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Urbanisme - Construction : le projet de loi d'habilitation à légiférer par ordonnances présenté le 2 mai

En attendant le projet de loi de réforme de l'urbanisme prévu d'ici l'été, le Conseil des ministres examinera le 2 mai le projet de loi habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnances pour lever certains freins à la construction de logements et favoriser la densification en zone urbaine.

Le projet de loi d'habilitation à légiférer par ordonnances, comprenant une série de mesures d'urgence visant à lever certains freins à la construction de logements et à lutter contre l'étalement urbain sera présenté en Conseil des ministres le 2 mai par la ministre de l'Egalité des territoires et du Logement, Cécile Duflot. Ce texte, inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale du 21 mai, fait suite aux annonces du "plan Investissement-Logement" présenté par François Hollande lors de son déplacement à Alfortville (94) le 21 mars. Il précède le projet de loi Urbanisme-Logement, qui contiendra des mesures structurelles nécessitant une concertation et un débat parlementaires plus longs et sera présenté en Conseil des ministres "d'ici cet été", a indiqué le ministère dans un communiqué ce 29 avril.
L'article premier du projet de loi présenté le 2 mai liste l'ensemble des mesures législatives qui feront l'objet d'ordonnances, pouvant être prises dans un délai de 4 mois à compter de l'adoption au Parlement. Il prévoit ainsi la création d'une "procédure intégrée pour le logement" pour faciliter la réalisation d'opérations d'aménagement et de construction comportant principalement des logements et considérées d'intérêt général. Cette procédure doit permettre de "diviser par trois les délais de procédure administrative", assure le ministère. Elle comportera une évaluation des incidences environnementales avant de permettre, en tant que de besoin, la mise en compatibilité et l'adaptation de plusieurs documents réglementaires en matière d'urbanisme dans des délais raccourcis par rapport aux procédures classiques. L'ordonnance précisera le champ d'application et les conditions de mise en oeuvre de cette procédure, qui ne pourra notamment pas s'appliquer dans les parcs naturels régionaux. Autre mesure devant faire l'objet d'une ordonnance : la création d'un géoportail national centralisé de l'urbanisme permettant une standardisation des données et l'accès de tous les citoyens aux documents d'urbanisme dématérialisés.

Recours contentieux : raccourcir les délais

L'augmentation du taux maximal de garantie d'emprunt que les collectivités pourront consentir pour faciliter le financement de projets d'aménagement doit aussi faire l'objet d'une ordonnance, de même que la réduction du délai de traitement des recours contentieux et la lutte contre les recours mafieux. Aujourd'hui, la phase contentieuse d'un recours contre un permis de construire peut être délibérément prolongée par le requérant sur plusieurs mois, voire plusieurs années, par l'ajout au coup par coup de nouveaux griefs contre un projet. La future ordonnance pourrait donner la possibilité au juge de fixer, au cas par cas, une date au-delà de laquelle de nouveaux motifs d'annulation du permis de construire ne pourront plus être invoqués et ce, afin de contenir la durée de l'instruction des dossiers. Toujours pour gagner du temps dans le déroulement de la procédure administrative, le juge pourrait aussi organiser une procédure de régularisation du permis de construire en cours d'instance, par exemple, lorsqu'un vice entraîne l'illégalité du permis alors que les autres motifs d'annulation ne sont pas fondés. En outre, dans la trentaine d'agglomérations de plus de 50.000 habitants soumises à la taxe sur les logements vacants, les cours administratives d'appel pourraient se voir transférer la compétence de premier ressort pour traiter les recours portant sur des opérations de construction de logements de tailles importantes (plus de 1.500 m²).

Pour lutter contre les recours malveillants, la future ordonnance prévoit trois grandes mesures. La première consiste à encadrer l'intérêt à agir dans le temps (en fonction de la date d'affichage en mairie de la demande du porteur de projet) et dans l'espace – une personne physique ou morale ne pourra déposer un recours que si la construction est de nature à affecter directement les conditions d'occupation ou d'utilisation de son bien. La deuxième mesure vise à encadrer le régime des transactions par lesquelles il est mis fin à l'instance. Il est ainsi envisagé de soumettre à une obligation de transparence, qui passerait par une déclaration auprès de l'administration des impôts, des transactions qui aboutissent à un désistement de la personne qui a engagé un recours contre un permis de construire en contrepartie du versement d'une somme d'argent ou de l'octroi d'un avantage en nature. La troisième mesure, qui ne s'appliquera pas aux recours déposés par des associations de défense de l'environnement agréées, vise à permettre au bénéficiaire du permis de construire de demander au juge de condamner l'auteur du recours abusif à lui allouer des dommages et intérêts en cas de préjudice anormal.

