Habitat - François Fillon reprend la main sur l'hébergement et l'accès au logement
En janvier 2008, François Fillon lançait un plan pluriannuel en faveur des personnes mal logées ou sans abri. Dans son intervention (en lien ci-contre), il annonçait vouloir renforcer la prévention des expulsions locatives et la résorption de l'habitat indigne, mettre en place la garantie des risques locatifs, réhabiliter les centres d'hébergement et augmenter les capacités d'accueil. Il envisageait également d'obliger les communes ne respectant pas la loi SRU à "inclure dans les nouveaux programmes de construction 30 % de logements sociaux" sous peine de se voir opposer une "préemption préfectorale".
Près de trois ans après ces annonces, le Premier ministre vient de reprendre la parole sur le dossier en adressant aux préfets une circulaire portant sur le "chantier national prioritaire 2008-2012 pour l'hébergement et l'accès au logement des personnes sans abri ou mal logées". Sur la forme, ce texte est une bonne nouvelle pour les associations oeuvrant dans ce secteur : elles dénonçaient en effet depuis plusieurs mois l'insuffisante coordination interministérielle du chantier (voir notre article ci-contre du 16 juin 2010). Sur le fond, le Premier ministre indique "qu'après deux ans de travail, des avancées majeures doivent être relevées", et demande aux préfets de "poursuivre et amplifier leur efforts" autour de quatre priorités.
Contractualiser avec les collectivités
Premièrement, l'accès au logement. Pour mettre en oeuvre le droit au logement, les préfets doivent mobiliser non seulement leur contingent de logements sociaux, mais également intervenir sur une partie des attributions d'Action logement, en application de la loi Molle du 25 mars 2009. De plus, "dans les zones géographiques les plus exposées où ce complément s'avère nécessaire", François Fillon engage les préfets à "fixer par convention, des objectifs quantifiés avec les collectivités locales, afin qu'elles participent, sur leur propre contingent, au relogement des publics prioritaires du droit au logement opposable".
Deuxième priorité, "l'offre de solutions adaptées pour sortir de la rue". Les préfets doivent veiller à ce que les services intégrés de l'accueil et de l'orientation (SIAO) "disposent d'une visibilité totale sur les places disponibles", "la coordination entre les structures d'urgence et d'insertion fonctionne parfaitement" et "les services sociaux d'aide à l'enfance, des établissements pénitentiaires et des hôpitaux psychiatriques soient en lien opérationnel permanent avec les SIAO". Sans parler directement des personnes en situation irrégulière ou déboutées du droit d'asile, le Premier ministre réaffirme également, après Benoist Apparu la semaine dernière, "l'universalité de l'hébergement d'urgence".
Des crédits dès le début de l'année
Troisième priorité, le renforcement des dispositifs de prévention : le Premier ministre demande à nouveau la mise en place des commissions de prévention des expulsions dans tous les départements. Sur le volet de l'habitat indigne, les préfets doivent "accroître les procédures au titre des polices spéciales de l'habitat" (arrêtés d'insalubrité, de péril, etc.) et "renforcer l'action pénale à l'initiative du parquet".
Enfin, dernier point appelé à l'attention des préfets, "le pilotage et la mise en oeuvre des dispositifs" : "Les grands réseaux associatifs qui se sont engagés avec l'Etat dans une mutation profonde de la prise en charge des personnes sans abri ou mal logées attendent aujourd'hui des résultats concrets et des gages de la volonté de l'Etat de poursuivre les efforts accomplis". D'où cette annonce en conclusion de la circulaire : "Pour garantir une meilleure visibilité et offrir plus de transparence aux acteurs, j'ai demandé que l'intégralité du programme 177 vous soit déléguée dès le début de l'année. Je vous demande en conséquence de contractualiser avec chaque opérateur, sur les objectifs et les moyens pour l'année 2011, dès le premier trimestre." Une vraie nouveauté pour les acteurs du secteur, mais insuffisante. Interrogées par l'AFP, plusieurs associations ont jugé que cette circulaire n'était qu'une "déclaration de bonnes intentions". "Le discours est volontariste mais il n'y a pas d'engagement financier à hauteur des orientations décrites", a déploré Patrick Doutreligne, délégué général de la fondation Abbé-Pierre.