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Economie sociale et solidaire - Finance solidaire : la nécessaire participation des investisseurs institutionnels

La finance solidaire progresse chaque année de plus de 20%. Mais d'après Finansol, les banques et fonds institutionnels pourraient investir davantage le domaine. Les régions, déjà très impliquées, vont pouvoir développer leur action, à travers les "social impact bonds" ou "titres à impact social".

Si la finance solidaire a le vent en poupe, les acteurs concernés souhaiteraient davantage de participation des investisseurs institutionnels. A l'heure actuelle, d'après Finansol, association de promotion de la finance solidaire et du label Finansol*, l'épargne solidaire représentait en 2013 quelque 6 milliards d'euros, avec un million d'épargnants solidaires et 1,2 million de produits d'épargne solidaire souscrits. Le chiffre est en progression de 28,3% sur un an. 1,8 milliard d'euros est investi à travers de l'épargne bancaire (livrets, OPCVM, contrats d'assurance-vie), 3,6 milliards d'euros par de l'épargne salariale (Fonds communs de placement d'entreprise solidaire), et 429 millions d'euros par de l'épargne collectée par des entreprises solidaires (actions non cotées, dépôts à terme, obligations associatives). "La finance solidaire se porte bien avec un taux de croissance de plus de 20% depuis dix ans et une augmentation constante du nombre de produits labellisés", a ainsi récemment commenté Frédéric Tiberghien, président de Finansol, à l'occasion d'un séminaire organisé le 13 avril 2015 sur le sujet.
Grâce à ces financements solidaires, 22.000 emplois ont pu être créés ou consolidés en 2013, dont 6.000 concernaient des personnes éloignées du marché du travail (salariés en insertion, allocataires de minima sociaux, personnes handicapées…).
"Une dynamique très favorable", dont Frédéric Tiberghien se félicite. Mais le président de Finansol ne veut pas se reposer sur ses lauriers. Son souhait : que les banques s'investissent davantage dans ce domaine. "Les produits solidaires ne se vendent pas spontanément, et les banques ne les mettent pas spécifiquement en avant, les commerciaux ne sont pas toujours formés pour ces produits, explique-t-il à Localtis, elles constituent pourtant des effets de levier importants."
Outre le Crédit coopératif, dont c'est le métier, certaines banques commencent à développer des produits solidaires et à les valoriser. BNP Paribas a récemment lancé deux nouveaux fonds dédiés à l'entrepreneuriat social, avec un objectif de 40 millions d'euros investis en trois ans. Un travail d'adaptation difficile. "Il faut adapter nos modalités de financement, les rythmes de rentabilité notamment sont plus lents, et il faut pouvoir mesurer l'impact social", a ainsi expliqué Raphaèle Leroy, responsable des relations avec les consommateurs et de la RSE de BNP Paribas, lors du colloque du 13 avril.

Pas de fonds institutionnels dans l'épargne solidaire

Autre piste pour développer la finance solidaire : inciter les investisseurs institutionnels à devenir des investisseurs solidaires. "Aujourd'hui, c'est quasi inexistant, il n'y a pas de fonds institutionnels dans l'épargne solidaire, c'est pourtant un levier majeur, assure Sophie des Mazery, directrice de Finansol. Les difficultés rencontrées sont nombreuses. Parmi elles : les objectifs de rendement financier à tenir face à une économie dont on connaît encore peu le cycle de financement, l'évaluation, difficile à chiffrer, de la demande en capital de cette économie et… une certaine volonté politique."
Eric Loiselet, porte-parole du réseau des administrateurs pour l'investissement responsable, a ainsi tenté, en vain, de mobiliser des fonds de retraite, et notamment le fonds de pension de la fonction publique (ERAFP) sur l'ESS. "Cela n'a pas marché, l'idée a du mal à aboutir", a-t-il témoigné, le 13 avril.
En attendant, les régions prennent le relais, dans la mesure de leurs possibilités. "Elles travaillent sur des produits à proposer, c'est le cas des régions Pays de la Loire et Nord-Pas-de-Calais (voir encadré ci-dessous), précise Sophie des Mazery, elles ont une formidable appétence pour la finance solidaire. Et ce qui est plus difficile au plan national est plus simple en région, comme la mesure de l'impact social des entreprises de l'ESS." Les régions pourraient aussi être amenées à développer les "social impact bonds" ou "titres à impact social". En septembre 2014, Hugues Sibille, alors conseiller du président du Crédit coopératif (nouveau président de la Fondation Crédit coopératif depuis le 8 avril 2015),a remis à Carole Delga, secrétaire d'Etat chargée du Commerce, de l'Artisanat, de la Consommation et de l'Economie sociale et solidaire, un rapport sur cette thématique, mené dans le cadre du G8. Objectif : développer un "impact investing" à la française. Ces titres permettent de lever des fonds privés pour financer des actions sociales publiques (insérer des chômeurs de longue durée, reloger des sans-abris…). "Il y a des expériences à mener en France, assure Sophie des Mazery, cela marche déjà dans certains pays anglosaxons ; il faut voir comment les adapter à la France."

Emilie Zapalski

* Le label Finansol a été créé en 1997 pour distinguer les produits d'épargne solidaire des autres produits d'épargne auprès du grand public

Livret Troisième révolution industrielle en Nord-Pas-de-Calais
Le livret "Troisième révolution industrielle" a été lancé le 22 janvier 2015 par le Crédit coopératif, en partenariat avec la chambre de commerce et d'industrie de la région Nord-Pas-de-Calais. Objectif : collecter de l'épargne qui financera les entreprises locales du Nord qui répondent à des principes d'innovation écologique et sociale.
Le livret est commercialisé dans le cadre du projet Troisième révolution industrielle menée par la région Nord-Pas-de-Calais. Depuis son lancement, il a attiré plus de 500 épargnants et permis de récolter 3 millions d'euros. Chaque année, la banque publiera un document détaillant les prêts octroyés et les activités par conséquent financées.
E.Z.

 

Où se situent les épargnants solidaires ?
D'après une étude réalisée par Finansol, publiée le 13 avril 2015, il y a entre 800.000 et un million d'épargnants solidaires en France. Ils épargnent en moyenne 4.306 euros. 52% ont investi 1.000 euros ou plus. Les montants investis augmentent avec l'âge : les épargnants de moins de trente ans investissent en moyenne 1.543 euros ; les épargnants de 70 ans et plus, en moyenne 11.051 euros.
Les régions Ile-de-France (31%) et Rhône-Alpes (12%) constituent des bastions importants de l'épargne solidaire, suivies des régions Provence-Alpes-Côte d'Azur, Nord-Pas-de-Calais, et Pays de la Loire.
E.Z.

 

 

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