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Ressources humaines - Entrer dans la fonction publique territoriale aujourd'hui

L'édition 2009-2010 du rapport annuel sur l'état de la fonction publique vient d'être rendue publique. Un gros millier de pages de données et d'analyses, y compris sur la territoriale. Et sur les façons d'y accéder : concours, contrats et stages... sans oublier les transferts de personnels de l'Etat, qui contribuent toujours pour une bonne part à la hausse des effectifs territoriaux. Une hausse qui s'est d'ailleurs ralentie.

Réforme des retraites, recrutement d'intérimaires, départs vers le privé, cumuls d'activité… nos derniers articles évoquaient surtout, il faut bien le dire, des voies de sortie de la fonction publique. Pourtant, en 2008, près de 40.000 personnes, toutes fonctions publiques confondues, ont été recrutées par concours. La publication du rapport annuel sur la fonction publique 2009-2010 est l'occasion de revenir sur les entrées dans la territoriale sous ces différentes formes : transferts de personnel, stages, contrats... et, accessoirement, concours !

Comme de coutume, ce document de plus de mille pages rassemble les statistiques les plus récentes sur les trois fonctions publiques (Etat, territoriale, hospitalière), ainsi que des études sur les points saillants de l'actualité des ressources humaines.

Une moindre hausse

1,825 million, soit 1,666 million d'équivalents temps plein, c'est le nombre d'agents qu'employaient les collectivités et leurs établissements publics au 31 décembre 2008. Parmi ces agents, 1,316 million de titulaires, 285.000 non-titulaires et 55.000 assistantes maternelles. Toujours fin 2008, les communes employaient 1,030 million d'agents (56,5%), les départements en comptaient 281.000 (15,4%) et les régions 72.000 (4%). Côté EPCI à fiscalité propre, ils étaient 149.000 (8,2%), et pour les autres établissements intercommunaux, 70.600 (3,9%).

Au delà de ces chiffres, ce sont surtout les évolutions – et leurs causes – qui sont intéressantes et pourraient bien donner quelques arguments aux élus locaux régulièrement accusés de ne pas maîtriser leurs effectifs. Et ce, même si suite à ce rapport annuel, le député Marc Laffineur vient précisément de diffuser un communiqué s'étonnant que "les effectifs des régions ont explosé alors même que l'Etat met tout en oeuvre pour réduire la dépense publique".

Certes, l'emploi dans la fonction publique territoriale (FPT) a continué de croître en 2008… mais dans une proportion moindre. Entre 2007 et 2008, on enregistre ainsi 3,9% de hausse des effectifs, contre 5,2% l'année précédente. Une moyenne qui n'a en réalité pas beaucoup de sens, entre les effectifs des communes, qui n'ont augmenté que de 0,9%, et ceux des régions qui se sont envolés de 34,5% (et même 38% pour les titulaires), en passant par ceux des départements grimpant de 14,3% (20% pour les titulaires).

Régions et départements : un tiers de "transférés"

La principale raison de cette courbe ascendante ne peut guère être imputée aux collectivités elles-mêmes : il s'agit bien des transferts de personnels hérités de l'acte II de la décentralisation, toujours d'actualité en 2008. Le rapport annuel est clair quant au mécanisme en jeu : "Sur l'année 2008, on décompte 21.000 adjoints techniques territoriaux et 26.800 adjoints techniques territoriaux des établissements d’enseignement de plus dans la fonction publique territoriale, pour l'essentiel des agents titulaires. Dans le même temps, environ 27.000 titulaires de catégorie C du ministère de l'Education nationale (adjoints techniques des établissements locaux d’enseignement) et 17.000 titulaires du ministère de l'Ecologie (essentiellement des agents d'exploitation et chefs d'équipe des travaux publics de l'Etat) quittent la fonction publique d'Etat [FPE]."

Au total, début 2009, un tiers des agents des régions et départements étaient de purs produits de l'acte II. Et d'autres transferts de l'Etat vers la territoriale sont en cours. Ainsi, d'ici fin 2010, "90.000 agents TOS et 30.000 agents du ministère de l'Equipement devront être transférés sous gestion de la fonction publique territoriale", note le rapport.

Etre stagiaire dans la fonction publique

Un agent territorial sur cinq est non titulaire mais cette proportion varie fortement suivant le métier exercé : ainsi, on trouve 60% de contractuels dans la filière animation, 30% dans la sphère culturelle, mais seulement 12% dans la filière administrative (t.1, p.43). Des écarts similaires apparaissent dans la répartition de chaque filière d'emploi entre les catégories A, B et C. Ainsi, 17% des emplois administratifs sont occupés par des cadres A contre seulement 3% dans la filière technique (t.1, p.51). Si ces proportions ne surprendront pas les agents employés depuis longtemps dans la territoriale, ils n'ont cependant rien d'évident pour les jeunes qui terminent juste leurs études. L'un des moyens de mieux connaître les métiers de la fonction publique est - outre une visite du site du Centre national de la fonction publique territoriale et une lecture attentive de ce rapport annuel - d'y trouver un stage : 20% des jeunes sortis en 2004 du système éducatif  ("génération 2004") et étant, en 2007, employés dans l'une des trois fonctions publiques y avaient effectué le stage le plus long de leur cursus. Le fait d'avoir effectué un stage dans la fonction publique augmente la probabilité d'être employé dans la fonction publique territoriale quelques années plus tard (t.2, p.22). Seul un stage sur trois est indemnisé (les données étant antérieures au décret 2009-885 du 21 juillet 2009).

