Emploi - Coopératives : vers une reprise progressive du capital par les salariés
"Nous avons besoin d'un nouveau statut et d'un outil financier qui nous permettent de racheter petit à petit le capital des entreprises." Noémie de Grenier, de la coopérative Coopaname à Aubervilliers, où Benoît Hamon s'est rendu le 7 septembre 2012, témoigne du besoin urgent pour les coopératives de disposer d'un nouveau statut leur permettant de reprendre des entreprises. Le ministre de l'Economie sociale et solidaire a présenté le 5 septembre son projet de loi sur l'ESS qui doit comprendre de telles dispositions. Objectif : créer un nouveau modèle de coopérative pour faciliter la reprise d'entreprises sous forme de sociétés coopératives ouvrières de production (Scop) et sauver ainsi des entreprises.
Chaque année entre 50.000 et 200.000 emplois sont détruits faute de repreneur. Transformer l'entreprise en coopérative est un des moyens de faire perdurer ces emplois. Mais pour ce faire, les salariés repreneurs doivent posséder d'emblée une majorité du capital social, ce qui est souvent difficile. "Jusqu'à maintenant, l'entreprise qui veut se transformer en coopérative le fait au dernier moment, quand elle est en liquidation, il faut alors aller très vite. Comment faire pour qu'elle puisse devenir une coopérative avant que ce soit trop tard ?", demande Noémie de Grenier, qui espère que le gouvernement se basera sur le rapport sénatorial, publié le 25 juillet 2012 sur les coopératives ("Un atout pour le redressement économique, un pilier de l'ESS"). Ce rapport mettait en effet en avant les évolutions envisageables dans ce domaine, comme l'instauration d'une période transitoire de cinq à six ans durant laquelle, bien que les salariés restent minoritaires, l'entreprise reprise conserve le statut de Scop et son régime fiscal.
L'avantage est que ce type d'entreprises résiste mieux à la crise. Le nombre de coopératives d'artisans a ainsi augmenté de 35% en sept ans entre 2005 et 2011, et le nombre annuel de créations de coopératives de ce type a même connu une accélération malgré la crise. Même constat avec les Scop, dont le nombre a augmenté de 36% en dix ans.
65% des droits de vote pour les salariés
Dans le projet du ministre, les salariés pourraient posséder 65% des droits de vote pendant plusieurs années sans pour autant être majoritaires, le temps de constituer progressivement les fonds propres nécessaires pour devenir majoritaires en capital. Une solution qui permettrait de transformer plus facilement les entreprises en coopératives. "Mais plus largement, on a besoin d'éducation autour des coopératives, c'est une question de culture", assure Noémie de Grenier. Dans ce domaine, Benoît Hamon compte agir. A l'occasion de son déplacement à Aubervilliers, il a annoncé qu'il allait proposer au ministère de l'Education nationale une convention entre les deux ministères pour que les programmes et les manuels scolaires puissent montrer qu'il existe une diversité économique dont l'ESS. Il a également mis en avant les points sur lesquels le gouvernement voudrait travailler dans le secteur de l'ESS : le développement de programmes pluriannuels contractualisés entre l'Etat, les collectivités et les acteurs du secteur pour donner plus de visibilité et de stabilité, les problèmes de concurrence entre les associations et les acteurs privés, le vieillissement des salariés du monde associatif, et l'évolution du statut du bénévole pour enrayer la baisse du bénévolat. La question de la réévaluation de l'aide au poste pour les réseaux d'Insertion par l'activité économique (IAE) devrait également revenir sur la table. Cette subvention n'a pas été réévaluée depuis 1999 ! Mais le gouvernement n'a pas fait ce choix pour le moment. "Dans le contexte budgétaire actuel, on a préféré financer des nouveaux postes plutôt que revaloriser ceux qui existent déjà. Mais c'est une discussion que nous aurons", a précisé le ministre le 7 septembre.