Adaptation au changement climatique : le champ d’action des territoires
Face à l’urgence climatique, les territoires français sont en première ligne. Sécheresses, canicules, montée des eaux, fonte des glaciers… les effets du dérèglement se font déjà sentir, avec des intensités variables selon les régions.
Alors que le GIEC prévoit une hausse des températures mondiales de 2 à 4 °C d’ici 2100, l’adaptation n’est plus une option : elle s’impose comme un impératif social, économique et territorial.

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Comprendre les impacts du changement climatique sur les territoires
Chiffres clés et prévisions : où en sommes-nous ?
D’après les scénarios du GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), le réchauffement climatique global pourrait conduire à une hausse des températures comprise entre 2 et 4 °C d’ici 2100.
Pour coordonner les actions d’adaptation sur le territoire, la France a lancé la TRACC (Trajectoire de Réchauffement de référence pour l’Adaptation au Changement Climatique). Selon cette trajectoire, le pays se prépare à :
- une augmentation des vagues de chaleur de 20 à 50 jours de canicule de plus par an d’ici 2050 ;
- des sécheresses plus fréquentes et plus longues – impactant l’agriculture et les ressources en eau ;
- des épisodes de pluies diluviennes plus intenses.
Par conséquent, d'importants coûts sociaux et économiques sont à prévoir. Par exemple, chaque année en France, les sécheresses génèrent une dépense de 726 millions d’euros d'après les données 2024 de l'I4CE. C’est 35 % de plus que dans les années 2000. Ce coût, déjà élevé, va continuer à grandir dans les prochaines décennies, au regard des sécheresses toujours plus fréquentes.
Par ailleurs, l’adaptation des bâtiments et des infrastructures à ces nouveaux impératifs environnementaux soulève des besoins d’investissements colossaux, qui se comptent en milliards d’euros. Le parc immobilier existant nécessite une rénovation associant performance énergétique et adaptation climatique. Quant aux nouveaux bâtiments, ils sont visés par des nouveaux impératifs de conception bioclimatique, afin d'optimiser leur confort, leur performance et leur impact environnemental.
Enfin, la résilience des réseaux techniques (eau, énergie, communication…) complète cette approche : leur fonctionnement doit désormais être garanti, même lors d’événements climatiques majeurs.
Des défis et des stratégies propres à chaque territoire
Face au changement climatique, chaque territoire français présente des vulnérabilités spécifiques, liées à ses caractéristiques géographiques, économiques et environnementales.
Les zones littorales, de même que les DOM-TOM, affrontent l’érosion côtière, la montée des eaux et des événements climatiques extrêmes plus fréquents et intenses. Ces phénomènes menacent la biodiversité et les contraintes économiques et géographiques continuent de croître. De nombreuses collectivités doivent alors envisager la démolition et la relocalisation d'infrastructures ou encore le sacrifice de zones résidentielles. Autant d’opérations dont les coûts doivent, par sécurité, être anticipés par les territoires.
Les villes sont également largement exposées à différents risques dont les phénomènes impactent directement et gravement la santé publique et la qualité de vie : vagues de chaleur, surchauffe urbaine, inondations et crues soudaines, etc.
Enfin, en montagne, les paysages pâtissent durement du réchauffement climatique qui provoque, entre autres, la fonte des glaciers, la disparition progressive de certaines ressources en eau (notamment l’été) et l’intensification des risques naturels. En conséquence, l’économie touristique et la sécurité des résidents permanents sont directement menacés, soulevant la nécessité d’une diversification de l’activité, moins dépendante de l’enneigement.
Chaque contexte impose des réponses adaptées, fondées sur un diagnostic local précis. Ce dernier passe notamment par :
- l'identification des vulnérabilités ;
- l'élaboration de scénarios prospectifs ;
- des plans d’action priorisés ;
- le renforcement de la maîtrise foncière ;
- la sécurisation des populations face aux phénomènes extrêmes.
Comment engager les territoires dans l’adaptation climatique ?
Atténuer et s’adapter : un double impératif
Avec les nombreux impacts causés à court terme, le changement climatique est désormais une réalité quotidienne. Il place les collectivités face à un double défi :
- atténuer en réduisant la consommation énergétique, en accélérant la décarbonation, en repensant la construction et en développant les énergies renouvelables ;
- s’adapter en faisant évoluer les infrastructures, les modèles économiques et les usages pour renforcer la résilience territoriale.
Aujourd’hui, malgré l’urgence de réinventer les territoires et de repenser l’économie, la dimension adaptative reste sous-investie. L’enjeu est donc de passer d’une approche réactive à une démarche d’anticipation et de résilience, qui vise la protection et la régénération des ressources naturelles.
Des solutions existent, mais les territoires se heurtent souvent à des freins institutionnels et socioculturels. Pourtant, cette transformation nécessite une mobilisation collective et un engagement marqué, quelques territoires précurseurs ont pu illustrer cette démarche en inscrivant la protection environnementale dans leur nouveau modèle économique. La Banque des Territoires joue d’ailleurs un rôle facilitateur dans cette optique grâce à ses dispositifs de coordination et d’accompagnement de projets.
