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Congrès des maires - Des idées originales pour éviter la disparition des commerces de proximité

Pour pallier la disparition des commerces de proximité, au-delà des dispositifs nationaux de redynamisation, les élus regorgent d'idées, comme en a témoigné l'atelier qui s'est tenu sur le sujet le 1er juin 2016, dans le cadre du Congrès des maires.

A l'occasion d'un atelier sur le commerce de proximité et les nouveaux outils de redynamisation, organisé le 1er juin dans le cadre du Congrès des maires 2016, Jacques Depieds, maire de Mane, et président de la communauté de Haute-Provence (Alpes-de-Haute-Provence), a fait part d'une pratique originale mise en place chez lui. "Beaucoup d'élus avaient des difficultés pour garder les exploitants de commerce sur leur territoire, car ceux-ci créaient le commerce, développaient l'activité mais ne tiraient pas profit de tout ça, car il s'agissait de délégations de service public qui prenaient fin au bout de trois à quatre ans", explique-t-il à Localtis. L'idée a alors germé de proposer aux exploitants des commerces d'acquérir, chaque année, une partie du fonds de commerce (un neuvième chaque année, pendant neuf ans, pour être propriétaire de l'ensemble au bout des neuf années). "Si l'exploitant vend au bout de deux ans, le commerce vaut 2/9e de sa valeur réelle", détaille Jacques Depieds. Un choix osé et original, qui permet à la communauté, qui comprend huit villages, dont trois de moins de 150 habitants et un de 50 habitants, de bénéficier de commerces actifs et pérennes. Des boucheries, boulangeries et deux bistrots de pays ont ainsi été installés, dont un dans le village de 50 habitants, et d'autres sont en projet.

Les "pertes substantielles" du Fisac

"La collectivité n'a pas vocation à intervenir dans le secteur marchand, sauf en cas de défaillance", a souligné le président de la communauté de Haute-Provence lors de l'atelier. Il identifie trois facteurs clés de succès : une forte implication des élus, la recherche d'exploitants de qualité et la recherche de financements publics pour réduire le coût des loyers. Le but de la démarche est que les exploitants de commerce restent sur place et y trouvent un intérêt. Un système qui fonctionne plutôt bien à l'heure actuelle sur ce territoire très rural.
D'autres élus, comme Jean-Loup Metton, maire de Montrouge, ont utilisé d'autres moyens. La mairie de Montrouge, souvent citée en exemple, a racheté les pieds d'immeuble par l'intermédiaire d'une société d'économie mixte et de la délégation du droit de préemption, rendue possible dans le cadre de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notr), pour installer les commerces qu'elle souhaite. Mais "nous avons besoin de fonds propres pour racheter les pieds d'immeuble", a-t-il signalé durant l'atelier, insistant sur les "pertes substantielles" subies par le fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac) censé aider les maires dans ce domaine. Le Fisac a été réformé dans le cadre de la loi "artisanat, commerce et très petites entreprises" du 18 juin 2014. Il fonctionne dorénavant selon une logique d'appels à projets, pour rompre avec celle de guichet, et sur la base de critères parfois jugés trop sélectifs.
Des moyens sont aussi débloqués par la Caisse des Dépôts, dans le cadre des conventions "Ville de demain", lancées en mars 2016 (voir notre article ci-contre du 4 avril 2016). "Nous voulons d'abord nous associer à la dynamique des projets, a précisé Michel-François Delannoy, de la direction du réseau et des territoires de la Caisse des Dépôts, via des moyens d'ingénierie spécialement dédiés à l'accompagnement des projets, mais l'entrée dans le capital de sociétés d'économie mixte est un des leviers que nous avons prévu d'utiliser, à partir d'initiatives existantes ou en créant des outils adaptés." La première de ces conventions a été signée à Libourne, le 19 mai. Mais à une échelle plus petite, la Caisse des Dépôts a aussi décidé de s'impliquer dans des territoires de plus petite taille, avec des conventions "Centres-bourg de demain". La première d'entre elles a été signée le 31 mai dans le cadre du Salon des maires, avec Louis Pautrel, le maire de Le Ferré, une commune bretonne de 700 habitants.

Le transfert de la politique locale du commerce

Lors de cet atelier, de nombreux élus se sont interrogés sur la portée de la loi Notr quant à la possibilité de transférer la compétence "politique locale du commerce" à l'intercommunalité. Sur ce sujet, les avis restent partagés. Certains, comme le maire de Lourdes, Josette Bourdieu, également coprésidente du groupe de travail Développement économique, commerce et tourisme de l'Association des maires de France (AMF), ou le maire de Montrouge, sont plutôt pour ce transfert. "La zone de chalandise ne correspond pas à la zone communale, ce n'est peut-être pas idiot d'avoir une vision plus large", a ainsi signalé Jean-Loup Metton. D'autres ne souhaitent pas aller dans ce sens. "On ne va pas se laisser dépouiller de notre politique du commerce", a pour sa part commenté Philippe Laurent, maire de Sceaux et secrétaire général de l'AMF. "Ces compétences sont transférables mais ce n'est pas obligatoire, a souligné Annick Pillevesse du service Conseil juridique et documentation de l'AMF, et si une intercommunalité décide de récupérer cette compétence, il faudra définir le périmètre, et les activités qu'elle récupère. Pour le moment, nous n'avons pas de visibilité sur le sujet. La loi est assez muette sur ce qu'on met sous les termes de 'politique locale du commerce'."

 

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