Construction : une éclaircie pour les mises en chantier, les permis de construire toujours à la peine
Le ministère de la Transition écologique a publié les chiffres du logement au 31 mars. Sur un an, ils couvrent exactement la période de la crise sanitaire, de mars 2020 à mars 2021. La baisse des permis de construire annoncée par Emmanuelle Wargon est confirmée mais le chiffre des mises en chantier est nettement meilleur. Par ailleurs, le premier trimestre montre une très légère reprise par rapport au dernier trimestre 2020, même pour les permis de construire.
Le ministère de la Transition écologique publie, dans le dernier numéro de sa lettre d'information "Stat Info", les résultats de la construction de logements au 31 mars 2021. Les chiffres présentés concernent à la fois le premier trimestre 2021 et la période d'avril 2020 à mars 2021. A la différence des résultats au 31 décembre 2020 (voir notre article du 28 janvier 2021), qui intégraient deux mois et demi d'activité soutenue pour la construction (de janvier à mi-mars 2020), les douze derniers mois écoulés couvrent donc exactement la période de la crise sanitaire, du moins jusqu'à aujourd'hui.
Les logements collectifs fortement touchés par la chute des permis
Ces trois mois de décalage ne modifient évidemment pas la tendance générale, mais apportent néanmoins quelques nuances. Comme cela apparaissait déjà, les résultats confirment le très fort recul des autorisations de logements (permis de construire). Sur les douze derniers mois (avril 2020 à mars 2021), le nombre de logements autorisés a chuté de 71.200 par rapport aux douze mois précédents (avril 2019 à mars 2020), soit un recul de 15,6% et un total de 384.300 logements autorisés sur un an. La chute est particulièrement spectaculaire sur les logements collectifs (-24,5%), alors que les logements individuels purs (maisons isolées) s'en sortent mieux (-5,2%). Ce brutal recul des permis de construire tient à plusieurs facteurs : décalage des projets des particuliers ou des promoteurs à cause de la crise sanitaire, paralysie des services des mairies chargés de l'instruction des demandes, mais aussi élections municipales (période traditionnellement peu propice à la construction) et suspension de programmes notamment par de nouveaux maires verts.
Le recul tend toutefois à s'atténuer, même si la tendance reste négative. Sur le premier trimestre 2021, le nombre de logements autorisés est ainsi en baisse de "seulement" 2,3% par rapport au dernier trimestre de 2020. Les permis de construire pour de l'individuel pur connaissent un fort rebond (+14,8%), de même que pour l'individuel groupé (lotissements, +5,7%). En revanche, les permis de construire pour des logements collectifs restent à la traîne, même si la chute ralentit un peu (-15,2%).
Enfin, si on fait abstraction de la crise sanitaire, les chiffres du premier trimestre 2021 apparaissent inférieur de 3,1% par rapport à la moyenne des douze mois précédant le premier confinement (autrement dit de mars 2019 à février 2020).
Une nette reprise des mises en chantier au premier trimestre
Si les chiffres des permis de construire correspondent à peu près à ceux qu'anticipait Emmanuelle Wargon dans son interview à BFM Business, il y a une quinzaine de jours (voir notre article du 21 avril 2021), il n'en va pas de même pour les mises en chantier. Là où la ministre du Logement évoquait une baisse de l'ordre d'"un peu moins de 10%", la baisse sur les douze derniers mois est en effet de 3,7%, avec 366.000 logements mis en chantier. A la différence des permis de construire, le recul sur les logements commencés est réparti de façon relativement similaire entre les logements individuels purs (-2,0%) et les logements collectifs (-4,6%).
Par ailleurs, les chiffres au 31 mars font apparaître un net rebond des mises en chantier sur le premier trimestre. Celles-ci progressent en effet de 11,9%, dont +19,8% pour l'individuel pur et +9,8% pour les logements collectifs. Seuls les logements individuels groupés sont à la traîne (-4,4%). Les mises en chantier sur le premier trimestre 2021 apparaissent même supérieures (+1,9%) à la moyenne des douze mois précédant le premier confinement (de mars 2019 à février 2020).
Le ministère appelle toutefois l'attention sur le fait que "les estimations des mises en chantier sont plus fragiles que d’habitude du fait des perturbations liées à la crise sanitaire" et peuvent donc "donner lieu à des révisions plus importantes qu’avant la crise". En outre, et compte tenu du décalage temporel entre permis de construire et début des travaux, les bons chiffres des mises en chantier au premier trimestre peuvent traduire un effet de rattrapage après les interruptions du premier confinement et, dans une moindre mesure, du second confinement.
De forts contrastes régionaux
En termes géographiques, toutes les régions affichent un recul des logements autorisés au cours des douze derniers mois. Seules trois d'entre elles enregistrent une baisse inférieure à 10% : Bretagne (-0,7%), Hauts-de-France (-8,6%) et Pays de la Loire (-8,9%). A l'inverse, les régions qui connaissent la plus forte chute des permis de construire sur les douze derniers mois sont aussi celles où les besoins de logements sont les plus importants : Paca (-21,8%), Auvergne-Rhône-Alpes (-21%) et Ile-de-France (-20,5%). Les permis de construire reculent également de 28,7% en Corse (où les mouvements sont accentués par l'étroitesse du marché) et de 10,3% dans l'ensemble des Drom.
Compte tenu du résultat national, la situation est plus contrastée pour les mises en chantier. Sur les douze derniers mois, celles-ci progressent fortement dans quatre régions métropolitaines : Centre-Val de Loire (+12,7%), Bourgogne-Franche-Comté (+12,5%), Bretagne (+11,5%) et Normandie (+10,9%). En revanche, quatre autres régions affichent une baisse des mises en chantier supérieure à 10% : la Corse (-24%), les Drom (-13,3%), les Hauts-de-France (-12,3%) et l'Ile-de-France (-11,2%). Les autres régions affichent toutes une baisse, mais inférieure à 10%, voire même une quasi stabilité en Nouvelle-Aquitaine, Pays de la Loire (-1,5% chacune) et en Auvergne-Rhône-Alpes (-1,8%). Il reste néanmoins que les mauvais résultats sur les permis de construire ne garantissent pas la pérennité de cette tendance à la reprise des mises en chantier.