Investissements - Collectivités et PME : les annonces de François Hollande pour relancer l'investissement
L'année écoulée a encore été rude pour l'industrie française avec, notamment, le passage sous pavillon américain du pôle énergie du fleuron français Alstom. Pourtant, "l'industrie a un avenir en France", a martelé le président de la République, vendredi 3 avril, lors d'un déplacement dans l'Oise, alors que sa part dans le PIB est passée de 34% aux grandes heures du Commissariat au plan à moins de 20% depuis 2013… Avec une croissance atone, un chômage à plus de 10%, François Hollande a dit ne pas vouloir "attendre la prochaine note de l'Insee" pour relancer l'investissement des entreprises. Une référence à la note de conjoncture de l'Insee publiée la veille, qui table sur une timide reprise économique mais encore insuffisante pour provoquer le "déclic" de l'investissement des entreprises et enrayer la progression du chômage.
Le redressement de l'industrie "suppose de nouveaux investissements, c'est la clé pour préserver et développer l'emploi", a insisté François Hollande. Il s'exprimait sur le site des Forges de Trie-Château, qu'il a qualifié d' "exemple de redressement et de vitalité", depuis leur rachat en 2013 par le groupe familial français Lebronze alloys.
Un nouveau fonds de 500 millions d'euros pour les PME et ETI
Quelques mois après les Assises de l'investissement de septembre 2014, le locataire de l'Elysée a annoncé de nouvelles mesures dont le lancement d'un nouveau fonds d'investissement dans le capital des PME et ETI baptisé "Novi" et doté de 500 millions d'euros. L'accord visant à la création de ce fonds a été signé le même jour par le directeur général de la Caisse des Dépôts, Pierre-René Lemas, et plusieurs assureurs (Predica, Generali, AG2R, La Mondiale). Ce fonds "sera directement opérationnel dès le mois prochain", a assuré le chef de l'Etat. Il visera en priorité les secteurs des 34 plans de la Nouvelle France industrielle (qui devraient d'ailleurs être resserrés).
François Hollande a également promis un nouveau mécanisme de "stimulation fiscale" pour accélérer la mise en route des projets des entreprises. "Toutes les entreprises qui décideront d'accélérer leurs projets, d'aller plus vite pour investir, se verront accorder un dispositif fiscal qui améliorera leur trésorerie et la rentabilité de l'opération", a-t-il précisé.
Enfin, les prêts de développement des entreprises de Bpifrance seront portés à 8 milliards d'euros.
En dehors de ces annonces, l'Elysée se félicite des mesures déjà mises en place depuis un an pour stimuler l'investissement dans l'économie, comme les nouveaux produits d'assurance-vie, ou la réforme des "fonds de prêts à l'économie" qui permettent aux investisseurs d'investir dans des prêts aux entreprises ou aux collectivités. 80 fonds de prêts à l'économie étaient installés fin 2014, représentant une levée de fonds de près de 14 milliards d'euros, dont 8 ont déjà été investis, précise l'Elysée. C'est le cas de l'entreprise Lebronze alloys qui fournit des alliages de métaux pour de grands groupes de l'aéronautique ou de l'automobile (Safran, Boeing, Airbus…). Elle a reçu vendredi un prêt de 10 millions d'euros, de quoi couvrir les 15 millions d'euros d'investissements qu'elle prévoit pour moderniser son appareil productif d'ici 2016. Le site de Trie-Château fait partie des six usines du groupe sur le sol français, il était menacé de disparition en 2008…
Remboursement anticipé de TVA pour les collectivités
Les collectivités, qui réclament à cor et à cri des assises de l'investissement local, ne sont pas en reste. En annonçant une accélération du remboursement de la TVA au profit des collectivités qui investiront (sans plus de précisions), le président de la République a sorti de ses tiroirs une mesure très bien connue et régulièrement évoquée comme solution de relance de l'investissement.
Pas plus tard qu'à l'automne dernier, la commission des finances de l'Assemblée nationale avait décidé, dans le cadre de la discussion sur le projet de loi de finances pour 2015, d'activer ce levier pour contre-balancer les effets de la baisse des dotations sur l'investissement public local. En séance, les députés n'avaient finalement pas adopté la mesure, qui devait coûter 1 milliard d'euros à l'Etat. Bercy et Matignon jugeaient cette somme bien trop élevée pour les finances publiques.
On le sait, il s'agissait là de reprendre une des mesures phares du plan de relance décidé en décembre 2008 par le gouvernement Fillon. Elle avait connu un assez grand succès puisque 19.540 collectivités de toutes tailles et de toutes catégories avaient signé une convention avec l'Etat et obtenu en 2009 le versement de deux années de FCTVA (au titre de 2007 et 2008). En échange, elles s'étaient engagées à augmenter leurs investissements au-delà d'un certain seuil.
Mais, la Cour des comptes avait critiqué en septembre 2010 l'effet d'aubaine du remboursement anticipé qui a coûté pas moins de 3,85 milliards d'euros au budget de l'Etat. Un coût jugé élevé pour des résultats, somme toute, très mitigés. La mesure a en effet permis aux collectivités de "moins recourir à l'emprunt", mais sans stimuler leurs investissements, qui "ont stagné" en 2009 par rapport à 2008, soulignaient les magistrats dans un rapport en septembre 2010.
En outre, la mesure a augmenté la complexité du fonctionnement du FCTVA, avec désormais trois régimes. Les collectivités ayant bénéficié du remboursement anticipé du FCTVA en 2009 ont en effet continué les années suivantes à percevoir leur attribution l'année suivant l'engagement de la dépense. Mais celles qui n'avaient pas signé de convention, continuent à percevoir leur versement avec deux années de décalage. Enfin, certaines intercommunalités obtiennent leur remboursement sans délai. Au nom de la simplicité et de l'efficacité, des parlementaires réclament régulièrement une harmonisation de ces règles.
Un "compte personnel d'activité"
François Hollande n'a pas limité son intervention aux investissements et tenu à apporter quelques garanties pour les salariés. "Le premier investissement, il est dans l'humain", a-t-il dit, en pleine polémique sur l'assouplissement du contrat à durée indéterminée – que, dans sa note sur la France publiée le 2 avril, l'OCDE appelle de ses vœux. Le président de la République n'a pas écarté cette hypothèse mais, selon lui, "donner plus de souplesse" aux entreprises ne doit pas conduire à "créer de la précarité pour les salariés "… Il a annoncé à ce titre la création prochaine d'un "compte personnel d'activité" qui regrouperait le compte personnel de formation, le compte pénibilité, la mutuelle… et qui permettrait au salarié de conserver tous ses droits en cas de changement d'entreprise ou de région.
Le Premier ministre, Manuel Valls, devrait prendre le relai et annoncer de nouvelles mesures économiques, mercredi, dans la foulée d'un Conseil des ministres et d'un séminaire gouvernemental présentés comme "exceptionnels".