Les départements en première ligne de la campagne de dépistage massif dans les Ehpad
Le ministre de la Santé a lancé une vaste campagne de dépistage du Covid-19 dans les Ehpad. Il n'est certes pas envisagé, au moins dans un premier temps, d'étendre la mesure indistinctement à l'ensemble des Ehpad. Certaines collectivités ont déjà procédé à des tests dans leurs établissements. L'Assemblée des départements de France indique que "les départements vont apporter leur concours actif à cette action de grande ampleur".
Depuis mardi, Olivier Véran a lancé une vaste campagne de dépistage du Covid-19 dans les Ehpad, en même temps qu'il annonçait la mobilisation de la réserve sanitaire afin de venir en soutien des établissements. Pour le ministre de la Santé, cela "permettra de regrouper les cas positifs au sein de secteurs dédiés au sein des Ehpad pour éviter les contaminations des autres résidents". Consulté par téléphone par Olivier Véran, Dominique Bussereau, le président de l'ADF (Assemblée des départements de France), l'a "assuré du plein et entier soutien des départements pour pouvoir mener dès demain des actions massives de dépistage dans tous les établissements", selon les propos rapportés par le ministre.
Un dépistage ciblé pour réorganiser les établissements concernés
L'enjeu est important, car les décès sont nombreux dans le secteur médicosocial. Au 7 avril, le point de situation quotidien du ministère les chiffre à 3.237 dans les ESMS (établissements et services médicosociaux), dont environ 2.500 concerneraient les Ehpad. En outre, les situations sont très variables selon les régions et, plus encore, selon les établissements, nombre d'Ehpad ne recensant encore aucun cas quand quelques-uns comptent déjà plusieurs dizaines de décès.
Présentant la mesure, Olivier Véran a expliqué : "Nous sommes en train de doubler notre capacité de tests par PCR [Polymerase Chain Reaction, ndlr], ce qui nous permet de lancer une vaste opération de dépistage des personnes les plus vulnérables, en mettant la priorité sur les personnes âgées, les personnes handicapées les plus fragiles, ainsi que les professionnels qui les accompagnent en établissement comme à domicile". Si l'objectif est bien d'enrayer la spirale des contaminations et des décès au sein des 7.500 Ehpad, le dépistage ne se fera pas à l'aveugle, mais interviendra dès l'apparition d'un premier cas (soit aujourd'hui de l'ordre de 2 à 3.000 établissements), afin d'isoler les résidents concernés et de réorganiser au besoin l'établissement en deux secteurs étanches. Visant à la fois les résidents et les salariés, il sera réalisé par des équipes mobiles équipées (combinaisons, masques intégraux...), renforcées au besoin par des médecins de la réserve sanitaire.
Il n'est pas envisagé, au moins dans un premier temps, d'étendre la mesure indistinctement à l'ensemble des Ehpad. Une dichotomie acceptée, momentanément, par l'AD-PA (Association des directeurs au service des personnes âgées). Pour Pascal Champvert, son président, interrogé par Europe 1 : "Que dans un premier temps, cela se passe dans les établissements concernés par le coronavirus, nous l'acceptons. Mais il faudra une deuxième étape, où l'on dépistera l'ensemble des personnes âgées et du personnel." L'AD-PA demande également l'extension du dépistage aux résidences services et aux résidences autonomie, mais aussi, au-delà, aux services d'aide à domicile (Saad), ce qui représenterait un total d'environ 20.000 structures.
Un message à tous les présidents de conseils départementaux
Certaines collectivités n'avaient toutefois pas attendu cette généralisation pour procéder à des tests dans leurs Ehpad. À Montrouge (Hauts-de-Seine, 50.000 habitants) par exemple, la ville a fait procéder au dépistage de l'ensemble des résidents et des salariés. Autre exemple : deux jours avant la décision d'Olivier Véran, le département des Pyrénées-Atlantiques avait déjà annoncé son intention de lancer un dépistage massif dans les Ehpad, soit environ 12.000 personnes, mais aussi de l'étendre aux Saad et aux structures de l'aide sociale à l'enfance (ASE). Même chose à Paris, où Anne Hidalgo a annoncé le 5 avril dans une interview au Parisien, le lancement, dès cette semaine, de 8.000 tests auprès des résidents et des personnels des Ehpad (la capitale comptant au demeurant assez peu d'Ehpad).
Premiers concernés par les Ehpad, les départements sont en train de donner corps à l'engagement pris par Dominique Bussereau auprès d'Olivier Véran. L'ADF a fait passer, ce mercredi, un message à tous les présidents de conseils départementaux, expliquant que "totalement mobilisés auprès de nos concitoyens les plus fragiles et aux côtés de celles et ceux qui les accompagnent dans leur vie quotidienne, les départements vont apporter leur concours actif à cette action de grande ampleur" et demandant que "dans la situation absolument dramatique que traversent ces établissements, cette mesure cruciale [soit] mise en œuvre dans les délais les plus brefs possibles".
Dans ce message, l'ADF indique que "les départements volontaires attendent du cabinet du ministre de la Santé des précisions sur les modalités concrètes de mise en œuvre de cette opération". L'ADF leur adressera, dès réception, un kit méthodologique préparé "avec le concours des sociétés savantes". En attendant, "les départements souhaitant s'engager immédiatement dans cette opération le feront sans attendre". Dans cette opération, les laboratoires départementaux d'analyse, tout récemment autorisés à pratiquer le dépistage du Covid-19 (voir notre article ci-dessous du 6 avril 2020), pourraient bien être mis à contribution.