La bricothèque La Chignole booste l’économie circulaire (26)

Au départ, La Chignole est une histoire de copains et copines, désireux de partager leurs savoir-faire en matière de bricolage, de sensibiliser au recyclage et de créer du lien social. Ils montent, en 2017, une association qui propose des ateliers dans un Tiers Lieu crestois. Puis, très vite, vient « le souhait de s’inscrire en tant qu’acteur de l’économie circulaire de la vallée de la Drôme. Récupérer, recycler, partager… les outils et les tonnes de matériaux qui échouent dans les bennes des déchetteries », explique Brice Guyot, actuel coordinateur de l’association.

Changer de braquet

La dynamique « bricothèque » lancée, le collectif intègre en 2020 l’incubateur d’entrepreneurs sociaux Ronalpia. Objectif : faire de La Chignole une structure conviviale accessible à tous, mais aussi viable économiquement, synonyme d’emplois salariés pérennes. 

La Chignole obtient des financements d’amorçage (Région et Europe). Elle trouve des locaux à Crest : 200 m² de bâti et 1 500 m² d’extérieur, propriété de la communauté de communes du Val-de-Drôme en Biovallée (CCVD), qui les lui loue à prix modique. En mars 2021, les locaux ouvrent au public. D’abord l’espace matériauthèque où, moyennant une adhésion de 8 euros, on peut acheter à prix cassés des matériaux récupérés auprès d’entreprises et de particuliers (plastiques, métaux, bois, gravats). Ouvre aussi l’espace atelier partagé, en libre-service ou pour se former (15 euros les 2-3 heures, tarif ajustable aux moyens de chacun à partir de 5 euros par heure et par personne). En février 2022, ouvre enfin l’outilthèque, où le public peut emprunter des outils de bricolage et de jardinage à tarif modique (de 50 centimes à 5 euros). En l’espace de deux ans, c’est le succès : plus de 1 000 adhérents, quatre salariés (coordinateur, et responsables administrative, technique et d’animation), des dizaines d’outils mutualisés et 27 tonnes de matériaux détournées de la benne en 2022, dont plus 20 valorisées. Objectif pour 2023 : détourner 50 tonnes des bennes.

Logique territoriale

Pour en arriver là, les soutiens de départ, notamment celui de la CCVD, ont été précieux. D’aucuns pourraient s’interroger : La Chignole est hébergée dans des locaux de la CCVD situés à Crest alors que Crest est… sur le territoire de la communauté de communes du Crestois et du Pays de Saillans (CCCPS) ! Anomalie ? « Héritage historique, explique Christine Marion, 1^re vice-présidente de la CCVD. Avant leur installation à Eurre, les locaux du siège de la CCVD se situaient à Crest. » Brice Guyot sourit : « Et pour la Chignole, c’est un avantage. Cela permet un lien direct avec les deux collectivités couvrant les territoires sur lesquels nous travaillons en priorité. »

Voisine de la recyclerie L’Or des Bennes, La Chignole l’est aussi de la déchetterie de la CCCPS. Pour l’intercommunalité, l’association est un acteur logique du « consommer autrement ». Si les liens avec la déchetterie sont encore ténus, reconnaît Brice Guyot, la Chignole envisage d’y mener des actions de sensibilisation au réemploi. Côté CCVD, où « la stratégie d’économie circulaire est un axe majeur du projet de territoire, travailler avec La Chignole est une évidence », confie Christine Marion. D’autant qu’il n’existe pas encore à ce jour, de structure équivalente sur l’intercommunalité. « Cependant, nous avons en projet à court terme, l’implantation de nouvelles zones de réemploi à l’entrée des déchetteries gérées par la CCVD », cite en exemple l’élue.

Dynamique « Biovallée »

Cette réflexion partagée s’étend à toute la vallée de la Drôme, via l’association Biovallée, qui réunit élus, entreprises, associations et citoyens de trois communautés de communes (CCVD, CCCPS et Pays Diois). Christine Marion et Brice Guyot siègent d’ailleurs tous deux à son conseil d’administration et sont membres du groupe de travail économie circulaire.

« Biovallée est devenue facilitatrice de projets coopératifs pour faire de la vallée un territoire de référence sur le développement durable », rappelle Brice Guyot. Une approche primée par l’État, via le Plan d’investissement d’avenir Territoire Innovant de Grande Ambition (TIGA), géré par la Caisse des Dépôts, pour accélérer la transition écologique et sociale - soit 19,4 millions d’euros de subventions et investissements.

Parmi les objectifs à horizon 2030 : réduire de 30 % le tonnage de déchets. Des projets prennent forme. La Chignole et Liotard TP, entreprise de travaux publics locale, ont ainsi engagé une démarche de réemploi des chutes de tubes PVC. « Liotard nous prépare des bennes prétriées avec tout ce qui nous intéresse », indique Brice Guyot, soulignant combien ce type de projets est crucial à l’heure de la mise en œuvre de la nouvelle filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) dans le bâtiment.