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Environnement - Comment mieux respirer en ville ?

En ouverture des premières Assises nationales de la qualité de l'air, ce 6 avril, la ministre de l'Ecologie a précisé les contours des zones d'actions prioritaires pour l'air (Zapa) qui vont être expérimentées dans huit collectivités. Un arrêté de classement des types de véhicules interdits est en consultation publique.

Les premières Assises nationales de la qualité de l’air se tiennent jusqu’au 7 avril à Paris. Organisées par l’Ademe et la direction générale de l'Energie et du Climat (DGEC) du ministère de l'Ecologie, elles ont fait salle comble pour leur ouverture ce 6 avril. A cette occasion, Pierre-Franck Chevet, directeur de la DGEC, a rappelé les grands enjeux actuels : "Malgré une nette amélioration des outils de surveillance de la qualité de l’air, des progrès restent à faire pour développer sur le plan national la recherche et développement, et pour mieux connaître au niveau des collectivités le parc roulant dont elles disposent." "Car dans le panel d’actions possibles, il ne faut pas négliger celles qui visent à réduire les polluants émis par leurs flottes captives, par exemple les bus ou les bennes à déchets", a renchéri la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet. A noter par ailleurs qu’un décret  visant à fixer de nouvelles modalités de déclenchement des seuils de pollution est en cours d'élaboration.

Prévenir les risques

Quant au plan particules voulu par la loi Grenelle 1, il suit son chemin. "Il est en phase de territorialisation", a glissé Pierre-Franck Chevet. L’enjeu est dans son appropriation et son articulation au niveau local avec, d’un côté, les plans de protection de l’atmosphère (PPA), pilotés par les préfets et en passe d'être révisés, de l’autre, les schémas régionaux climat-air-énergie (Srcae), dont la mise en oeuvre est imminente (le décret d'application est attendu dans les prochains jours et les premières cartes régionales en mai). Quoi qu’il en soit, "la recherche d’actions adaptées ne peut se faire qu’au niveau local", a bien insisté Pierre-Franck Chevet. Et Jean-Marc Uhry, vice-président de Grenoble Alpes métropole, de préciser qu’en effet, "les collectivités ont avant tout un travail de coordination à mener, en animant notamment sur leur territoire le réseau des acteurs engagés dans la protection de l’air". Cet enjeu, Jo Spiegel, président délégué de l’agglomération Mulhouse Alsace, invite "à ne pas le banaliser et à bien en soupeser les risques". Un point de vue partagé par la ministre, qui souligne qu’"à tort, on perçoit trop souvent la pollution de l’air comme une gêne alors qu’elle est clairement une menace pour la santé". A ce propos, des experts de l'Institut de veille sanitaire sont intervenus pour expliquer les apports de centaines de travaux de recherche menés dans plusieurs villes du monde. Conclusion : l’exposition aux particules fines dans l’air n’accentue pas seulement l’asthme chez l’enfant mais peut le déclencher. De même, elle n’engendre pas que des problèmes respiratoires mais aussi des maladies cardio-vasculaires.

Approche globale

Reste à ce que les habitants prennent la mesure de l’enjeu. "Le fait qu’ils se l’approprient est crucial", a indiqué Jean-Louis San Marco, professeur de médecine et président de la Fédération nationale d'éducation pour la santé. Selon lui, il faut pour cela "miser sur leur capacité à réfléchir et à faire les bons choix, un point dont on doute parfois trop en France". "Il faut donner du sens à nos actions. Pour en débattre, s’appuyer sur les plans climat est un bon point de départ", a recommandé Jo Spiegel. Problème : les actions menées localement sur le climat, l’air et l’énergie sont bien souvent isolées, déconnectées les unes des autres. "Or, plus de transversalité, de passerelles et de cohésion entre ces problématiques est essentiel", a motivé Pierre-Franck Chevet. Regrettant cette approche sectorielle, Philippe Ledenvic, directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) en Rhône-Alpes, a également plaidé pour que les collectivités aient "une approche plus globale de l’enjeu".

Huit zones d’actions prioritaires pour l’air

Les zones d'actions prioritaires pour l'air (Zapa) relèvent d’une expérimentation voulue par le plan particules. "Il s’agit d’expérimenter, pas d’interdire, a précisé Nathalie Kosciusko-Morizet. Localement, c’est à chaque ville d’en discuter en conseil municipal, avec ses commerçants et ses habitants." Pour l’heure, huit villes ont déjà franchi le pas. Pendant trois ans, une ville (Paris), une communauté urbaine (Bordeaux) et des agglomérations (Plaine commune, Clermont communauté, Grand Lyon, Grenoble Alpes métropole, Nice-Côte d’Azur et la communauté de pays d’Aix) vont donc restreindre sur un bout de leur territoire la circulation des véhicules les plus polluants, sous peine d’une contravention. Le type de véhicule interdit nécessite de publier un arrêté de classement, d’ores et déjà mis en consultation publique. Le classement par groupe de véhicules - deux-roues, tricycles et quadricycles à moteur, voitures particulières, véhicules utilitaires légers, poids lourds, bus et autocars - est fondé sur les normes Euro. "Et ce à la demande des collectivités volontaires, excepté une qui voulait intégrer un critère CO2, mais cela était trop complexe", a éclairé la ministre, qui a par ailleurs profité de la manifestation pour nommer publiquement à la tête du Conseil national de l’air un député, Martial Saddier (Haute-Savoie). Pour répondre à la crainte de certains élus, la ministre a précisé qu’il ne s’agissait pas avec cet outil de "vider les centres-villes mais bien de les reconquérir et de les redynamiser". "Même s'il ne s'agit pas d'une mesure définitive, globale et de grande ampleur, on peut s'attendre à une baisse utile des particules fines dans l'atmosphère", a réagi Michel Destot, député-maire de Grenoble et président de l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF), dans un communiqué sur les Zapa. Mais pour l'AMGVF, "la mise en place des périmètres doit être conforme à la libre administration des collectivités locales, et être accompagnée d'un développement de transports alternatifs au service des populations concernées".