Densification en zone urbaine


Le projet de loi d'habilitation à légiférer par ordonnances contient également plusieurs dispositions visant à encourager la densification en zone urbaine. Une ordonnance visera ainsi à favoriser la transformation de bureaux en logements dans les zones tendues comme l'Ile-de-France où il existe plus de 2,5 millions de m² de bureaux inutilisés. Plusieurs dérogations aux règles de constructibilité fixées par les plans locaux d'urbanisme (PLU) seront permises. Ainsi, la transformation en habitation d'un bâtiment existant affecté à une autre destination par reconstruction, rénovation ou réhabilitation sera autorisée même si ce bâtiment dépasse le volume maximal ou la densité maximale de construction fixée pour les logements et ne dispose pas des aires de stationnement prévues pour les logements. Une ordonnance est par ailleurs prévue pour limiter les obligations réglementaires en matière de places de stationnement. Dès lors que le projet immobilier est situé à proximité de transports collectifs, il ne pourra pas être exigé plus d'une place de stationnement par logement dans ces secteurs. Autres mesures prévues par ordonnance pour encourager une "densification douce" dans les zones tendues : autoriser la création de logements par surélévation d'immeubles existants et l'alignement au faîtage pour ajouter quelques étages sur les "dents creuses".

Enfin, le texte présenté le 2 mai prévoit des ordonnances pour la création d'un statut spécifique et d'un bail emphytéotique dédié pour favoriser le développement de logements intermédiaires, la suppression de la possibilité de garantie intrinsèque pour les opérations de ventes de logements en l'état futur d'achèvement (Vefa) afin de protéger les accédants en cas de défaillance du promoteur en cours de chantier et une gestion de trésorerie facilitée pour les entreprises du bâtiment, en réduisant par exemple les délais de production du décompte général après réception des travaux.

Anne Lenormand

Les mesures attendues dans le projet de loi urbanisme-logement
Le ministère du Logement a dévoilé ce même 29 avril les "mesures structurelles" du prochain projet de loi Urbanisme-Logement attendu d'ici cet été. Celui-ci devrait ainsi permettre la densification des quartiers pavillonnaires en limitant la possibilité pour les PLU de fixer une taille minimale de terrain et une densité maximale des constructions – le coefficient d'occupation des sols (COS) sera supprimé. Le futur texte a aussi pour ambition de donner un coup d'arrêt à l'artificialisation des sols en favorisant le reclassement en zones naturelles des anciennes zones à urbaniser dans les PLU et en luttant contre le mitage de l'espace. Pour protéger les espaces agricoles et naturels, certains principes limitant la constructibilité seront renforcés : dans les communes non couvertes par un document d'urbanisme, pour limiter le nombre d'exceptions à la règle d'inconstructibilité, la possibilité de recourir à une délibération motivée du conseil municipal sera supprimée et dans celles couvertes par un document d'urbanisme, la possibilité d'utiliser le "pastillage"* en zone agricole et naturelle sera rendue exceptionnelle. Le projet de loi veut aussi élargir le champ d'intervention des commissions départementales de la consommation des espaces agricoles (CDCEA) à l'ensemble des espaces "d'usage agricole", qu'ils soient classés en zone agricole(A) ou naturelle ou forestière (N) dans les PLU. Dans les communes non couvertes par un document d'urbanisme, la consultation des CDCEA sera étendue à tous les projets de construction et dans celles couvertes par un document d'urbanisme, le champ d'intervention des CDCEA sera élargi à l'ensemble des espaces d'usage agricole. Tous les schémas de cohérence territoriale (Scot) devront en outre réaliser une étude de densification des formes urbaines et les PLU devront élaborer une étude de stratégie foncière afin de repérer les gisements fonciers et de cartographier les espaces naturels à protéger. Le futur texte entend par ailleurs donner une nouvelle impulsion aux PLU intercommunaux en permettant le transfert automatique de la compétence PLU aux communautés de communes et d'agglomération. Il prévoit aussi de renforcer la participation des citoyens en amont des projets. Seront donc mis à la disposition du public les projets soumis à permis de construire situés dans une commune non couverte par un document d'urbanisme, lorsque l'autorité environnementale n'aura pas jugé nécessaire la réalisation d'une étude d'impact, ainsi que l'avant-projet (en amont même de l'enquête publique) dans les communes couvertes par un document d'urbanisme. Dans ce dernier cas, pour ne pas alourdir les procédures et encourager la démarche participative, l'enquête publique prévue lorsque les projets sont soumis à l'étude d'impact serait alors supprimée. A.L.
*Autorisation d'autres constructions, une souplesse destinée à l'origine à faciliter l'installation de gîtes ruraux ou de bâtiments de vente de produits de la ferme.
 

 

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