Réforme de la fiscalité - La suppression de la taxe professionnelle ne fait pas l'affaire des villes moyennes
Comme les autres élus, les présidents des intercommunalités structurées autour d'une ville moyenne sont assez inquiets pour l'évolution des ressources de leurs territoires, depuis que la réforme de la fiscalité locale a rebattu les cartes. Jusqu'à présent, leurs craintes ne reposaient que sur les études menées en rangs dispersés par les communautés. Mais, pour la première fois, une étude réalisée par un cabinet spécialisé, pour la Fédération des maires des villes moyennes (FMVM), vient confirmer qu'ils n'ont pas tort de s'inquiéter. Globalement, les 155 entités faisant l'objet de l'étude (essentiellement des communautés, mais aussi quelques villes) vont accuser un manque à gagner de 160 millions d'euros entre 2011 et 2015, à cause de la réforme.
En supposant que sur la période, la croissance annuelle des bases de taxe professionnelle serait la même qu'entre 2002 et 2009, le cabinet Ressources consultants finances calcule une progression annuelle du produit de taxe professionnelle de 3,3%. En revanche, en fondant les perspectives d'évolution des ressources de taxe d'habitation et de contribution foncière des entreprises (CFE) sur les évolutions constatées ces dernières années et en reprenant les hypothèses de Bercy sur la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), les auteurs de l'étude parviennent à un rythme de croissance des nouvelles ressources de 2,6% par an. La différence annuelle serait donc de 0,7%. Soit, au final, une perte de recettes de 160 millions d'euros sur 5 ans.
Une grosse majorité de perdants
Les communautés de villes moyennes apparaissent particulièrement pénalisées par la réforme, si on compare leur situation à celle de l'ensemble des communautés de France. Les villes et groupements de villes moyennes qui perçoivent une dotation de garantie, gelée dans le temps, en compensation de la perte d'une partie de leur matière fiscale, sont 56% - alors que si l'on observe l'ensemble des communautés françaises, seules 27% d'entre elles voient leur matière fiscale reculer. De plus, ces villes et groupements de villes moyennes n'accusent pas des pertes légères : ils verraient globalement leurs ressources progresser de 2,1 % par an, contre 3,2 % si la réforme n'avait pas été mise en œuvre. Et les compensations (DCRTP et FNGIR) pèseraient 11,5% de leurs ressources, soit près de trois fois plus que ce qu'elles représentent pour l'ensemble des communautés.
Dans ce contexte, la plupart des communautés de villes moyennes pénalisées vont avoir beaucoup de peine à combler le manque à gagner. Si elles veulent obtenir le montant de ressources qu'aurait procuré la taxe professionnelle, ces communautés doivent augmenter chaque année de 2,3% leurs taux de taxe d'habitation et de contribution foncière des entreprises et relever dans la même proportion leur tarif de taxe sur les surfaces commerciales (Tascom).
La situation sera beaucoup plus rose pour les 44% de villes et groupements de villes moyennes qui vont tirer leur épingle du jeu en voyant leur matière fiscale prendre de l'ampleur. Leurs ressources progresseraient ainsi de 3,4% par an, soit 0,3% de plus qu'en l'absence de réforme.
Pleine d'enseignements pour le moyen et le long terme, l'étude de la FMVM ne remplace pas les données officielles qui se font attendre. Ne pouvant toujours pas s'appuyer sur des chiffres précis, les édiles des villes moyennes se sont interrogés récemment "sur la possibilité de voter des budgets rigoureux" d'ici le 30 avril prochain.