Le cadre structurant des politiques nationales d’adaptation
Depuis 2006, la France s’est positionnée comme pionnière de l’adaptation au changement climatique avec l’élaboration d’une stratégie nationale – le Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC). Ce plan, qui constitue l’axe structurant de cette politique, vise à intégrer les enjeux d’adaptation dans l’ensemble des politiques publiques (santé, économie, agriculture, urbanisme, etc.).
Le PNACC-3 franchit une étape supplémentaire. Il prépare le pays à un réchauffement de +4 °C avec des transformations profondes des modes de vie et de travail, ainsi que d'importants déplacements de population.
Dans la continuité de cet encadrement, la loi Climat et résilience de 2021 accélère cette transformation durable de l’économie et des territoires face aux défis climatiques. Elle agit concrètement et simultanément sur la consommation, les transports, le logement, l’alimentation et la justice environnementale. Parmi les mesures emblématiques prises dans le cadre de cette loi, on peut notamment citer l’interdiction progressive des passoires thermiques d’ici 2034. Elle implique une rénovation massive du parc immobilier français.
Ces politiques nationales répondent à un double défi : réduire les émissions de gaz à effet de serre, et transformer durablement les territoires afin de renforcer leur résilience face aux aléas climatiques.
Adapter les territoires : de l’accompagnement stratégique aux solutions durables
Accompagner la conception de trajectoires d’adaptation
L’adaptation territoriale aux effets du changement climatique nécessite, de la part des acteurs publics, un changement complet de paradigme dans la manière de concevoir leurs projets territoriaux. Cela suppose, dès leur conception, un accompagnement structuré, soit un appui concret à :
- l’élaboration de plans d’action priorisés et de plans pluriannuels d’investissement permettant aux collectivités d’échelonner les efforts sur la durée ;
- la recherche de financements – notamment européens – pour concrétiser ces ambitions ;
- la diversification des activités économiques et touristiques ;
- l’émergence de nouvelles filières plus résilientes face aux défis climatiques.
Façonner les territoires de demain grâce aux solutions fondées sur la nature
Les solutions naturelles s’imposent aussi comme des réponses efficaces aux défis climatiques, y compris pour corriger les défaillances de l’existant. Parmi les plus évidentes et simples à mettre en place, on peut notamment citer :
- la renaturation des surfaces artificialisées ;
- l’aménagement d’îlots de fraîcheur en milieux urbains ou fortement minéralisés ;
- la végétalisation des espaces publics et la création de parcs et de forêts urbaines.
Gérer l’eau et prendre en compte le grand cycle de l’eau
La gestion et la préservation de l’eau constituent par ailleurs un pilier central de l’adaptation climatique et un enjeu majeur pour les décennies à venir. Plusieurs actions peuvent contribuer, de manière déterminante, à la protection et à la gestion durable de cette ressource :
- la désimperméabilisation des sols pour favoriser l’infiltration des eaux pluviales et limiter les phénomènes de ruissellement ;
- la création de plans d’eau pour constituer des réserves potentielles ;
- la réouverture des rivières et le réaménagement des berges pour restaurer les fonctionnalités naturelles des cours d’eau ;
- l’installation d’ouvrages de prévention des inondations pour sécuriser les populations vulnérables.
Miser sur la résilience pour adapter les territoires
La résilience ne se résume pas à renforcer les infrastructures face aux aléas climatiques. Elle désigne une transformation plus large, qui touche à la fois l'organisation de l'espace, les choix d'aménagement, les modèles économiques locaux et les priorités d'investissement.
L’adaptation au changement climatique est la responsabilité de tous : collectivités territoriales, entreprises, citoyens et aménageurs. Si des solutions existent déjà et sont progressivement déployées, leur accélération et leur coordination deviennent indispensables pour garantir une mise en œuvre efficace et cohérente à l’échelle nationale.
Ainsi, intégrer et démocratiser la résilience dans les projets territoriaux représente désormais un impératif incontournable, avec un objectif ultime : créer des espaces de vie résistants, inclusifs et durables. Des adaptations que la Banque des Territoires accompagne et soutient quotidiennement.
FAQ : Questions/réponses
Quelles sont les conséquences immédiates du changement climatique pour les territoires ?
Les territoires sont confrontés à des événements climatiques et naturels extrêmes : canicules, sécheresses, inondations, érosion, raréfaction des ressources en eau, etc. Ces phénomènes ont à leur tour un impact sur l’équilibre de la biodiversité et des écosystèmes. En bout de chaîne, ils génèrent une augmentation des coûts de maintenance. Une adaptation est donc nécessaire.
Pourquoi l’adaptation est-elle aussi importante que l'atténuation ?
L’atténuation et l’adaptation constituent deux piliers complémentaires. La première vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre pour limiter le réchauffement climatique. La seconde permet de limiter les dommages humains, économiques et environnementaux du changement climatique, qui reste inévitable. Un investissement immédiat dans des infrastructures et des solutions adaptées reste donc moins coûteux que la mise en place d’actions correctives.
Quels sont les coûts de l'adaptation pour les territoires ?
Chaque année, les territoires dépensent 1 à 2,5 milliards d’euros pour la construction neuve, 4,4 milliards d’euros pour la rénovation et 1 milliard d’euros pour l’aménagement des transports, l’adaptation du réseau de distribution d’eau potable et les infrastructures énergétiques.