Les premières années : contrat, chômage, contrat, temps partiel….

Stage ou pas, trois ans après leur sortie d'études, 14% des jeunes de la génération 2004 travaillent dans la fonction publique, dont un tiers sous contrat à durée déterminée. La fonction publique territoriale est plus ouverte que l'Etat ou l'hospitalière aux différents niveaux de formation : 47% des jeunes qui y travaillent ont un diplôme inférieur ou égal au bac (t.2, p.25). Mais le trait le plus caractéristique est le passage très fréquent par la case "contrat" et son corollaire, le chômage, avec la possibilité ensuite de devenir titulaire. Les jeunes employés dans la fonction publique territoriale ont des parcours d'insertion "comparables à ceux observés dans le secteur privé", comprendre aussi mouvementés. 

Ils travaillent également souvent à temps partiel ou incomplet : en moyenne 28,3% des jeunes employés dans la FPT travaillent à temps partiel. Ce taux nettement supérieur à celui des autres fonctions publiques est élevé, y compris chez les hommes : 24% (contre 31% pour les femmes). Ces temps de travail réduits sont contraints : trois sur quatre souhaiteraient travailler à temps plein. Contrepartie d'une certaine façon de ces temps de travail réduits, les jeunes employés dans la FPT subissent moins souvent que leurs collègues d'Etat des mobilités géographiques.

Le concours, et après

Tous ceux qui envisagent de passer des concours (externe, interne, troisième concours) liront naturellement avec attention les pages 205 et suivantes du tome 1 du rapport annuel : ils y trouveront des données chiffrées sur les recrutements des trois fonctions publiques (nombre de postes, nombre de candidats, évolution des taux de sélectivité…). Ils apprendront par exemple qu'environ 40.000 personnes ont été recrutées (concours externe et troisième concours) dans les trois fonctions publiques en 2008, contre 60.000 par an en moyenne au début des années 2000. A lire également, pour tous ceux qui s'interrogent sur l'écart entre la réussite au concours et la titularisation (t.1, p.79-85), une étude sur ce que deviennent les lauréats du concours de rédacteur territorial 2007 du CIG grande couronne : quinze mois après la publication des listes d'aptitude, 81% des 921 lauréats ont été nommés. Très souvent (dans 80% des cas) dans leurs collectivité d'origine : sept sur dix y étaient déjà titulaires, les autres principalement contractuels. L'enquête confirme que les lauréats du concours externe sont nombreux à ne pas être réellement "externes" : 73% occupaient déjà un poste au sein de la collectivité qui les a nommés, soit comme titulaires de catégorie C, soit comme contractuels. Quant à ceux qui n'ont pas été nommés deux ans après leur inscription sur liste d'aptitude, la grande majorité travaille (73%), souvent dans la fonction publique, et parfois sur un poste d'attaché.

Et au fait, les salaires ?

Enfin, nul doute que le volet intitulé "les rémunérations dans les trois fonctions publiques" (t.1, p.89-126) pourrait intéresser certains. Il faut regarder au moins le graphique p.96 qui permet de comparer, certes avec toutes les limites de ce genre d'exercice, les salaires annuels nets moyens du privé et du public pour les différentes classes d'âge. Ces comparaisons sont à effectuer avec précaution soulignent les statisticiens de la direction générale de l'Administration et de la Fonction publique (DGAFP) : "Les écarts salariaux observés sont en grande partie attribuables aux différences entre les conditions d'emploi (statuts, quotités de travail), entre les structures de qualification et entre les structures par sexe et par âge." Ainsi, si la fonction publique d'Etat affiche en 2008 un salaire net moyen de 2.328 euros alors que celui de la territoriale ne s'élève qu'à 1.743 euros, cela s'explique notamment par le fait qu'il y a plus de cadres A dans la FPE (poids des enseignants), davantage d'employés et d'ouvriers dans la FPT. A ne pas oublier non plus l'effet des catégories et des âges : ainsi, pour les agents de catégorie C de la FPT, le salaire annuel net moyen des moins de 30 ans est de l'ordre de 15.000 euros, celui des quinquagénaires de 19.000 euros.

 

Hélène Lemesle et Claire Mallet

 

Référence : DGAFP, rapport annuel sur la fonction publique (2009-2010).