Logement - Dix territoires vont expérimenter le "logement d'abord"
Nathalie Kosciusko-Morizet et Benoist Apparu ont annoncé, le 19 octobre, la sélection de dix territoires-pilotes qui vont expérimenter la stratégie du "logement d'abord". Inspirée du dispositif "Housing First" développé aux Etats-Unis et au Canada, celle-ci "signifie que l'accès à un logement ordinaire de droit commun doit être privilégié autant que possible, sans qu'il y ait de passage obligatoire par l'hébergement, sauf à ce que la situation de la personne le justifie". Ce principe vaut pour les personnes proches de l'autonomie comme pour les publics les plus fragiles. En France, cette approche a déjà fait l'objet d'une expérimentation à échelle plus réduite sur trois sites, à Marseille, Toulouse et Lille (voir notre article ci-contre du 26 avril 2011).
L'expérimentation annoncée par les deux ministres est nettement plus ambitieuse. Les dix territoires-pilotes ont en effet été sélectionnés après un appel à projets qui a suscité 25 candidatures. Ils couvrent des territoires sensiblement plus vastes, avec une approche territoriale diversifiée, puisqu'on y trouve les Bouches-du-Rhône, la Bourgogne (région et département de la Côte-d'Or), le Gard, la Gironde, la Haute-Garonne, l'Ile-de-France, l'Isère, la communauté urbaine de Lille, une partie des Pays de la Loire (Loire-Atlantique et Sarthe) et le Grand Lyon. Pour la ministre du Développement durable et le secrétaire d'Etat au Logement, "avec ces territoires-pilotes, il s'agit de voir concrètement, sur le terrain, comment nous pouvons améliorer le service rendu aux personnes sans abri en faisant de l'accès au logement une priorité".
En pratique, ces territoires bénéficieront de la mise en place d'actions destinées à faciliter l'accès au logement pérenne des personnes sans abri, par exemple sous la forme de la création de services d'accompagnement dans le logement, adaptés aux besoins des personnes. De même le relogement devrait être accéléré, grâce au développement d'offres adaptées comme les pensions de famille, dont les capacités sont passées de 3.800 places en 2007 à 10.000 aujourd'hui. Au total, 15.000 places dédiées devraient être ouvertes dans les deux prochaines années. Pour atteindre cet objectif, les dix territoires-pilotes bénéficieront d'un appui en ingénierie assuré par l'Agence nationale des solidarités actives (Ansa). Seul bémol à ce dispositif : l'enveloppe annoncée de 1,5 million d'euros sur la période 2011-2012 semble modeste au regard de l'importance des territoires concernés et des objectifs affichés.
Refonder la politique d'hébergement et d'accès au logement
Le "logement d'abord" est, par ailleurs, une pomme de discorde entre le gouvernement et les associations spécialisées (voir notre article ci-contre du 28 septembre 2011). Celles-ci sont certes favorables au principe d'une telle approche. La Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (Fnars) y voit ainsi "le principe structurant" de la "refondation de la politique d'hébergement et d'accès au logement" engagée par Benoist Apparu à la fin de 2009 (voir notre article ci-contre du 10 novembre 2009). Mais, dans une analyse sur la question d'avril 2011, elle redoute que les services déconcentrés de l'Etat restent "braqués dans une logique de rationalisation des coûts, proposant des solutions de logement provisoires (résidence sociale, intermédiation locative...) et un accompagnement restreint car uniquement centré sur la problématique logement (et donc pas dans une approche globale), qui ne saurait être suffisant pour l'insertion durable des personnes les plus vulnérables". Un point d'accord toutefois entre l'Etat et les associations : dans sa note, la Fnars estime que "la déclinaison de ce concept doit aussi passer par une phase d'expérimentation avant d'en envisager la généralisation".
Une réunion de lancement de la démarche, rassemblant tous les territoires-pilotes, aura lieu le 8 novembre, afin de "présenter plus précisément les objectifs, les méthodes et le calendrier de mise en oeuvre" de l'expérimentation.
