Alternance - Apprentissage : les chefs d'entreprise traînent des pieds pour 2012
Quatre chefs d'entreprise sur dix auront moins recours à l'apprentissage en 2012. C'est ce que révèle le quatrième baromètre Apprentis d'Auteuil-Ipsos, réalisé fin 2011 auprès de 301 dirigeants de PME de 1 à 499 salariés et publié le 5 janvier 2012. Ils sont 43% à déclarer qu'ils n'auront ni plus ni moins recours à l'apprentissage. Des prévisions pessimistes sur lesquelles la crise n'a pas d'incidence. Pour 63% de ces dirigeants, la crise ne renforce en effet pas leur intérêt pour l'apprentissage. "Cette tendance menace spécifiquement les formations techniques de niveau 5 (CAP et BEP)", souligne la fondation Apprentis d'Auteuil*. En effet, l'augmentation de l'apprentissage observée en 2011 est le fait des niveaux supérieurs alors que les formations de niveaux CAP et BEP connaissaient une décrue. La fondation insiste sur le risque de détournement des réformes en cours et propose que des dispositifs spécifiques soient déployés pour soutenir l'accès à l'alternance pour les jeunes de niveau CAP. Le président de la République partage semble-t-il les mêmes réflexions. Lors de ses vœux aux acteurs du monde éducatif le 5 janvier, Nicolas Sarkozy a ainsi proposé de rendre obligatoire la formation en alternance en dernière année de CAP et de bac professionnel.
Les principales raisons qui expliquent le moindre recours envisagé par les dirigeants de PME à l'apprentissage en 2012 sont l'adaptation insuffisante des apprentis au monde de l'entreprise (29%), le manque de candidats (25%), la charge salariale que représente un apprenti (22%), la méconnaissance du dispositif (20%) et la complexité administrative (16%).
L'apprentissage, un outil jugé efficace pour l'insertion des jeunes
Pourtant, les dirigeants d'entreprises interrogés se montrent massivement favorables à ce mode de formation. Pour 89% d'entre eux, l'apprentissage est un outil efficace pour favoriser l'insertion des jeunes. 76% estiment que c'est un moyen efficace pour lutter contre le chômage des jeunes. Ils sont aussi intéressés par les propositions avancées par la fondation Apprentis d'Auteuil dans son "Plaidoyer pour la jeunesse en difficulté", publié le 29 novembre 2011. Des propositions qui consistent à mettre en place des interlocuteurs relais pour le suivi éducatif des jeunes en apprentissage et à créer des incitations financières et fiscales spécifiques pour l'embauche de jeunes de niveau CAP. 82% des dirigeants interrogés sont favorables aux interlocuteurs relais et 79% aux incitations pour les niveaux CAP.
La fondation Apprentis d'Auteuil a également interrogé les dirigeants d'entreprises sur les réformes en cours. Leurs avis sont partagés. 47% des dirigeants seulement estiment que le relèvement prévu de 3 à 4% du quota des jeunes en formation en alternance dans les entreprises de plus de 250 salariés et la mise en place du système de bonus-malus permettront d'accroître le recours à l'apprentissage. Pour 38% d'entre eux, cela n'aura pas d'impact. Côté réforme de la taxe d'apprentissage, 4% seulement des dirigeants connaissent précisément les nouvelles dispositions qui visent à augmenter la part du quota de la taxe réservée aux formations en apprentissage. 74% n'en ont jamais entendu parler.
Ces données, quelque peu pessimistes, viennent entacher l'objectif d'atteindre 800.000 jeunes en alternance d'ici à 2015. A fin novembre 2011, on comptait 424.000 contrats d'apprentissage et 189.000 contrats de professionnalisation, soit un total de 613.000 contrats en alternance. Mais selon Nadine Morano, ministre en charge de l'Apprentissage et de la Formation professionnelle, qui s'est exprimée sur le sujet le 4 janvier sur France Inter, le nombre d'alternants a augmenté de 8,3% entre janvier et novembre 2011. La ministre espère atteindre une augmentation de 10% sur l'ensemble de l'année. Les chiffres consolidés à fin décembre devraient être communiqués prochainement en Conseil des ministres.
Emilie Zapalski
* Apprentis d'Auteuil est une fondation catholique qui accueille, éduque et forme plus de 13.000 jeunes en difficultés de la naissance à 26 ans pour leur permettre de s'insérer dans la société. Elle accueille 635 apprentis.
