes ajoutées à la liste des communes carencées
A l'occasion de cette réunion plénière, le préfet de région a aussi "proposé" de réévaluer le niveau de majoration pour cinq communes carencées en logements sociaux (Le Perreux-sur-Marne, Noiseau, Ormesson, Périgny-sur-Yerres, Villeparisis) et d'ajouter deux communes (La Celle-Saint-Cloud et Jouy-en-Josas) à la liste des communes carencées (voir notre article ci-dessous du 6 novembre 2017).
Enfin, Daniel Cadot a insisté sur l'importance des "Ateliers des territoires pour le logement et l'hébergement", qui vont se dérouler jusqu'en mars 2018. Cette démarche de réflexion prospective et de concertation associe notamment les EPCI de la grande et de la petite couronne, la métropole du Grand Paris, les conseils départementaux, le conseil régional, ainsi que des maires et des présidents d'associations de maires. Ces élus pourront proposer des "pistes d'amélioration du SRHH, notamment sur les objectifs territoriaux".
L'Aorif refuse de prendre part aux votes du CRHH
Dans un communiqué du 6 novembre, l'Aorif (l'Union sociale pour l'habitat d'Ile-de-France) a annoncé que "compte-tenu des mesures du projet de loi de finances 2018, ne disposant à ce jour d'aucune visibilité sur la capacité des organismes HLM franciliens à mettre en œuvre les objectifs du SRHH dans les années à venir, elle a décidé de ne pas prendre part au vote".
Malgré la concession calendaire de dernière minute du gouvernement (voir notre article ci-dessous du 3 novembre 2017), le mouvement HLM continue de contester l'article 52 du PLF 2018, "qui prévoit la prise en charge de la baisse des APL par les bailleurs sociaux, via une 'réduction de loyer de solidarité' et une taxation supplémentaire, [ce qui] remet profondément en question les équilibres économiques des organismes HLM et leur capacité d'investissement". L'Aorif estime la perte de recettes des bailleurs sociaux à 500 millions d'euros par an pour la seule Ile-de-France.
J.-N.E.