Patrimoine - Archéologie préventive : le livre blanc plaide pour davantage de discipline
Le 29 mars, Dominique Garcia, vice-président du Conseil national de la recherche archéologique, a remis à Aurélie Filippetti le "Livre blanc de l'archéologie préventive". En octobre dernier, la ministre de la Culture installait en effet la commission d'évaluation scientifique, économique et sociale du dispositif d'archéologie préventive (voir notre article ci-contre du 31 octobre 2012). Cette instance était notamment chargée, selon son arrêté constitutif, "de procéder à une évaluation scientifique, économique et sociale du dispositif d'archéologie préventive, tel qu'il ressort des lois et règlements en vigueur, ainsi que des pratiques administratives et scientifiques, afin d'en dresser un bilan chiffré et analytique". Le livre blanc issu des travaux du groupe de travail doit alimenter le projet de loi relatif au patrimoine, qui devrait être soumis au Parlement à la fin de l'année 2013 (voir notre article ci-contre du 19 novembre 2012).
Un bilan ambivalent
Le document commence par dresser un bilan ambivalent de l'archéologie préventive, mise en place, sous sa forme actuelle, par la loi du 17 janvier 2001. D'un côté, "l'archéologie préventive est devenue depuis plus de dix ans, sous l'impulsion du ministère chargé de la Culture, une source majeure de données patrimoniales et scientifiques". Ses moyens ont été considérablement renforcés. Aux effectifs limités de l'Association pour les fouilles archéologiques nationales (Afan) ont succédé aujourd'hui les 1.423 équivalents temps plein (ETP) de l'Institut national des recherches archéologiques préventives (Inrap), mais aussi les 727 emplois des services d'archéologie préventive des collectivités territoriales et les 471 emplois des opérateurs privés. Malgré ses imperfections, la redevance d'archéologie préventive (RAP) permet également de disposer de recettes affectées.
Le résultat est incontestable : le passage de l'archéologie de sauvetage à l'archéologie préventive s'est traduit en effet par "une augmentation sensible du nombre d'opérations menées préalablement à des destructions de sites par des opérations d'aménagement". Sur le plan qualitatif, "la communauté scientifique salue comme très positif du point de vue de la connaissance fondamentale le fait que l'essor récent de l'archéologie préventive, en France, a radicalement changé l'échelle de notre perception".
Mais, d'un autre côté, "le dispositif actuel ne permet cependant pas encore à l'Etat de répondre à tous les objectifs du service public de l'archéologie préventive". Le livre blanc pointe notamment une organisation administrative complexe, des outils insuffisants ou inappropriés, ou encore une gestion insuffisamment coordonnée de l'archéologie nationale, qui pèse sur l'archéologie préventive.
Agrément et contrôles à renforcer
Face à ce constat, le livre blanc formule une série de propositions. On en retiendra notamment un "renforcement de la discipline", rendu indispensable par la diversité des acteurs. Ceci doit notamment se traduire par un renforcement des modalités d'agrément des opérateurs et du contrôle scientifique exercé par les services de l'Etat, ainsi que par une égalité de traitement face à la mission de recherche. Le document plaide aussi pour le développement de passerelles institutionnelles entre les différents acteurs.
Par ailleurs, le livre blanc recommande de réviser le régime de propriété des mobiliers issus des fouilles archéologiques, dans le sens d'une simplification des procédures et d'une harmonisation du régime de propriété du mobilier archéologique, quelles que soient les conditions de sa découverte. Il suggère aussi d'aligner la législation française sur celle d'autres grands pays et d'attribuer la propriété du mobilier à la puissance publique.
Lors de la remise du livre blanc, Aurélie Filippetti "a demandé à ses services de réaliser une expertise des propositions et recommandations, qu'elles soient de nature législative ou réglementaire, exposées dans la seconde partie du rapport, et d'étudier ainsi la manière dont elles pourraient être utilement reprises".