Dépendance - Aides à domicile : des interventions de plus en plus lourdes
La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) des ministères sociaux publie les résultats d'une étude sur les aides à domicile. Celle-ci, réalisée sur une semaine de référence de l'année 2008, offre une vision très complète de la nature et de l'évolution de ces activités. Au 30 juin 2008, la France comptait ainsi 515.000 intervenantes (voir aussi notre article ci-contre du 15 juin 2010). Sur une semaine type, elles travaillent en moyenne 26,1 heures au domicile de particuliers, dont 24,8 heures chez des personnes fragilisées. En termes de publics, leurs interventions se font en très grande majorité auprès de personnes âgées (84%), loin devant les personnes handicapées (7%), les autres personnes fragiles (3%) et les personnes non fragiles (6%). En termes d'activité, l'étude fournit un tableau détaillé de toutes les prestations que sont susceptibles d'assurer ces intervenantes à domicile. Un certain nombre d'activités dominent très nettement. Ainsi, 97% des aides à domicile font le ménage ou la vaisselle chez les personnes qu'elles secondent (dont 62% tous les jours, voire plusieurs fois par jour) et 80% assurent des tâches de repassage ou de couture au moins une fois par semaine (dont 54% plusieurs fois par semaine, voire tous les jours ou plusieurs fois par jour). Viennent ensuite la préparation ou le réchauffage des repas (73% des intervenantes le font au moins une fois par semaine), le nettoyage du linge (71%), les courses ou l'achat de médicaments (69%) et l'aide à l'habillage (65%). L'intervention auprès de ces personnes fragiles comporte aussi un important volet de socialisation et de lutte contre l'isolement : 53% des intervenantes assurent une aide aux loisirs à l'extérieur (promenade, par exemple), 30% assurent une aide aux loisirs à domicile, 23% une aide aux démarches administratives et 21% un accompagnement chez le médecin. D'autres activités sont nettement plus spécialisées, comme la surveillance de nuit (5%). Enfin, les intervenantes jouent un rôle significatif dans l'aide au maintien d'une certaine autonomie, puisque 83% d'entre elles indiquent qu'une partie de leur tâche consiste à inciter les personnes aidées à assurer elles-mêmes ces différentes activités. Dans 42% des cas, cette fonction d'incitation constituerait même une grande partie de leur rôle.
L'étude montre également que les intervenantes salariées directement par un particulier employeur ont une activité moins étendue que les autres intervenantes en termes de fréquence et de diversité des aides fournies. La Drees a même calculé un "indice d'étendue des activités", qui est de 18,6 chez les intervenantes salariées directes d'un particulier, contre 26,4 chez les salariées de services prestataires et 26,6 chez les salariées dépendant d'un organisme mandataire ou en emploi mixte. Ces résultats donneraient raison aux départements, qui incitent les bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) à recourir aux services d'un prestataire. L'étude fait également apparaître une corrélation significative entre la nature des interventions et la qualification des intervenantes : les plus diplômées d'entre elles (BEP de services à la personne ou diplôme d'Etat d'auxiliaire de vie sociale) ont une activité davantage tournée vers l'aide aux actes essentiels. De même, plus le nombre d'heures de travail est élevé, plus l'activité des intervenantes est centrée sur le coeur de métier, ce qui semble traduire un phénomène de "professionnalisation" de l'activité.
Enfin, les aides à domicile déclarent avoir perçu des changements dans leur activité au cours des deux ou trois dernières années. Elles sont ainsi 42% à déclarer que le nombre des personnes dont elles s'occupent a augmenté (contre 13% qui ont le sentiment inverse), 40% à avoir le même sentiment sur la fréquence de leurs interventions (contre 9%) et 34% pour ce qui concerne la durée des interventions (contre 13%). Les trois quarts (76%) des intervenantes à domicile expliquent ces évolutions par une augmentation du besoin d'aide des personnes dont elles s'occupent, tandis que 68% de celles qui ont observé une évolution l'expliquent aussi par la dégradation de l'état de santé des personnes aidées. De même, 54% des aides à domicile déclarent que la nature de leurs activités a évolué et 48% estiment que le degré d'exigence des personnes aidées ou des familles s'est accru. Ces évolutions sont cependant loin d'être perçues de façon négative : 49% des intervenantes indiquent que leur travail est plutôt plus intéressant qu'avant, contre 5% qui déclarent le contraire et 44% qui estiment qu'il présente le même intérêt.
Jean-Noël Escudié / PCA