PLF 2014 - Finances locales : Anne-Marie Escoffier assume la concentration des économies de l'Etat sur le bloc local
L'année prochaine, la rigueur touchera davantage les communes et l'intercommunalité que les départements et les régions, du fait des "gestes" que ces derniers ont obtenus. Tel est en tout cas le sentiment de plusieurs élus du Comité des finances locales (CFL), qui n'ont pas manqué de s'en plaindre devant les membres du gouvernement, le 24 septembre, lorsque le projet de budget pour 2014 leur a été présenté (voir notre article du 24 septembre).
Le gouvernement ne nie pas la volonté d'atténuer le choc de la rigueur pour les départements et les régions. Le projet de loi de finances pour 2014 "procède à la diminution de 1,5 milliard d'euros des concours de l'Etat aux collectivités, en concentrant l’effort sur le bloc communal qui dispose de plus de marges, comme la Cour des comptes l’a récemment souligné", indique ainsi le compte-rendu du Conseil des ministres du 25 septembre. Que ce discours émane du ministère du Budget, aucun élu local n'en serait étonné. Mais visiblement, le ministère en charge de la Décentralisation le partage. "Globalement, il faut être honnête. Même si les maires et présidents d'intercommunalités se plaignent de la disette, le bloc communal et intercommunal est, de tous les niveaux de collectivités, celui dont les ressources permettent le mieux de continuer à assumer ses responsabilités", a affirmé Anne-Marie Escoffier le 26 septembre, lors d'un entretien avec la presse, auquel Localtis participait.
Pas de gestes en 2015
"Il fallait vraiment apporter une réponse structurelle en faveur des départements", souligne-t-on par ailleurs dans l'entourage de la ministre déléguée. Le transfert au profit des départements de 830 millions d'euros de ressources nouvelles - sous la forme de frais de gestion de la taxe sur le foncier bâti et l'octroi d'une possibilité de dépasser pendant deux ans le plafond des droits de mutation à titre onéreux - répond à une urgence. "L'un des problèmes les plus importants est la situation financière des départements et de l'inadéquation de leur panier de ressources par rapport à leurs charges dans le domaine social, comme l'a souligné la Cour des comptes", poursuit un conseiller de la ministre. Mais, constate-t-il encore, "la seconde baisse d'1,5 milliard d'euros qui interviendra en 2015 concernera de nouveau toutes les catégories de collectivités, alors qu'a priori on en aura fini avec les réformes structurelles mises en œuvre au profit des uns et des autres, en tout cas au moins en faveur des départements." En outre, soutenir le département, cela permet en fin de compte à ce niveau de collectivités de continuer à subventionner des projets sous maîtrise d'ouvrage communale ou intercommunale, fait valoir un proche d'Anne-Marie Escoffier.
La ministre déléguée a par ailleurs justifié le geste fait en direction des régions dans le projet de loi de finances, à savoir l'allocation de 900 millions d'euros de ressources fiscales – dont 600 millions d'euros de ressources réellement dynamiques – en remplacement de dotations. Les projets de lois sur la décentralisation leur attribuent des responsabilités accrues, qui nécessiteront un effort financier plus important de leur part, a-t-elle dit.
S'il partage le diagnostic de la Cour des comptes, le gouvernement n'a cependant pas mis à exécution les préconisations les plus vigoureuses de celle-ci, à savoir le transfert d'une partie des ressources fiscales du bloc local au profit des départements (lire notre article du 12 février 2013). "Il faut regarder les partenaires qui sont les nôtres. (...) On a des textes à faire passer, il faut avancer, on ne peut pas trop mécontenter", a expliqué Anne-Marie Escoffier.
Remettre de l'ordre dans la DGF
Au-delà de sa présentation des principales mesures contenues dans le projet de budget, la ministre a annoncé qu'elle envisage une "remise à plat" de la dotation globale de fonctionnement (DGF) dans le projet de loi de finances pour 2015. Créée en 1979, cette dotation, qui a déjà été réformée en profondeur par la loi de finances pour 2004, doit s'élever en 2014 à 40,1 milliards d'euros. La direction générale des collectivités locales (DGCL) travaillera à partir du début de l'année prochaine à ce chantier, qu'elle a qualifié d'"ambitieux". Elle compte associer à la réflexion les parlementaires et le CFL, entre autres.
"Le fait qu'on se retrouve dans une situation financière compliquée nous oblige à réfléchir à un système où l'on a entassé les différentes procédures", a indiqué la ministre déléguée. Avant d'ajouter : "On a mis en place des systèmes de péréquation qui veulent réparer une forme d'inégalité entre les territoires. Mais on s'est bien rendu compte que lorsqu'on touchait d'un côté, on désavantageait d'autres et que c'était toujours un dialogue difficile." L'objectif de la réforme sera de "permettre, sur l'ensemble du territoire et à tous nos territoires, de retrouver des formes d'équilibre et d'harmonie", a-t-elle fait valoir.
La révision des valeurs locatives des 46 millions de locaux d'habitation, dont les principes et modalités doivent être inscrits dans le projet de loi de finances pour 2014 ou le collectif budgétaire de fin d'année – mais dont les effets concrets ne se feront sentir qu'à partir de 2018, voire 2019 – doit elle aussi amener des bouleversements dans les dotations allouées aux collectivités territoriales. Le gouvernement devra en tenir compte.