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Sécurité civile - Bernard Cazeneuve veut expérimenter un "contrat territorial de réponses aux risques"

L'idée d'expérimenter des "contrats territoriaux de réponses aux risques et aux menaces" fait partie des nombreux points abordés par une circulaire que le ministre de l'Intérieur vient d'adresser aux préfets sur les "orientations en matière de sécurité civile". Bernard Cazeneuve entend par ailleurs améliorer le dialogue avec les élus à la suite du renouvellement des conseils d'administration des Sdis et préparer la fusion des deux fonds d'indemnisation en cas de catastrophes naturelles ou de calamités.

L'organisation de la sécurité civile au niveau départemental, à travers le Sdis, a prouvé "sa pertinence" pour déployer les moyens et apporter une réponse de proximité. Pour autant, selon le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, "la complexification des risques et l'évolution des menaces" imposent un changement d'échelle : "zonale pour les risques complexes ou spécialisés, nationale ou internationale pour les risques majeurs". C'est ce qu'il indique dans une circulaire détaillée du 26 mai adressée aux préfets sur les "orientations en matière de sécurité civile". Le ministre souhaite ainsi expérimenter courant 2015 un "contrat territorial de réponses aux risques et aux menaces" à l'échelle des zones de défense et de sécurité de Paris et du Sud-Est. Ce contrat viendrait décliner le "contrat général interministériel" créé par le Livre blanc sur la sécurité et la défense nationale. Le CGI "recense les moyens civils disponibles pour faire face aux conséquences de crises de sécurité intérieure".
Alors qu'en plein débat sur la réforme territoriale, le ministre de l'Intérieur avait assuré, lors du dernier congrès des pompiers, le 4 octobre 2014 à Avignon, vouloir maintenir l'échelon départemental des services d'incendie et de secours, il ouvre ainsi une brèche sur la gestion des risques. Le premier bilan de ces expérimentations sera dressé début 2016. Il "enrichira la refonte de la doctrine opérationnelle des schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques (Sdacr)". Il est donc préférable "de ne pas engager de révision complète de vos Sdacr", précise le ministre. Les futurs schémas devront "mieux intégrer l'ensemble des enjeux de sécurité civile et les notions de bassins de risques".

Plans de sauvegarde : deux tiers des communes sont en règle

En ce qui concerne la "planification opérationnelle", Bernard Cazeneuve estime que "le dispositif Orsec constitue la colonne vertébrale de l'organisation de la gestion des crises de sécurité civile". Ce dispositif, explique-t-il, "définit une chaîne de commandement des opérations de secours claire et unique, placée sous la direction du maire, ou sous votre direction lorsque la situation l'exige". Il demande aux préfets de veiller "à ce que les dispositions communes d'Orsec, comme celles des plans spécialisés, soient élaborées et régulièrement mises à jour, à l'aune des retours d'expérience que vous organiserez systématiquement après les événements".
Bernard Cazeneuve demande au passage aux préfets de veiller "au respect par les communes de leurs obligations en matière de plan communal de sauvegarde (PCS)". Seulement deux tiers des 11.779 communes concernées sont en règle, avec des situations "très contrastées d'un département à l'autre". Pour aider les communes dans leur démarche, une trame simplifiée a été élaborée. Elles peuvent également élaborer un plan intercommunal de sauvegarde. Il doit être arrêté par le président de l'intercommunalité et par chacun des maires des communes concernées. Le ministre demande aussi aux préfets de sensibiliser "les maires à l'intérêt des réserves communales de sécurité civile, très peu développées alors même qu'elles sont complémentaires des plans communaux de sauvegarde et visent à renforcer la capacité de réponse de la commune face aux événements sortant de l'ordinaire".

