Régions - CPER : une révision à la marge prévue à l'automne 2016
D'ici fin juillet, les négociations autour de la révision des contrats de plan Etat-région (CPER) 2015-2020 devraient être terminées, pour une officialisation des décisions à l'automne 2016. La révision des CPER est prévue de longue date. Dès décembre 2014, une circulaire avait été transmise aux préfets, leur indiquant de prévoir une clause de revoyure pour chaque CPER afin de prendre en compte les nouveaux périmètres et nouvelles compétences des régions issus de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notr). La révision se fait toutefois à périmètres constants.
Tels que signés en 2015, les CPER représentent au total un investissement de plus de 30 milliards d'euros, complétés par l'apport des fonds structurels européens à hauteur de 27 milliards d'euros. L'Etat devrait mobiliser 14,3 milliards, les régions 15,2 milliards et les collectivités infrarégionales 900 millions. Les CPER s'organisent autour de sept volets thématiques* et un volet territorial.
A la veille de la révision, certains présidents de conseils régionaux se sont fait entendre, demandant des renégociations en profondeur. Ce fut notamment le cas de Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France, ou de Bruno Retailleau, président de la région Centre-Val de Loire, qui souhaitait un rééquilibrage des financements. D'après l'Association des régions de France (ARF) toutefois, "il n'y a pas de heurts violents, cela négocie, il n'y a rien de très particulier."
Un enjeu surtout pour les régions fusionnées ?
Un moment de crispation a certes récemment eu lieu, au cours des mois de mai et juin, les financements supplémentaires accordés à l'automne 2015 par l'Etat pour l'enseignement supérieur et la recherche (180 millions d'euros) n'étant pas débloqués. "Cinq régions étaient concernées, explique-t-on à l'ARF, nous sommes montés au créneau et c'est rentré dans l'ordre, avec la demande du Premier ministre à Bercy de débloquer les fonds."
Au-delà de cette demande finalement satisfaite, la révision des CPER prévoit très peu de marges de manœuvre. "Dès le départ, il a bien été signalé par le Premier ministre que la révision se ferait à budget constant et sans fongibilité entre les thèmes ; si de nouvelles opérations sont décidées, il faut en retirer d'autres", détaille l'ARF.
Quelques budgets supplémentaires ont toutefois été accordés. "Des augmentations à la marge, histoire de mettre de l'huile dans les rouages", assure l'ARF. En région Grand Est par exemple, 80 millions d'euros supplémentaires devraient être prévus, dont 50 millions d'euros de la région et 30 millions d'euros de l'Etat. "Au départ, l'Etat ne devait rien mettre en plus", explique François Charlier, adjoint au directeur général des services de la région.
Globalement, d'après François-Nicolas Sourdat, directeur général délégué à la direction générale des services de la région Bretagne, l'exercice de la révision concerne davantage les régions qui ont fusionné, et qui ont donc plusieurs CPER, deux voire trois, à regrouper en un seul, comme en Nouvelle-Aquitaine (CPER de l'Aquitaine, de Poitou-Charentes et du Limousin).
"De notre côté, le président du conseil régional a pris acte de la proposition de révision avec la même enveloppe globale. Nous n'étions pas demandeurs de la clause de revoyure. Notre préoccupation concerne la mise en œuvre effective des engagements signés, qui sont déjà très ambitieux", poursuit François-Nicolas Sourdat, précisant que de ce côté, "tout n'est pas facile car les financements sont en tension et qu'on n'est pas sûr que tout soit au rendez-vous."
L'occasion de débloquer certains dossiers
Pour des régions comme le Grand-Est qui sont issues de la fusion de trois territoires (Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine), la révision des CPER comporte davantage d'enjeux. Outre l'augmentation de 80 millions d'euros, qui permet de se focaliser sur des priorités identifiées sur le nouveau grand territoire comme la modernisation de la ligne Charleville-Givet, "la révision a permis de relancer certains dossiers, comme l'enseignement supérieur et la recherche, avec l'Université de Reims Champagne-Ardenne (Urca)", souligne François Charlier.
Ce projet de l'Urca, qui représente un montant total de 78,2 millions d'euros, dont 14,3 millions de l'Etat et 47,9 millions de la région, comprend notamment un nouveau bâtiment pour le siège de l'université et ses services centraux, un pôle santé, l'extension de l'école d'ingénieurs… Dans le projet d'avenant au CPER, la région prend la maîtrise d'ouvrage globale du programme immobilier. "En prenant la maîtrise d'ouvrage, il y a la volonté de la part de la région d'un acte fort, assure François Charlier, la révision arrive un peu tôt, car notre CPER a été signé début septembre 2015, mais elle a permis de relancer ces dossiers, comme le numérique également."
En revanche, il n'y a pas encore de réelle convergence des trois CPER issus des anciennes régions qui composent maintenant le territoire. "On reste sur la même base que les trois CPER, en faisant avancer les urgences identifiées au niveau du nouveau territoire", souligne François Charlier, qui estime que "la grande région mettra quelques années pour se faire."
Pour la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, la révision est l'occasion pour l'Etat et la région de décider du lancement à l'horizon 2020 de nouveaux projets structurants, et d'accentuer la mobilisation régionale en faveur de l'emploi et de la relance du BTP. Un protocole d'accord devrait être signé prochainement. Parmi les priorités : l'amélioration des liaisons routières et ferroviaires entre les territoires des deux anciennes régions - notamment la liaison ferroviaire entre Toulouse et Montpellier - et la reprise des études pour le lancement du débat public sur la liaison Toulouse-Narbonne (LTN), la recherche, l'enseignement supérieur et l'innovation... sans oublier le littoral, avec l'adoption dès 2017 d'un plan littoral pour concilier l'aménagement durable et la préservation du trait de côte avec le développement économique et touristique de ces territoires.
Mais pour l'ARF, la véritable révision des CPER ne se fera pas avant la fin de l'année 2017, après les échéances électorales nationales et après connaissance du nouveau cadrage budgétaire européen, les CPER pouvant jouer le rôle de variable d'ajustement pour atteindre les objectifs fixés par l'Europe en matière de déficit public.
Emilie Zapalski
* Mobilité multimodale, enseignement supérieur, recherche et l'innovation, transition écologique et énergétique, numérique, filières d'avenir et usine du futur, emploi.