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Aménagement numérique - E-Mégalis va organiser le déploiement du très haut débit en Bretagne

Quatre présidents, dix bougies et une centaine d'invités. Le syndicat mixte e-Mégalis Bretagne a fêté, ce 9 décembre à Pacé, près de Rennes, son dixième anniversaire. L'occasion de dresser un bilan des actions pour les trois présidents successifs de cette structure de coopération territoriale dédiée dans un premier temps aux services télécoms puis à l'administration électronique.
"Dans le cadre de l'évolution de Rénater, s'est posée la question de la mise en réseau de la communauté universitaire, puis de la communauté hospitalière et finalement des collectivités publiques bretonnes. Le niveau d'investissement était tel qu'il fallait se retrouver, soit pour tirer des fibres noires soit pour acheter de la bande passante, ce que nous avons finalement réalisé", a rappelé Joseph Kerguéris, le premier président du syndicat en 2000, élu depuis à la tête du conseil général du Morbihan. "E-Mégalis a ensuite été victime de son succès immédiat : il fallait augmenter les débits et servir tout le monde", a enchaîné Jacques Berthelot, qui a présidé aux destinées du marché de services de télécommunications de 2001 à 2004. "A cette période, nous étions la risée de toute la France avec nos services de bande passante alors que les autres collectivités se mettaient à creuser des tranchées pour faire des réseaux de collecte en fibre optique…", a reconnu Jacques Berthelot.

Missions élargies

Il faut dire que la Bretagne, partie première dans l'aventure de l'ouverture des marchés de télécommunications, n'avait pas eu vraiment le choix. A l'époque, le cadre juridique était celui de l'article L.1511-6 du Code général des collectivités territoriales, et non de l'article L.1425-1 qui a permis par la suite aux collectivités de devenir "opérateur d'opérateurs". En outre, terre pionnière des technologies, avec Pleumeur-Bodou ou le centre de recherches du Cnet de Lannion, les emplois de la Trégor Valley dépendaient essentiellement de deux champions nationaux : Alcatel et surtout France télécom…
Le président actuel, Eric Berroche, est arrivé à la période charnière qui correspondait à la fin des marchés en 2004. "Il fallait faire une évaluation et tirer un bilan pour les collectivités. Il est apparu que ce bilan était largement positif, que les économies étaient considérables… Evidemment, il y avait des suggestions de deux natures différentes pour évoluer : soit continuer de favoriser l'accès au réseau et réduire encore le coût de la bande passante, soit réfléchir à un élargissement des missions vers une plateforme d'administration électronique". C'est la seconde option qui a finalement été retenue jusqu'à aujourd'hui. Avec succès : le syndicat mixte regroupe désormais 1.002 communes (sur 1.200 en Bretagne), la plateforme de marchés publics en ligne affiche des résultats en augmentation de 88 %, la dématérialisation des actes au contrôle de légalité a déjà convaincu 336 entités émettrices et les projets s'orientent désormais vers la mutualisation des données orthophotographiques, l'archivage électronique, la gestion de la relation avec le citoyen…

La fibre pour tous d'ici 2030

Jean-Yves Le Drian, le président du conseil régional de Bretagne, présent pour la première fois aux nouvelles rencontres de l'administration électronique à Pacé, a profité de l'occasion pour évoquer sa stratégie en faveur du déploiement du très haut débit (THD). S'appuyant sur deux chiffres-clés, la croissance inattendue de la population bretonne (environ 4 millions d'habitants en 2030, selon l'Insee) et le très mauvais classement breton en ce qui concerne l'accès au numérique par rapport aux 268 régions d'Europe, Jean-Yves Le Drian a déclaré : "Dans la future génération des fonds de cohésion, les régions devront affirmer quelques priorités, deux ou trois au maximum, pour bénéficier d'aides européennes d'ici 2013. L'accessibilité numérique me paraît être, pour nous, une des ces priorités déterminantes pour notre avenir."
"Si l'on se fixe pour objectif politique le THD pour tous à l'horizon 2025 et la fibre pour tous en 2030, nous ne pourrons y parvenir qu'avec un partenariat intelligent. Cette nouvelle aventure ne concernera pas que les tuyaux, les réseaux, mais aussi l'accompagnement des usages. Mon seul message, c'est donc que l'aventure d'e-Mégalis doit se poursuivre. Cet outil devra nous permettre d'être performants dans le défi qui est placé devant nous. Nous n'avons pas tellement le choix, soit nous mettons les moyens politiques et financiers, soit nous serons isolés. La région Bretagne souhaite que l'on aille dans ce sens. Et la région y mettra les moyens qu'elle peut mobiliser en plus de ceux de l'Etat et de l'Europe. Et contrairement à ce qu'a dit Eric Berroche, le problème c'est qu'il faut y aller vite car la concurrence existe avec de nombreux territoires qui sont déjà engagés dans des projets similaires…", s'est enflammé l'élu local, voilant à peine une critique.

2 milliards d'investissement

Des études prévoient qu'il faudra mobiliser autour de 2 milliards d'euros pour parvenir à fibrer la Bretagne (voire le double selon certaines sources). Soit autant que ce que met l'actuel gouvernement pour aider au déploiement du très haut débit sur tout le territoire national. La dorsale existe déjà dans la région mais elle appartient entièrement à France télécom, conséquence des marchés de services hérités de la précédente mandature. Tous les départements ont des réseaux de collecte : en délégation de service public (DSP) pour les Côtes d'Armor, en PPP pour le Morbihan ou bientôt le Finistère, et en DSP avec du WiMax pour l'Ille-et-Vilaine. Comment tout cela va-t-il s'interconnecter ? Mystère. L'équipe de douze salariés d'e-Mégalis devra probablement être complétée de nouvelles compétences. La région prévoit une conférence pour présenter son schéma régional de cohérence d'aménagement numérique (Scoran) ce 14 décembre. Souhaitons que "l'esprit de mutualisation d'e-Mégalis" y souffle un vent favorable !