Collectivités - Des chiffres et des hommes
La direction générale des Collectivités locales publie l'édition 2011 de son recueil statistique "Les collectivités locales en chiffres". Le format a de quoi décourager le plus téméraire des lecteurs : 148 pages de tableaux auxquels sont adjoints des résumés thématiques portant sur la population, les finances, les élus, le personnel des communes, intercommunalités, départements et régions. Pourtant, ce serait un tort de négliger cet outil qui offre une vue globale sur la situation des collectivités aujourd'hui... et fournit des réponses aux questions suivantes : quels sont les départements où vivent le plus de personnes âgées ? Combien y a-t-il de femmes maires en France ? Les dépenses des collectivités en matière d'éducation augmentent-elles depuis 1980 ? Les agents bretons sont-ils plus ou moins nombreux que les agents aquitains ? Quel est le syndicat majoritaire dans la territoriale ?
Où sont les vieux, où sont les jeunes ?
Reprenons du début : les 64 millions de Français vivent toujours dans 36.680 communes. Alors que depuis vingt ans, les périphéries des villes étaient les principales bénéficiaires de la croissance démographique, désormais tous les territoires en bénéficient, y compris les zones rurales. Dans le Nord, l'Est et les grandes villes, l'augmentation de la population provient essentiellement des naissances. Au contraire, le Sud et l'Ouest croissent par l'arrivée de personnes adultes. Certaines régions sont plus jeunes que d'autres : ainsi en 2009, le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie comptent 26% d'habitants de moins de 20 ans contre seulement 20% à 22% en Midi-Pyrénées, Limousin, Corse ou Aquitaine. Les taux de chômage en 2009 s'échelonnent de 7% en Bourgogne ou Languedoc-Roussillon à plus de 10% en Basse-Normandie, Midi-Pyrénées et Pays-de-la-Loire.
213 milliards de dépenses
Une fois posé ce cadre démographique, le rapport se concentre sur les questions financières. En 2009, les collectivités ont dépensé 213 milliards d'euros répartis ainsi : 42% par les communes, 15% par les intercommunalités, 31% par les départements, 13% par les régions. Les communes consacrent une part plus importante de leur budget que les départements à l'investissement : un tiers contre un quart. Cet écart s'explique par des compétences différentes ainsi que par l'augmentation très importante ces dernières années des budgets sociaux (voir les séries temporelles, p. 132 à 142). Ainsi, depuis 1998, les dépenses totales des départements ont doublé, passant de 36 à 68 milliards. Mais le RMI/RSA et l'APA ne sont pas la seule cause de cette augmentation : les sommes dépensées pour servir ces prestations représentent aujourd'hui autour de 20% des dépenses départementales. Le lecteur intéressé pourra également regarder avec attention les tableaux de la page 134 où sont décomposées les dépenses des collectivités par fonction. Avec toutes les précautions méthodologiques d'usage, on constate une forte augmentation en volume du poste logement et développement urbain : en 1998, 15 milliards d'euros étaient dépensés sur cette fonction par les collectivités. On atteint aujourd'hui 34 milliards d'euros par an. La protection de l'environnement progresse moins vite que ce qu'on aurait pu attendre, avec une quasi-stagnation en pourcentage (de 6 à 6,8% des dépenses en dix ans).
Ressources : moitié Etat, moitié fiscal
Trois sources de financement de ces 228 milliards de dépenses : la fiscalité (110 milliards), les apports de l'Etat (99 milliards) et, à la marge, l'emprunt. Les ressources fiscales ont augmenté en 2009 à peu près dans les mêmes proportions qu'en 2007 et 2008 (+4.6%). En raison de la crise, les collectivités ont anticipé la chute de leurs ressources et ont augmenté le taux des quatre taxes principales (habitation, foncier bâti, foncier non bâti, professionnelle). Si l'on exclut la taxe professionnelle, remplacée en 2010 par une compensation de l'ordre de 32 milliards d'euros, le produit des trois taxes ménages a connu une hausse de 4,7% entre 2009 et 2010, due pour les deux tiers à l'évolution des bases et pour un tiers à l'augmentation des taux (p. 80).
Les transferts financiers de l'Etat vers les collectivités se sont élevés à 99 milliards d'euros (60 milliards de concours, 13 milliards de dégrèvement d'impôts et 25 milliards de fiscalité transférée). Sur les 60 milliards de concours, la dotation globale de fonctionnement représente 41 milliards (p. 90). Des tableaux présentent également l'évolution pour ces quatre dernières années des dotations et subventions d'équipement (dont FCTVA) ainsi que des compensations des transferts de compétence (p. 88-91).
Les collectivités, ce sont aussi des hommes
La fin du rapport est consacrée aux élus et agents territoriaux. On y apprend par exemple que 35% des 520.000 conseillers municipaux sont des femmes. Et que ce taux tombe à 13% parmi les 36.680 maires du territoire. Ces élus municipaux emploient un million d'agents sur les deux millions que compte la fonction publique territoriale. Plus des trois quarts de ces agents relèvent de la catégorie C. Les filières technique et administrative constituent plus des deux tiers des emplois territoriaux. Loin derrière viennent les filières sociales, d'animation ou médicosociale. Ces agents sont inégalement répartis sur le territoire : dans de nombreux départements du nord de la France, il y a moins de 27 agents pour 1.000 habitants. Le sud au contraire est mieux doté. Les dépenses de personnel ont très fortement augmenté depuis dix ans : en 2000 l'ordre de grandeur était de 30 milliards, en 2010 les 52 milliards ont été dépassés. Cette hausse s'explique par les transferts de compétences, l'augmentation de la population française (et donc des besoins) mais aussi par une augmentation des recrutements liés par exemple à la croissance de l'intercommunalité. Le rapport se clôt sur une synthèse portant sur les élections professionnelles de 2008 : la CGT est arrivée en tête avec 32% des suffrages exprimés, suivie par la CFDT (21%) et Force ouvrière (18%).