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Formation - Cour des comptes : les contrats de professionnalisation sous-utilisés

Les contrats de professionnalisation sont restés sous-utilisés. C'est l'une des conclusions de la Cour des comptes dans son rapport annuel de 2010 rendu public ce 9 février. Ces contrats, qui sont des contrats de formation en alternance, ouverts aux jeunes de moins de 26 ans et aux adultes demandeurs d'emploi, prennent la suite de plusieurs dispositifs antérieurs qu'ils unifient (contrats de qualification, contrats d'adaptation et contrats d'orientation). Mais d'après la Cour des comptes, ils peinent à atteindre le niveau des dispositifs qu'ils ont remplacés. "93.346 contrats de professionnalisation seulement ont été conclus entre octobre 2004 et le 31 décembre 2005, alors que 165.433 contrats avaient été conclus dans le cadre des dispositifs précédents", explique les Sages de la rue Cambon. D'après les derniers chiffres communiqués par le ministère du Travail, les contrats de professionnalisation auraient subi une diminution de 18,5% en 2009 par rapport à 2008, avec 281.494 entrées, contre 289.568 l'année précédente. Et les contrats ciblés sur les salariés ou demandeurs d'emploi, obtiennent de moins bons résultats encore. "Avec 28.639 entrées en 2008, le 'contrat adultes' ne représentait que 17% du total des contrats de professionnalisation", détaille le rapport de la Cour des comptes. Parmi les explications de ce faible résultat : la modestie des incitations financières destinées à promouvoir le contrat adultes auprès des employeurs, le niveau peu élevé des rémunérations servies, qui en fait une modalité d'emploi peu attractive pour des adultes en reconversion, la difficulté pour un public adulte d'accepter un retour en formation souvent considéré comme une situation d'échec.

 

Une culture de l'alternance "pas très en vogue"

Pour Jacques Losson, directeur de la mission locale de Mulhouse, le faible développement du contrat de professionnalisation provient aussi d'une "culture de l'alternance qui n'est pas très en vogue en France". "L'alternance reste une voie par défaut, estime-t-il, alors que pour les jeunes notamment c'est la réponse la plus opportune qu'on peut leur apporter." Pour la Cour des comptes, il faut une meilleure implication de l'Etat et des partenaires sociaux dans le développement de ces contrats : "Cela suppose la mise en œuvre d'un pilotage nettement plus affirmé, s'appuyant notamment sur la généralisation des contrats d'objectifs dont le succès a pu être observé dans certaines branches ou certaines régions." La Cour cite en exemple les conventions d'objectifs annuelles mises en place en région Nord-Pas-de-Calais sous l'impulsion des services de l'Etat (direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle) et qui ont donné des résultats positifs. Un allègement du coût représenté par les contrats pour les entreprises pourrait aussi permettre un meilleur développement. "La prime de 1.000 à 2.000 euros prévue dans le cadre du plan gouvernemental pour les jeunes constitue un premier pas dans ce sens, estime le rapport. La situation des contrats adultes, dont l'un des freins au développement est le coût élevé pour l'employeur, appelle le même type de mesure."

"Ce qui manque en France, c'est surtout une véritable pratique de l'alternance, assure pour sa part Jacques Losson. Pour le moment, le chef d'entreprise ne considère pas cela comme une opportunité." La Cour des comptes s'est aussi penchée sur la période de professionnalisation, destinée aux salariés en activité, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée et créée il y a cinq ans. "Insuffisamment ciblée sur des publics identifiés comme prioritaires, mal maîtrisée par les entreprises, elle n'a pas prouvé sa valeur ajoutée au sein des dispositifs de formation en alternance", détaille le rapport qui préconise un ciblage "beaucoup plus strict sur des publics ou des objectifs prioritaires".

 

Emilie Zapalski