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Economie solidaire - Emplois d'avenir et financement : les précisions de Benoît Hamon pour le secteur de l'ESS

En visite à Aubervilliers le 7 septembre 2012, Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'Economie sociale et solidaire, a signalé qu'un accord-cadre avec les régies de quartier allait être signé pour la création de 1.500 emplois d'avenir. Il a également donné les premières hypothèses concernant le mécanisme de financement de l'ESS via la future BPI. Le ministre défend par ailleurs l'idée d'un statut de mutuelle au niveau européen.

"Un premier accord-cadre va être signé prochainement sur le plan national avec le comité national de liaison des régies de quartier pour créer 1.500 emplois d'avenir." C'est ce qu'a annoncé Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'Economie sociale et solidaire, à l'occasion d'un déplacement le 7 septembre 2012 à Aubervilliers. Le projet de loi sur les emplois d'avenir, qui vise à créer 150.000 emplois de ce type d'ici à 2014, doit être examiné à partir de mardi 11 septembre par l'Assemblée nationale. Le gouvernement veut aller vite, voire plus vite que prévu et les conventions permettant la signature de ces emplois devraient se multiplier.
D'après la coopérative Coopaname Paris Est, dans laquelle Benoît Hamon s'est rendu le 7 septembre, les emplois d'avenir "seraient un vrai levier pour le démarrage d'activité des jeunes". Noémie de Grenier, qui travaille dans la coopérative, explique ainsi que parmi les personnes qui souhaitent créer leur activité via une coopérative, il y a des jeunes sans emploi et sans revenu. "C'est difficile pour eux de monter un projet tout en travaillant pour gagner de l'argent. Les emplois d'avenir permettraient de sécuriser leur revenu, détaille la responsable, encore faut-il que les emplois d'avenir soient adaptés pour ce statut, pour des jeunes qui veulent créer leur propre travail." 
Selon le projet de loi, ces emplois doivent en priorité concerner le secteur non marchand, dont l'économie sociale et solidaire. "Ce n'est pas simplement la mise en place d'activités de pauvres pour les pauvres ou la mise en relation de gens cabossés, mais la volonté de développer de l'activité au service de la cohésion sociale", a insisté Benoît Hamon, précisant que le secteur de l'ESS avait mieux résisté à la crise que d'autres, avec 23% d'emplois en plus sur les dix dernières années contre 7% ailleurs. "C'est un secteur dynamique qui ne vit pas que de la subvention", a-t-il ajouté.
Jacques Salvator, le maire d'Aubervilliers, s'est félicité de la venue du ministre dans ses terres, assurant que "c'était une aubaine". Dans le département de Seine-Saint-Denis, le secteur de l'ESS progresse moins rapidement qu'ailleurs en Ile-de-France. Dans la région, 12% des emplois ont ainsi été créés par ce secteur contre 6% seulement en Seine-Saint-Denis. "Il y a un vrai différentiel par rapport à l'Ile-de-France", a renchéri Jean-François Baillon, vice-président du conseil général de Seine-Saint-Denis, chargé de la solidarité et l'insertion, et de l'économie sociale et solidaire. Le maire d'Aubervilliers se dit prêt à participer au mouvement de fond, notamment via les emplois d'avenir. "On sera sollicité en tant que collectivité. Il faut créer le plus vite possible ces emplois et, chemin faisant, on trouvera les moyens. Mais là, il y a une urgence absolue."

La BPI "ne sera pas une usine à gaz"

Autre sujet de préoccupation à l'occasion de cette visite : la banque publique d'investissement (BPI), qui doit être créée d'ici fin octobre. Une partie de ses fonds, 500 millions d'euros, sera réservée au secteur de l'ESS, mais selon quel schéma ? "On ne sait pas encore quel principe on va retenir, explique Benoît Hamon à Localtis, soit l'association demandeuse se tournera vers son interlocuteur bancaire qui fera le nécessaire pour demander des financements auprès de la BPI, soit il y aura un double circuit, avec l'association qui demandera à sa banque mais aussi à la BPI." Reste aussi à connaître l'organisation territoriale de la banque et la place des régions dans cette organisation. Celles-ci ont proposé de créer une holding centrale et des filiales régionales, où elles seraient décisionnaires, mais le ministre ne semble pas partant pour cette solution autour de "banques régionales". "Elles seront associées aux comités d'orientation et à la définition des orientations, et il y aura un guichet spécialisé régionalisé, mais quant à créer des banques régionales, ce sera plus compliqué", explique le ministre.
Quoi qu'il en soit, les attentes sont nombreuses dans ce domaine : financement de projets, financement de l'éducation autour de l'ESS… La BPI "sera proche du terrain et ne sera pas une usine à gaz", promet Benoît Hamon. La banque aura deux orientations principales : le financement de l'innovation sociale et l'accompagnement des projets. Elle pourra permettre des financements allant de 5.000 euros pour les plus petits projets, à plus d'un million d'euros pour de grandes associations.

Emilie Zapalski

Vers un statut de mutuelle européenne ?

Au lendemain de la présentation en Conseil des ministres d'une communication relative au soutien à l'économie sociale et solidaire (ESS), Benoît Hamon s'est rendu jeudi 6 septembre à Bruxelles. Lors de la réunion de l'intergroupe économie sociale du Parlement européen puis devant le commissaire Michel Barnier, le ministre français a exposé ses projets.
Avec "l'initiative pour l'entrepreneuriat social" lancée par la Commission européenne en octobre 2011, l'ESS figure désormais à l'agenda européen.
Benoît Hamon, qui a été député européen de 2004 à 2009, plaide pour la création d'un statut de mutuelle européenne. En mars 2011, les eurodéputés avaient adopté une déclaration en ce sens.
Soutenue par les mutuelles françaises, l'initiative a été lancée par cinq eurodéputés, dont, pour la France, Marie-Christine Vergiat (Gauche Unitaire Européenne) et Pascal Canfin (Verts/Alliance Libre Européenne). La reconnaissance d'un statut juridique commun au plan européen faciliterait le regroupement des mutuelles et imprimerait la spécificité de leur modèle de gouvernance.
Pour le ministre, la dimension économie sociale et solidaire doit également être prise en compte dans les directives sur les marchés publics en cours de discussion, notamment dans les critères d'attribution des contrats.
Benoît Hamon a parlé avec "clarté et détermination", estime Emmanuel Verny, délégué général du Conseil des Entreprises, Employeurs et Groupements de l'Economie Sociale (Ceges), qui a assisté aux échanges à Bruxelles.
A ce stade, la France a entamé une réflexion avec les autres ministres des 27 pays de l'UE. A ce jour, il n'existe pas de Conseil des ministres de l'UE consacré à l'économie sociale et solidaire. "Cette initiative a été particulièrement appréciée car elle permettrait à la politique européenne d'ESS de n'être plus uniquement portée par le Parlement et la Commission, mais également par les Etats", relève Emmanuel Verny.
Alexandra Yaghil / Euractiv.fr