Des sites Natura 2000 mieux protégés ?

Une instruction ministérielle invite les préfets à recenser les sites Natura 2000 pour lesquels ils doivent adopter "sans délai" des mesures complémentaires pour encadrer l’utilisation de produits phytopharmaceutiques. La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) vient par ailleurs de décider que les travaux de protection des forêts contre les incendies conduits dans les zones spéciales de conservation ne sont pas dispensés de l’évaluation préalable de leurs incidences sur le site.

Si les sites Natura 2000 ne sont pas mentionnés dans la stratégie nationale biodiversité 2030 qui vient d’être adoptée (voir notre article du 27 novembre), et seulement évoqués çà et là dans le classeur des fiches mesures de cette dernière, ils n’en sont pas moins au cœur de l’actualité en cette fin d’année. 

Instruction ministérielle pour encadrer les produits phytopharmaceutiques

Plus d'un an après la publication du décret du 28 novembre 2022 relatif à l’encadrement de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques dans les sites Natura 2000 (voir notre article du 30 novembre 2022), une instruction aux préfets des ministres de l’Agriculture et de la Transition écologique, ainsi que de la secrétaire d’État à la biodiversité, vient préciser la mise en œuvre de ce texte. Pour mémoire, pris sur injonction du Conseil d’État (voir notre article du 17 novembre 2021), ce texte habilite les préfets à encadrer ou interdire l’utilisation des produits phytopharmaceutiques dans les espaces terrestres des sites Natura 2000 lorsque les mesures prévues par les contrats et chartes ne permettent pas d’atteindre les objectifs de conservation ou de restauration des habitats naturels et des espèces. 

Dans leur instruction, les ministres invitent les préfets à procéder "sans délai" – à tout le moins, puisque le décret était d’application immédiate – au recensement des sites concernés et à l’examen des mesures existantes, pour compléter ces dernières autant que de besoin. Un guide méthodologique, joint en annexe, les aidera à s’assurer que les mesures idoines sont bien mises en œuvre, parmi lesquelles figurent les mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec), l’aide à la conversion à l’agriculture biologique, les paiements pour services environnementaux, les obligations réelles environnementales ou encore les baux ruraux environnementaux.

Mission leur est également confiée de s’assurer de la disponibilité des crédits des financeurs pour mettre en œuvre ces mesures, et de partager l’ensemble des informations avec les conseils régionaux, qui ont la compétence de la gestion des sites Natura 2000 depuis le 1er janvier dernier (voir notre article du 6 janvier).

Pas d’opération de protection contre les incendies sans évaluation

Par ailleurs, une décision du 7 décembre de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) vient de préciser que les activités exercées afin d’assurer l’entretien des infrastructures de protection des forêts contre les incendies dans une zone forestière désignée comme zone spéciale de conservation ne sont pas dispensées de l’évaluation de leurs incidences sur le site – sauf si elles figurent déjà au nombre des mesures de conservation déjà arrêtées. Ces activités ne peuvent donc être engagées avant l’accomplissement de cette procédure.

La Cour précise que cette évaluation préalable est obligatoire même lorsque les travaux sont exigés par la réglementation nationale en matière de prévention des risques d’incendies de forêts. Seul un "risque actuel ou imminent portant préjudice à la préservation de ce site" permet d’y déroger, frontière qu’il sera sans doute en pratique malaisé de tracer.

La Cour précise enfin que l’État doit adopter des mesures afin de remédier aux éventuelles incidences importantes sur l’environnement entraînées par des travaux exécutés sans évaluation préalable et à réparer le dommage causé par ces derniers. Avec un bémol : l’État n’est pas obligé d’exiger des particuliers la réparation d’un tel dommage, dans le cas où il leur serait imputable.