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Commande publique - Contrats d'emprunts : s'inspirer du Code des marchés pour bénéficier d'un effet volume ?

Aujourd'hui, l'acheteur d'une collectivité territoriale a-t-il à sa disposition les outils pour emprunter dans de meilleures conditions ?

Le 28 novembre dernier, une émission d'un montant total de 120 millions d'euros est lancée, venue s'ajouter aux quatre émissions obligataires des communautés urbaines de France qui réunissaient entre 11 et 14 communautés urbaines. Ce nouvel emprunt groupé réunit 22 collectivités dont un département et trois régions. Un contrat unique est signé par tous les contractants : chacun définit son besoin et tous reçoivent en simultané les ressources empruntées. Il n'y a entre contractant aucune solidarité. L'achat n'est pas soumis au Code des marchés. La crise financière a entraîné une baisse du volume des crédits disponibles rendant plus coûteux le recours à l'emprunt pour les collectivités locales. La réflexion engagée depuis plusieurs années connaît une nouvelle actualité : comment dégager de nouvelles ressources ? faut-il mutualiser les achats, créer de nouveaux outils pour les acheteurs des collectivités ? Le Code des marchés publics qui ne s'applique pas à ces achats, propose deux options de massification des achats : les groupements de commande et les centrales d'achats. Les acheteurs peuvent-il s'en inspirer ?

 

Contrats complexes et compétences spécifiques

La solution choisie sur l'Acuf ne s'appuie pas sur le Code des marchés même si, comme le reconnaît son délégué général, Olivier Landel, "l'emprunt a fait l'objet des procédures comparables à celle du code avec notamment une mise en concurrence". Si les emprunteurs ne sont pas solidaires, ils sont bénéficiaires des mêmes conditions de prêt : "Les agences de notation évaluent globalement la potentialité de défaut : il vaut mieux avoir un emprunteur qui représente 3% de l'emprunt et qui fait défaut qu'un client défectueux qui assume 100% de l'emprunt", estime Olivier Landel.
Du côté du Code des marchés, on trouve le groupement de commande qui permet à plusieurs acheteurs publics de coordonner et de regrouper leurs achats afin de réaliser des économies d'échelles. Pour les contrats liés à des produits financiers, il est préférable de laisser l'exécution du contrat à la charge de chacun des membres. Le coordonnateur peut se contenter de suppléer les membres du groupement pour la préparation du dossier de consultation des entreprises, de la mise en concurrence et de la sélection des fournisseurs, chaque membre étant chargé de signer et d'exécuter un marché pour ce qui le concerne. Cette solution pose néanmoins un inconvénient pour les groupements importants puisque le nombre de marchés passés est égal au nombre de membres et pour des montants financiers individuels parfois très faibles. "Avec notre solution, on a emprunté moins cher que les autres", assure le délégué général de l'ACUF. Ce système marque aussi ses limites : "Elle impose la signature de toutes les collectivités qui font chacune l'objet d'une description détaillée en tant qu'émetteur. Le fait que la notation soit une moyenne rehaussée limite l'impact de l'opération, c'est pourquoi nous sommes favorables à la création d'une agence intermédiaire-le véhicule-qui bénéficierait d'une notation triple A", commente Olivier Landel.


 

Et l'accord-cadre ?

Bien qu'elle impose une forte dose de formalisme, la combinaison accord-cadre / groupement de commande pourrait être une technique d'achat particulièrement efficace pour obtenir des prestations au meilleur coût. Au moment de la survenance des besoins, chaque adhérent sera en charge de passer ses propres marchés subséquents tout en bénéficiant des avantages liés à leur appartenance à un groupement. Dans un souci de coordination et de sécurité juridique, il peut  être envisagé d'autoriser le coordonnateur à signer les marchés subséquents, à charge pour les membres d'en assurer l'exécution. Il reste la centrale d'achat qui assure la passation, la signature et la notification de marchés publics, les personnes publiques recourant à la centrale se chargeant de leur exécution. Le recours à ce type de structure permet au pouvoir adjudicateur de ne pas procéder lui-même aux procédures de passation des marchés. L'Ugap, seule centrale d'achat généraliste et permanente, ne propose pas à l'heure actuelle de produits financiers. "Quelle que soit la solution choisie, conclut le délégué général de l'Acuf, le principe reste le même : trouver la réponse la plus souple et la moins dépensière pour dégager les meilleures marges possibles."

 

Clémence Villedieu et l'Apasp

 

La question de la soumission des contrats d'emprunts aux règles du CMP

L'article 3-5° du CMP prévoit que les dispositions du code ne s'appliquent pas aux "accords-cadres et marchés de services financiers relatifs à l'émission, à l'achat, à la vente et au transfert de titres ou d'autres instruments financiers et à des opérations d'approvisionnement en argent ou en capital des pouvoirs adjudicateurs". Un groupement ou une centrale d'achat pourrait donc s'affranchir des règles du code pour l'achat de produits financiers. Toutefois, dans un souci de sécurité juridique et afin de minimiser les risques de contentieux liés à une absence de mise en concurrence, il est fortement recommandé de se soumettre aux procédures, surtout lorsque le montant du contrat dépasse les seuils européens.