Renforcer la concertation avec les élus

La circulaire entend par ailleurs renforcer la concertation avec les élus. "Je proposerai aux responsables de l'Assemblée des départements de France et de l'Association des maires de France de renforcer nos modalités d'échanges et de discussions", indique le ministre. Or ces orientations interviennent juste après le renouvellement des conseils départementaux et des conseils d'administration des Sdis. "Il est nécessaire que vous les rencontriez régulièrement dans le cadre d'entretiens spécifiquement dédiés aux problématiques de sécurité civile", insiste le ministre qui appelle notamment à mobiliser les conseils départementaux de sécurité civile sur des thématiques comme l'engagement des jeunes (volontariat, bénévolat associatif…), la prévention des accidents ou la promotion de gestions de premiers secours… Le ministre regrette par ailleurs que les contacts entre les préfets et les directions départementales de services d'incendie et de secours soient "ni réguliers, ni formalisés, ou se limitent aux seuls événements opérationnels à gérer".
Une bibliothèque des bonnes pratiques territoriales sera mise en ligne "à compter de la mi-2015" par la DGSCGC (Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises).

Vers une fusion des deux fonds d'indemnisation

Autre sujet important : l'amélioration des procédures d'indemnisations en cas de catastrophes naturelles. Un projet de décret actuellement examiné au Conseil d'Etat renforcera les mesures déjà prises en 2014 pour accélérer ces procédures. Ce décret "apporte plusieurs évolutions pour harmoniser les règles d'éligibilité et de fonctionnement des deux fonds (fonds calamités et fonds catastrophes naturelles, ndlr) dans la perspective de leur fusion", précise le ministre. Le décret allégera également les modalités d'évaluations des dégâts et assouplira les conditions d'utilisation des fonds destinés à indemniser à la fois les collectivités, les exploitations agricoles et les entreprises en cas de calamités. Outre la fusion, l'idée du ministre est d'éviter tout gel en fin de gestion afin que les collectivités puissent disposer le plus rapidement possible des sommes nécessaires à la mise en œuvre des travaux de reconstruction.
La réforme de 2014, détaillée dans une circulaire du 23 juin prise à la suite de graves intempéries qui ont révélé "l'inadaptation des dispositifs de soutien aux collectivités territoriales", a d'ores et déjà été mise en œuvre "à cinq reprises", précise la circulaire.
Après chaque catastrophe, les préfets devront suivre les travaux de réparation et de reconstruction. Il leur revient "d'accompagner les élus et d'identifier les difficultés qu'ils rencontreraient", demande le ministre. "La mise en œuvre de guichets uniques des financeurs publics constitue une bonne pratique qu'il convient de développer", poursuit-il.

Volontariat et service civique

Bernard Cazeneuve souhaite aussi remobiliser les préfets sur la mise en œuvre de l'engagement pour le volontariat signé en octobre 2013. François Hollande s'était alors engagé à atteindre à nouveau en 2017 le niveau de 200.000 volontaires en France, alors qu'il était de 192.300 à ce moment-là. Le ministre regrette que trop peu de jeunes soient accueillis dans les Sdis en service civique. Il devait d'ailleurs ce rendre sur ce thème dans la Loire, lundi 8 juin, en compagnie de Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports et Myriam El Khomri, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Bernard Cazeneuve entend aussi développer la formation des citoyens aux risques. Le président du conseil d'administration du Sdis du Gard Alexandre Pissas a été chargé d'une mission sur le sujet.

Bientôt une instruction sur le secours d'urgence aux personnes

Le ministre revient sur l'épineux dossier du secours d'urgence aux personnes. Les discussions entamées en 2014 entre la Santé et l'Intérieur pour mettre fin aux tensions entre pompiers et Samu sont "sur le point d'aboutir", se félicite le ministre. "Je vous adresserai conjointement avec la ministre chargée de la santé une instruction sur ce sujet auquel j'attache une grande importance", précise-t-il. Les préfets devront veiller à la déclinaison territoriale de cette instruction. "Les logiques concurrentielles n'ont aucune place", martèle Bernard Cazeneuve.