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Transports - Des autopartages conduits par des coopératives

Pour louer des voitures en libre-service, plusieurs collectivités apprécient un statut juridique original : la société coopérative d'intérêt collectif (Scic), qui permet de réunir usagers et salariés autour du projet.

Se partager quelques voitures entre habitants, plutôt que de posséder chacun son propre véhicule et ses contraintes ? A Bordeaux, l'idée a germé entre citoyens ; elle a pris corps, dès 2001, sous la forme d'une association. Cinq ans plus tard, cependant, les bénévoles n'avaient encore rassemblé que 30 adhérents, autour de trois voitures... Ils sont parvenus à relancer leur "autopartage" en adoptant un nouveau statut : la société coopérative d'intérêt collectif (Scic). "Il s'agit d'une entreprise privée, mais à but non-lucratif", explique son directeur, Nicolas Guenro. "Et la Scic est parfaite pour mettre en lien un projet avec son territoire, et en y impliquant l'ensemble des acteurs concernés, qu'ils soient publics ou privés !" Désormais, Autocool compte 1.100 utilisateurs et 45 véhicules...

Démocratique

Cette forme de coopérative ne transporte pas que les automobilistes bordelais. Avec les deux services lancés cette année à Tours et en Lorraine, le cadre de la Scic soutient désormais neuf systèmes d'autopartage à travers la France. Et la formule y paraît tout autant adaptée. Prévu par la loi 2001-624 du 17 juillet 2001, le statut est en effet réservé à "la production ou la fourniture de biens et de services d'intérêt collectif". Et cette société rassemble au moins trois catégories d'associés : ses bénéficiaires, ses salariés, et en option possible les collectivités territoriales et leurs groupements – qui ne doivent pas détenir plus de 20% du capital. "Cela permet de réunir autour d'un objectif commun des acteurs différents", apprécie Emilie Calcoen, à la mairie de Lille. "Chacun peut ainsi partager ses compétences, tout en restant sur un pied d'égalité – grâce au principe 'une personne = une voix'. Ce fonctionnement démocratique est à l'image de l'autopartage, qui offre de la mobilité à tous !" La ville a d'ailleurs suggéré elle-même le statut de Scic, pour ce dispositif de location proposé ici par l'entreprise Keolis.
La coopérative peut aussi combler les intérêts spécifiques des collectivités. A Tours, l'autopartage a été directement initié par le syndicat intercommunal des transports en commun : "La Scic nous permettait de ne pas porter nous-mêmes le dispositif et de limiter nos risques juridiques et financiers", souligne Agnès Thibal, chargée de mission au développement durable. De plus, les collectivités ont ainsi voix au chapitre ! "Le développement d'un autopartage est très compliqué sans leur soutien", relève à Bordeaux Nicolas Guenro, par ailleurs cogérant du réseau France autopartage. "Il me paraît donc normal qu'elles participent aux décisions."

Appuis

De fait, les appuis des collectivités peuvent être multiples, comme l'illustre Angélique Bosquet, directrice à la mobilité et au stationnement, à la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise : "Nous soutenons Auto2 par de la communication sur le dispositif, ainsi que par une subvention d'investissement de 30.000 euros. Car un autopartage met du temps à rencontrer sa clientèle." L'agglomération n'a en revanche pas souhaité, dans un premier temps, devenir elle-même sociétaire. Mais elle offre aussi son appui méthodologique, ainsi que des places en parking pour les véhicules partagés. "Il faut en outre des politiques de stationnement assez contraignantes pour que l'autopartage fonctionne", ajoute Nicolas Guenro. La voiture doit devenir suffisamment insupportable pour éveiller des envies d'abandon.

Olivier Bonin

Emilie Calcoen, responsable de mission "plan de déplacement urbain" à la mairie de Lille : "Nous avons adhéré pour nos propres personnels"
"Depuis 2007 nous apportons une subvention d'exploitation de 15.000 euros par an à l'autopartage Lilas, et nous sommes entrés dans son capital à hauteur de 10.000 euros. Et en 2011, nous avons en outre adhéré au service pour nos propres personnels, dans le cadre de notre plan de déplacement d'administration. Notre objectif est de soutenir cette entreprise d'utilité sociale, mais aussi de rationaliser notre propre parc automobile. Nous avons ainsi pu réduire de 60 à 50 unités notre flotte de petits véhicules de service. 130 agents se sont inscrits à l'autopartage ; certains utilisaient trop peu leur voiture, et d'autres n'en avaient pas. Une station est installée juste devant la mairie... Je n'ai eu aucun retour négatif de nos usagers !"
O.B.